Pınar Selek, sociologue, auteure, féministe, anti-violence et objectrice de conscience, est fort heureusement en exil en France.
Pınar avait été arrêtée le 11 juillet 1998, suite à une enquête concernant ses recherches sociologiques sur “l’histoire orale des militantEs kurdes”, intégrant des entretiens auprès de la diaspora politique kurde au Kurdistan, en Allemagne et en France. La police lui avait demandé de donner les noms des personnes avec lesquelles elle s’était entretenue. Sous la torture, elle refusa de les livrer à la police.
Elle avait alors été accusée d’avoir “commis un attentat” le 9 juillet 1998, au Marché des épices à Istanbul, faisant 7 morts et 121 blessés. Une accusation d’une absurdité totale pour une scientifique, pacifiste et antimilitariste, refusant tout acte de violence…
Malgré le fait que cette catastrophe soit dûe à une explosion de bouteilles de gaz, cause révélée, rejetant de fait la thèse d’un “attentat”, et que Pınar ait été libérée faute de preuves suffisantes fin 2000, après avoir fait deux ans et demi de prison, la Justice s’est entêtée dans ce “montage” mal ficelé, créant ainsi un des procès des plus emblématique ciblant ces dernières années les intellectuellEs en Turquie.
Cette Justice aux ordres du régime n’en démord pas et revient à la charge régulièrement. Et nous voilà de nouveau devant le cas de Pınar.
Rien d’étonnant pourtant que l’acharnement kafkaïen dont elle est la cible, revienne à son tour dans l’actualité…
Les purges continuent et sont exponentielles. Femmes et hommes, avocats, activistes, intellectuellEs, universitaires, artistes, quidam, féministes, cinéastes, journalistes, éluEs, politiques, LGBTI, auteurEs, se trouvent poursuiviEs, emprisonnéEs… Pour les quelLEs d’ailleurs, il est plus qu’urgent de se mobiliser !
» Lisez aussi, lisez surtout, notre article “Un appel du 18 qui n’attendra pas juin”.
Chaque jour, avec l’ambition d’anéantir toute opposition, le régime turc, mobilisant des forces et des moyens jusqu’au grotesque, continue à mener un “génocide politique” et à remplir ses geôles d’ ”otages”. Et pour ce faire, il utilise tout les moyens d’un Etat de non Droit, un large éventail ; de la Justice confisquée à la Police zélée. Sous état d’urgence, décret par décret, il opprime, menace, licencie, emprisonne, détruit la vie des dizaines de milliers de personnes et de leur famille. Sous prétexte de “mobilisation générale”, il plonge les populations divisées, incitées à la haine, dans la peur et la méfiance, et les invite à “agir” en toute impunité, encourageant les moyens violents, la délation du voisin, jusqu’au lynchage médiatique ou sur les réseaux sociaux, quand ce n’est pas dans la rue, à coup de coup de pieds ou de bâton parfois… Et même si certainEs, pourtant peu partisans de ce régime, parviennent encore sur place à regarder ailleurs et vaquer à leurs “affaires” comme si de rien n’était, vivant comme des “touristes” apolitiques dans leur propre pays, cette réalité est pourtant là, même si elle semble diluée à l’Ouest dans la mégalopole turque.
Non donc, rien d’étonnant à ce que Pınar revienne à son tour dans l’actualité…
Une peine de prison à vie avait encore été demandée à son encontre, le 19 décembre 2014. Pınar avait été acquittée une quatrième fois. Quatrième fois ! Suite à cette décision, le Procureur a fait de nouveau appel.
Le 25 Janvier 2017 dernier, le procureur de la Cour de Cassation publie son réquisitoire : il demande à nouveau une condamnation à perpétuité. Et Pınar répond :
” Ils n’auront pas mon sourire et mon énergie ! ”
Kedistan est solidaire avec Pınar, avec tout le respect porté à son travail, à ses idées, à la personne qu’elle est : féministe, pacifiste, idéaliste, et avec toute l’affection et l’amitié que nous ressentons envers la femme que nous connaissons, chaleureuse, optimiste et battante.
Non ! Personne ne peut lui confisquer son sourire, son énergie !
Appel du Comité Justice-Pınar
Depuis 1998, Pınar Selek est soumise à un procès kafkaïen mais elle résiste.
En 2014 elle a été acquittée pour la quatrième fois mais le procureur a fait appel une fois de plus.
Depuis, l’affaire Pınar Selek était renvoyée dans les méandres de la justice.
Le 25 janvier 2017, après une attente infinie, le procureur de la Cour de Cassation a donné son avis : il demande une condamnation à perpétuité.
Cour d’assise, Cour pénale, Cour de cassation, la procédure qui dure depuis 19 ans est si complexe qu’elle fait tourner la tête.L’enjeu pour Pınar Selek, ses proches et ses soutiens est de garder l’équilibre malgré ce procès infâme.
Lorsque l’on se penche sur la chronologie de ce procès, on comprend l’ampleur de l’acharnement.
Et pour ne pas se laisser ensevelir on construit des stratégies de résistance.
Et pour cela nous devons être nombreuses et nombreux.Pınar Selek est le symbole d’une Turquie résistante malgré la répression, qui doit pouvoir continuer à penser, à créer, à s’organiser, à lutter.
Tous les liens que Pınar Selek a tissé ici et ailleurs, sont une force collective, cette force peut agir maintenant : empêcher sa condamnation, faire connaître ses écrits, ses idées, résister à ses côtés, ouvrir des portes et des chemins qui la protègeront et lui donneront l’énergie de continuer.
Il y a beaucoup à faire, chacun‑e trouvera sa façon de faire.Pınar Selek n’est pas seule !
Des collectifs de solidarité existent à Strasbourg, Lyon, Paris, Nice et voici le dernier communiqué du collectif de solidarité en Turquie et une chronologie résumant les grandes dates du procès.
11 Juillet 1998 : Arrestation suite à une recherche sur des militants kurdes. Torture.
20 Août 1998 : Pınar Selek apprend en prison qu’elle est accusée d’un attentat (on saura plus tard que c’est une explosion accidentelle qui a été maquillée en attentat dans le but de l’accuser.)
22 décembre 2000 : Libération (elle est libérée faute de preuves mais le procès continue)
8 juin 2006 : Premier acquittement (toujours faute de preuves). Mais le procureur fait appel.
17 Avril 2007 : La cour de Cassation va dans le sens du procureur et casse l’acquittement.
23 Mai 2008 : Deuxième acquittement (aucun fondement dans les charges retenues contre elle). Mais le procureur fait appel.
2009 : La Cour de Cassation va dans le sens du procureur, casse l’acquittement et décide de condamner Pınar Selek. L’affaire est renvoyée devant une nouvelle Cour d’Assises.
9 Février 2011 : Troisième acquittement. (La Cour ne retient toujours aucune charge contre Pınar Selek. Dès le lendemain, le procureur fait appel.
22 Novembre 2012 : La Cour annule son propre acquittement (du jamais vu dans l’histoire mondiale du droit !)
24 Janvier 2013 : La Cour condamne Pınar Selek à la prison à perpétuité.
11 Juin 2014 : Annulation de la condamnation (obtenue suite à un appel des avocats dénonçant les illégalités de cette procédure)
19 Décembre 2014 : Quatrième acquittement. Mais le procureur fait appel.
Mercredi 25 Janvier 2017 : Le procureur de la Cour de Cassation publie son réquisitoire : il demande une condamnation à perpétuité.
Jeudi 26 Janvier 2017 : Pınar Selek répond : ” Ils n’auront pas mon sourire et mon énergie ! ”
Vendredi 27 janvier 2017 : Nous résistons !
Justice Pınar
solidaritepinarselek.france@gmail.com
Appel de Yasemin Öz, avocate, porte-parole internationale du Comité Justice pour Pınar Selek
La torture, incessante
Affaire Pınar Selek : Le Procureur général de la Cour suprême a encore une fois réclamé l’annulation de la quatrième décision d’acquittement de Pınar Selek.
Nous sommes vraiment désolés de vous annoncer que, 19 ans après le début du procès de Pınar Selek, le harcèlement judiciaire continue, dans la plus pure illégalité. Ce procès est une torture, nous ne pouvons le qualifier autrement.
Pınar Selek a été acquittée à quatre reprises, et en ce mois de janvier 2017, le Procureur général de la Cour suprême réclame à nouveau l’annulation de la quatrième décision d’acquittement.Inutile de dire qu’il n’y a aucune trace de nouvelles preuves, aucun nouvel élément dans cette affaire. Les conspirations au plus haut niveau de l’Etat ont repris, et c’est une honte puisque au cours de ces années elles se sont avérées totalement infondées.
Vous vous en souvenez peut-être, le 19 décembre 2014 la 15e chambre du Tribunal pénal supérieur d’Istanbul a, pour la quatrième fois, acquitté Pınar Selek de tous les chefs d’accusation portés contre elle. Quelques jours après seulement, le procureur a interjeté appel de ce quatrième acquittement et le dossier a été de nouveau envoyé à la Cour suprême pour qu’elle l’examine.Aujourd’hui, le Procureur général de la Cour suprême demande à son tour l’annulation de l’acquittement et il revient à la 16e Chambre criminelle de la Cour suprême de se prononcer sur cet appel.
Cette nouvelle étape montre avec quelle détermination les structures qui agissent dans l’ombre au sein de l’appareil d’État prennent Pınar Selek pour cible : le but est clairement de salir la réputation de l’antimilitariste convaincue, de la sociologue, de la féministe et de l’écrivain. Au fil du temps ce procès politique s’est transformé en instrument de vengeance contre les opposant·es qui osent critiquer le statu quo fondé sur la violence et la répression.
Nous sommes très inquiets de la tournure dangereuse que prend ce procès, en particulier compte tenu du climat politique extrêmement tendu qui s’instaure en Turquie.Votre soutien, votre intérêt pour le déroulement de cette affaire est primordial et nous vous en remercions. Faites part autant que possible de vos interrogations et de vos craintes aux autorités turques. Ce soi-disant procès, il faut le redire, est source d’un véritable traumatisme psychologique pour Pınar Selek, pour les membres de sa famille, qui sont aussi ses avocats, pour ses amis et ses partisans, tant en Turquie que partout dans le monde.
Toutes vos contributions peuvent nous aider à obtenir la justice à laquelle nous aspirons depuis longtemps. Nous ne voulons que la justice et nous nous nous battons pour qu’elle soit rendue, maintenant plus que jamais.Solidairement,
Yasemin Öz
Avocate — Porte-parole internationale du Comité Justice pour Pınar Selek
Et n’oubliez pas de signer la pétition lancée par son éditeur. C’est par ICI
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