Je suis trop âgée pour porter des chaussures de courses américaines, aussi n’ai-je pas les boîtes qui correspondent dans mon placard en Turquie.
Pourquoi je vous parle de boîtes à chaussures ?…
C’est de l’histoire ancienne, mais un procès qui s’ouvre aux US devrait d’un coup vous rafraichir la mémoire.
Fin d’année 2013. Un certain Zarrab, parmi d’autres, est arrêté et détenu dans le cadre d’une enquête de corruption généralisée. Pour lui, il est question de trafic d’or avec l’Iran, dans une période où l’embargo international s’applique pour tout le monde. Ce trafic de pépites aurait été facilité par des ministres et l’entourage de notre bon président.
C’est l’époque des dernières enquêtes de juges qui vont très vite être virés et remplacés, purgés, et qui aujourd’hui sont toujours considérés comme étant liés à Fetullah Gülen, qui réglait ses comptes de loin avec Erdoğan, sur des partages, des rivalités financières et politiques.
On trouva à ce moment là des boîtes à chaussures sans chaussures, mais pleines de billets, traînant ici et là chez des amis et proches du pouvoir. Le coup passa bien près, puisque des enregistrements entre fiston et papa Erdoğan, au sujet de monnaie à déménager furent même diffusés. Bref, on aurait bien rigolé, si cela n’avait pas ouvert la guerre entre Gülen et Erdoğan, jusqu’à aboutir au défilé de chars et d’avions manqué de juillet 2016.
Depuis, le robinet des purges est ouvert en grand, et la colombe de la paix s’est faite flinguer. Nos amis Kurdes s’y sont retrouvés en première ligne.
Et bien voilà Zarrab devant une cour américaine cette fois, arrêté là-bas depuis 2016. A trente quatre ans, il est devenu un marchand d’or incontournable, mais pas franchement recommandable. Et il paraîtrait qu’il a plein de choses à raconter, au point que des déclarations de nos ministres en Turquie n’en finissent pas.
Il paraît, selon eux, que le Procureur américain serait aussi payé par Gülen, pour salir la Turquie.
Le procureur en question a répondu en disant (on tweete beaucoup aux US) : “Le ministre turc des Affaires étrangères est un menteur. Attendons de voir ce qui se passe au tribunal”.
“Comme leur piège a échoué grâce à la prévoyance de notre peuple et puisque nous sommes restés debout, ils ont emmené leur complot et l’ont remonté en Amérique”, a clamé de son côté Erdoğan, mardi dernier, devant les ravis de l’AKP.
Plein de mots doux qui s’échangent au début de l’hiver, ça devrait attendrir le climat.
Bref, vous allez comme moi trouver tout ça dans vos gazettes préférées, et j’aurais ma préférence pour l’article de Nicolas Cheviron et Mathieu Magnaudex dans votre Médiapart français. Ils sont bien plus renseignés que moi m’a-t-on dit, et surtout plus sérieux. De vrais journalistes quoi ! Et j’ai l’impression qu’il n’y a pas que les histoires de contenus des boîtes à chaussures qui sont en cause.
Eclabousser Erdoğan au sortir du bain turc, alors qu’il se croyait à nouveau au sec, va certainement servir à parler aussi, de la grande pataugeoire de l’Irak et de la Syrie, et de comment reléguer Erdoğan dans ses prétentions.
J’en connais ici, qui aiment bien les élections, qui vont aussi se frotter les mains.
Alors, si Monsieur Zarrab, ouvre en grand sa boîte, le cirage ne suffira plus.
Mauvais pour les affaires tout ça.
La livre turque va encore jouer du yoyo.
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English: Turkey • An Iranian nugget in Erdoğan’s shoe Click to read