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C’est en effet début octo­bre 2014 que le mag­a­zine Kedis­tan fut créé. Son nom intrigua, fâcha même par­fois, du fait de l’analo­gie volon­taire avec Kur­dis­tan, ou agaça par son ton, que l’on a jamais voulu jar­gonnant ou trop sérieux.

Traiter de l’ac­tu­al­ité d’une par­tie du Moyen-Ori­ent, ensanglan­tée par les guer­res, n’oblige pas à ressem­bler à une porte de prison. Il y en a assez comme cela dans la région, et tou.te.s nos ami.es kur­des et de Turquie en savent quelque chose.

Ha, voilà encore quelque chose qui clive : notre par­ti-pris de l’écri­t­ure “inclu­sive”. Nous n’en abu­sons pas, nos lecteurs et lec­tri­ces le savent, mais  nos auteurs/trices l’u­tilisent au mieux, pour rap­pel­er tou­jours notre volon­té de soutenir tous les com­bats fémin­istes et LGBTIQ+.

Parce que oui, le mag­a­zine Kedis­tan et celles et ceux qui y pren­nent parole, de façon per­ma­nente ou occa­sion­nelle, voire du fait de tra­duc­tions d’ar­ti­cles qui ont par­ti­c­ulière­ment attirés notre atten­tion, ne sont pas du genre “neu­tral­ité objec­tive”. Nous avons un point de vue, voire des points de vue, et nous tenons à les exprimer. Cela s’ap­pelle ailleurs “une ligne édi­to­ri­ale” et n’est générale­ment pas assumé comme tel dans les médias main­stream. Au Kedis­tan, si ! Et par ces matins bruns, en France par exem­ple, il suf­fit de voir les Unes de presse pour que cette hypocrisie tombe.

Quelques rap­pels…

Notre analyse de la Turquie ne se fait pas au tra­vers du prisme kémal­iste par exem­ple, pas davan­tage qu’elle serait “ori­en­tal­iste” et don­nerait la part belle aux nos­tal­gies impéri­al­istes néo-colo­niales sévis­sant pour le Moyen-Orient.

Notre sou­tien au mou­ve­ment kurde a tout autant pour ligne rouge la fron­tière entre reven­di­ca­tions d’au­tonomie et nation­al­isme, et nous nous réjouis­sons de toutes les avancées que mon­trent le Roja­va, au con­traire du Kur­dis­tan irakien.

Nous ne pub­lierons ou ne relaierons jamais d’in­for­ma­tions factuelles seule­ment parce que choquante ou sus­ci­tant l’indig­na­tion. Nous n’avons pas de pré­ten­tion à être le Paris Match kurde ou turc, pour attir­er le cha­land, que ce soit sur le mag­a­zine ou sur les réseaux soci­aux. Ce qui compte pour nous, c’est qu’une lec­trice ou un lecteur quitte un arti­cle avec le sen­ti­ment d’avoir com­pris, ou appris quelque chose, eu une réponse à une ques­tion, ou ait pris du plaisir à lire, et non pas qu’il/elle en sorte sim­ple­ment “furibard.e” et indigné.e.

En par­courant la page d’ac­cueil du site, vous voyez d’un coup d’oeil nos cen­tres d’in­térêts, y com­pris celui de l’é­colo­gie poli­tique.

Lorsque Kedis­tan a pub­lié ses pre­miers arti­cles, il y a sept ans, peu de médias s’in­téres­saient à la Turquie autrement qu’à tra­vers la ques­tion “est-elle européenne ?”. Bien que de nombreux.ses chercheur.es et historien.nes aient tra­vail­lé à démon­tr­er que la présen­ta­tion de la Turquie par les médias occi­den­taux était faussée par le “roman nation­al” qui y a cours depuis un siè­cle, et que la “turcité” rel­e­vait d’un nation­al­isme tox­ique, tous les médias européens con­tin­u­aient à émet­tre pour­tant l’idée d’une Turquie ou une syn­thèse “tur­co islamique” avait détrôné une “république laïque”. Là encore, chaque observateur/trice, tirait ces analy­ses vers des débats ayant cours dans leurs arènes poli­tiques nationales. Quand ce n’est pas l’ex­trême droite, qui au tra­vers du per­son­nage Erdoğan, souf­fle la haine des musul­mans, le racisme et la xéno­pho­bie. Il y a donc eu une prime à la nou­veauté fin 2014 et en 2015 pour Kedis­tan.

En 2015, le régime en Turquie rompait uni­latérale­ment les négo­ci­a­tions de paix avec le mou­ve­ment kurde. Cela fai­sait suite à l’ irrup­tion kurde très mar­quée sur le champ élec­toral en 2014, notam­ment aux élec­tions locales. Le Nord syrien voy­ait la pre­mière vic­toire des forces kur­des, dont des com­bat­tantes femmes en nom­bre, être enreg­istrée con­tre Daech à Kobanê. Il était logique dans ces con­di­tions, que les reven­di­ca­tions d’au­tonomie kurde soient mis­es en avant, et revendiquées locale­ment au Kur­dis­tan. Cette année 2015 fut pour Kedis­tan une année de suivi de sit­u­a­tion de tous les instants, qui tis­sa alors des liens, tou­jours act­ifs aujour­d’hui. Notre rela­tion forte avec la jour­nal­iste et artiste kurde Zehra Doğan, qui se trans­for­ma en ami­tié, puis cam­pagne de sou­tien pour obtenir sa libéra­tion, et tra­vail en col­lab­o­ra­tion aujour­d’hui, date de ces années. C’est en 2016 que Kedis­tan a four­nit une logis­tique pour une cam­pagne pour sa libéra­tion et le refus d’une con­damna­tion à per­pé­tu­ité à l’autrice Aslı Erdoğan. Nous entretenons égale­ment avec elle, des liens très proches aujour­d’hui, main­tenant que les phalènes, tou­jours avides de notoriété, ont cessé de la pren­dre pour un lam­padaire. Et ses ennuis judi­ci­aires sont loin d’être clos, alors qu’elle est exilée.

En 2019, Kedis­tan offrait aus­si son aide logis­tique à une nou­velle cam­pagne de sou­tien pour Nûdem Durak, chanteuse kurde, empris­on­née en 2015, et con­damnée à 19 années de prison pour son engage­ment artis­tique. Zehra Doğan fut d’ailleurs un temps une de ses com­pagnes de geôle à Mardin. Le col­lec­tif créé, bien en dehors de nous, à l’ini­tia­tive de per­son­nal­ités nom­breuses, pour­suit son action, sans tenir compte de l’avis de certain.es, qui con­sid­èrent que met­tre ain­si des “noms” en avant est une mau­vaise pra­tique, et qu’il s’a­gi­rait d’un sou­tien “extérieur” orientaliste…

Nous nous sommes tou­jours senti.e.s utiles, sur ces trois cam­pagnes de sou­tien entre autres, ne nous con­tentant pas de dénon­ci­a­tions, mais venant con­crète­ment en aide aux per­son­nes, en sou­tien direct aux familles aus­si, par­tant du principe qu’un.e prisonnièr.e dont on ne cesse de par­ler acquiers ain­si une forme de “pro­tec­tion”, d’ailleurs non démen­tie. Les occa­sions de vous join­dre à ces sou­tiens ne man­quent pas. Voir en page d’accueil.

C’est ain­si que s’est con­solidé le réseau de Kedis­tan, au fil de 7 années, et que son équipe a changé, s’est diver­si­fiée, sans que le petit noy­au dur ne démente ses engage­ments du début.

Le Moyen-Ori­ent, la Syrie et la Turquie en par­ti­c­uli­er, la dite “crise des migrants”, a fait s’in­téress­er les médias main­stream de plus près à ces guer­res, et d’autres sites dédiés sont nés, nom­breux, entre 2016 et 2019. L’au­di­ence édi­to­ri­ale du mag­a­zine Kedis­tan s’est donc sta­bil­isée, certes à un niveau très sat­is­faisant pour nous, mais pour deux tiers de ce qu’elle fut entre 2014 et 2017, pas­sant de 1 mil­lion 200 mille vis­i­teurs annuels à 750 000 en 2020.

Pour 2021, la ten­dance nous mèn­era à un peu moins de 500 000, avec une forte part anglo­phone, et des lecteurs et lec­tri­ces en Turquie qui sont restés stables.

Alors, fêter nos 7 ans avec une audi­ence dimin­uée par deux au fil des ans, est-ce bien raisonnable ?

Nous sommes con­scients que la lec­ture fran­coph­o­ne d’ar­ti­cles a beau­coup dimin­ué au prof­it d’un zap­ping per­ma­nent sur les réseaux soci­aux, et qu’en France même, l’in­térêt poli­tique se focalise sur la sit­u­a­tion intérieure, accom­pa­g­nant en cela le désor­mais sou­verain­isme de la gauche. Et pour­tant, les analy­ses sur les mon­des du Moyen-Ori­ent, ses expéri­ences poli­tiques comme celle pos­i­tive du Roja­va, où les évo­lu­tions néga­tives du nation­al­isme big­ot en Turquie, sont tou­jours là pour illus­tr­er où con­duisent toutes les dérives poli­tiques nation­al­istes. Plus que jamais donc, le A du Kedis­tan prend son sens, même s’il se trou­ve déplaire un temps dans les sor­dides turpi­tudes élec­toral­istes françaises.

Nous avons volon­taire­ment, suiv­ant en cela les con­seils d’ami.e.s, ralen­ti le rythme des pub­li­ca­tions. Même si nous ne com­men­tons pas tel ou tel événe­ment sur Kedis­tan, le monde con­tin­uera de tourn­er. Et, s’il y a moins quo­ti­di­en­nement de “nou­veautés”, cela n’empêche pas la durée moyenne de lec­ture d’aug­menter par vis­i­teur, qui est autour de 6 min­utes aujour­d’hui. Moins, mais mieux, pour lut­ter con­tre le zap­ping per­ma­nent autour des buzz du moment.

Nous entretenons “l’outil Kedis­tan” autant que ses archives, et nous pen­sons mod­i­fi­er quelque peu sa présen­ta­tion début 2022. Nous tenons farouche­ment à sa gra­tu­ité totale, son absence de liens pub­lic­i­taires, et au con­fort de con­sul­ta­tion des lec­tri­ces et lecteurs, même si cela a un coût financier, jusque là cou­vert par les con­tri­bu­tions, et humain (toutes les autri­ces et auteurs sont tou­jours bénévoles).

Un grand mer­ci à toutes et tous qui nous lisez, de votre con­fi­ance, comme à toutes les autri­ces et tous les auteurs, per­ma­nents ou invités, avec qui nous parta­geons ces voeux que Kedis­tan fran­chisse une année de plus.

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Alors un grand MIAOU et une bougie de plus dans le bol de croquettes.

 

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