Le 8 mars dernier, une nouvelle initiative a été lancée à Paris : “Liberté pour prisonnières politiques et LGBTI+ malades”. Une date symbolique, pour une plateforme dont l’objectif est de défendre les droits des prisonnières malades maintenues dans les geôles turques, et les prisonniers.es LGBTIQ+, et de faire porter leur voix en France.
Le plateforme réunit plusieurs composantes et personnes, des universitaires signataires de l’appel de la paix de 2016, des défenseur.es des droits humains, des journalistes, et des organisations de femmes comme l’Union des femmes socialistes, Mouvement Démocratique des femmes en Europe.
Dans cette période où les prisons turques s’enfoncent de plus en plus dans la violence, ou des cas de tortures, de viols sont dénoncées fréquemment, comme un retour aux années, 80, 90, particulièrement dans les villes à majorité kurde, les cercueils n’arrêtent pas de sortir des prisons. Pour les un.es suite aux maladies, pour d’autres, il s’agit de “suicides” suspects. Nous n’avons pas oublié Garibe Gezer.
Vous avez sans aucun doute, un moment ou un autre lu sur Kedistan, les violations de droits, pratiques illégales, ou encore les maltraitrances physique et psychiques que subissent les prisonnier.es malades et LGBTIQ+ en Turquie. Quelques noms vous paraitront certainement alors familiers, comme celui de Aysel Tuğluk par exemple… Femme politique kurde, ex-députée, Aysel Tuğluk est gravement malade, pourtant, maintenue en prison. Bien sûr elle n’est pas la seule !
A chaque demande de justice, pour une personne, à travers un cas emblématique, la justice est bien sûr toujours demandée pour tout.es les prisonnier.es malades, dont un certain nombre sont des personnes âgées… La situation des prisonnier.es LGBTIQ+ est tout aussi pesante, fréquemment grave… Là aussi seuls quelques cas parviennent à atteindre l’opinion publique, pour sensibiliser sur les difficultés et violations de droits de tout.es les autres…
Selon les organisations de défense des Droits Humains, il y a actuellement 2.000 prisonnier·es malades, dont 600 dans un état grave. Parmi les femmes détenues, 110 sont malades dont 66 dans un état grave. Le plateforme souligne si justement, “la détention des prisonnier.es politiques se transforme en torture complète, avec ces pratiques arbitraires dans les prisons”…
Les composantes de la “Liberté pour prisonnières politiques et LGBTI+ malades” ont appelé la diaspora de Turquie, et de tous les pays, vivant en Europe, les organisations d’immigré.es, les organisations de société civile démocratiques françaises, à défendre les droits des prisonnières politiques malades et des prisonnier.es LGBTI+ et à rejoindre le plateforme, afin de renforcer leurs actions.
Le plateforme “Liberté pour prisonnières politiques et LGBTI+ malades” a préparé un dossier complet et multilingue, sur le sujet, pour ce faire.
LIBERTÉ POUR LES PRISONNIÈRES POLITIQUES ET LGBTI+ MALADES !
Les États ont l’obligation de protéger les Droits Humains fondamentaux, avant tout les Droits à la santé des personnes privées de liberté par l’incarcération dans les prisons. Cependant, en Turquie, en particulier lorsqu’il s’agit de prisonnier·ère·s politiques, l’application du « Droit pénal ennemi » signifie que les Droits Humains ne sont pas respectés.
Parallèlement à la transformation du Gouvernement de l’AKP (“Adalet ve Kalkınma Partisi” : Parti Justice et Développement) au Pouvoir depuis 20 ans au moyen d’une dictature totale en Turquie, chaque dissident·e risque d’être arrêté·e et donc privé·e de liberté. La Turquie est en tête de liste des statistiques pénales annuelles du Conseil de l’Europe pour 2020 avec le taux de population carcérale le plus élevé (357,2 pour 100.000 habitant·e·s). Le nombre actuel de personnes dans les prisons est de 300.000. En plus d’être illégale, la détention des prisonnier·ère·s politiques se transforme en torture complète avec des pratiques arbitraires dans les prisons.
Cela fait longtemps que les corps des prisonnier·ère·s défunts continuent d’être transportés hors des prisons des provinces de Turquie et du Kurdistan. Selon les organisations de défense des Droits Humains, il y a actuellement 2.000 prisonnier·ère·s malades, dont 600 dans un état grave. Parmi les femmes détenues, 110 sont malades dont 66 dans un état grave. De plus, ces données sont issues de sources très limitées depuis que les organisations de défense des Droits Humains n’y ont pas accès pour pouvoir évaluer la situation actuelle des prisonnières. Par conséquent, on estime que le nombre réel est beaucoup plus élevé.
Les préoccupations immédiates concernant la violation des Droits liés à la santé dans les prisons sont les suivantes :
- Chambres/salles surpeuplées, non chauffées et non ventilées.
- Longs délais d’acheminement des prisonnier·ère·s vers les infirmeries, absence de médecin dans les infirmeries, traitement des maladies avec des médicaments qui soulagent les symptômes plutôt qu’avec des médicaments qui pourraient offrir une éventuelle guérison de la maladie. Ces circonstances entraînent des retards de diagnostics ou des maladies graves non diagnostiquées.
- Obliger les prisonnier·ère·s à attendre pendant des mois les transferts nécessaires à l’hôpital ou refuser catégoriquement toute visite à l’hôpital.
- Retenue de médicaments/drogues sur ordonnance
- Effectuer des fouilles à nu dans les centres hospitaliers de référence et annuler tout transfert pour celles et ceux qui résistent.
- Isoler les prisonnier·ère·s qui risquent de faire des crises et/ou qui ne sont pas en mesure de subvenir à leurs propres besoins et les maintenir dans des cellules d’isolement.
- Problèmes d’accès à l’eau potable.
Cette liste s’allonge encore. Les femmes malades et les prisonnier·ère·s LGBTI+ vivent tous ces problèmes de façon encore plus sévère en raison d’attitudes et de pratiques sexistes. Par exemple, les femmes malades et les LGBTI+ qui s’opposent à la fouille à nu sont victimes de torture et de harcèlement sexuel. Lorsque des femmes et des personnes LGBTI+ qui attendent depuis des mois d’aller à l’hôpital s’opposent à la fouille à nu et à d’autres agressions arbitraires lors du transfert à l’hôpital, celui est annulé : alors, atteindre l’hôpital lui-même se transforme en torture. Ainsi, tout le processus d’accès à la santé et au transfert à l’hôpital équivaut lui-même à des actes de torture.
De plus, lors des transferts hospitaliers et y compris durant les examens, des gardes masculins sont désignés pour accompagner les femmes et les LGBTI+. Bien qu’il y ait une pièce séparée pour les prisonniers de sexe masculin qui doivent être gardés avant le transfert de l’hôpital à la prison, les détenues malades sont obligées d’attendre dans les véhicules de transport de la prison pendant des heures. De cette façon, le transfert entre la prison et l’hôpital se transforme lui aussi en torture. Les prisonnier·ère·s transgenres en cours de transition de genre ne sont pas en mesure de franchir complètement les étapes de leur transition, en raison de difficultés d’orientation vers les hôpitaux et n’ont pas accès aux médicaments hormonaux pour des raisons arbitraires.
De plus, l’Institut de Médecine Légale (ATK) est devenu un deuxième outil de punition du Gouvernement actuel de l’AKP/MHP, en particulier pour les prisonnier·ère·s politiques. La partie de la Loi sur l’exécution des peines relative aux prisonnier·ère·s malades, promulguée en 2013, a été amendée pour inclure une disposition comportant un volet “sécurité publique”.
« La peine d’un détenu qui ne peut entretenir seul sa vie dans des conditions carcérales en raison d’une maladie grave ou d’un handicap et n’est pas considéré comme présentant un danger pour la sécurité publique peut être reportée jusqu’à ce qu’il soit guéri selon la procédure prévue à l’alinéa 3 ». Ce changement a donné aux autorités le levier « danger pour la sécurité publique » en vue d’empêcher la libération des prisonnier·ère·s malades. Une seconde réglementation malheureuse a été la détermination de l’ATK comme seule autorité compétente pour la libération des prisonnier·ère·s malades. Des centaines de prisonnier·ère·s qui avaient reçu un rapport d’un hôpital recommandant leur libération de prison n’ont pas été libéré·e·s parce que l’ATK n’a pas accepté les rapports de l’hôpital.Par conséquent, nos revendications prioritaires sont les suivantes :
- Toutes les femmes détenues et LGBTI+ qui sont actuellement en phase terminale de maladie, qui sont gravement malades et ont besoin d’un traitement, doivent être immédiatement libéré·e·s de prison avec un transfert dans un hôpital entièrement équipé.
- Leur traitement doit se poursuivre avec leur famille à leurs côtés et les dépenses de santé doivent être prises en charge par l’État.
- L’Institut de Médecine Légale devrait se voir retirer la position d’être la dernière et/ou l’unique autorité dans les décisions concernant l’ajournement de l’exécution des peines pour raisons de santé.
- Le pouvoir discrétionnaire des procureurs et des agents des Forces de l’Ordre devrait être aboli dans les décisions liées à la santé de reporter l’exécution des peines, et les rapports remis par des hôpitaux entièrement équipés devraient être considérés comme déterminants pour prendre des décisions de libération.
- Le critère de la Loi concernant le niveau de « danger pour la sécurité publique » d’un·e prisonnier·ère malade empêche le retard de l’exécution des peines pour de nombreux prisonnier·ère·s malades et devrait être supprimé de la Loi.
Nous exigeons la liberté des prisonnier·ère·s LGBTI+ et des otages politiques malades maintenant !Liberté pour prisonnières politiques et LGBTI+ malades
Contact : liberteprisonnier(a)gmail.com
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