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Sale temps pour la lib­erté de la presse au Kur­dis­tan irakien… Trois jour­nal­istes, Sher­wan Sher­wani, Ayaz Karam, Gohdar Zebari et deux activistes, Shiv­an Saeed, un religieux mem­bre du par­ti poli­tique “Coali­tion pour la démoc­ra­tie et la jus­tice”, et Hari­wan Issa, un ath­lète sans affil­i­a­tion con­nue mais qui a par­ticipé à dif­férents rassem­ble­ments, ont été con­damnés par un tri­bunal judi­ci­aire d’Er­bil à 6 ans de prison pour avoir “désta­bil­isé la sécu­rité du pays”.

Les cinq avaient été arrêtés en octo­bre 2020. Tous con­nus pour être cri­tiques du PDK, le par­ti du clan Barzani. Les jour­nal­istes, en par­ti­c­uli­er, pour leurs enquêtes sur les vio­la­tions des droits de l’Homme com­mis­es par leurs affidés – assas­si­nats d’op­posants, tabas­sages, intim­i­da­tions – ou encore sur les ques­tions de cor­rup­tion. Le CPJ (Comité pour la pro­tec­tion des jour­nal­istes) a, par exem­ple, déjà dénon­cé par le passé les intim­i­da­tions dont a été vic­time G. Zebari, arrêté à plusieurs reprises.

La prox­im­ité du clan Barzani avec Erdoğan se retrou­ve désor­mais dans les méth­odes pra­tiquées pour faire taire les voix dis­si­dentes. Lors son pas­sage devant la cour, d’après des témoins, Sher­wan Sher­wani a crié au juge : “Votre Hon­neur, j’ai été tor­turé. Ils m’ont bat­tu. Ils ont men­acé de vio­l­er ma femme. Qu’est-ce que vous auriez fait si cela vous était arrivé ? Qu’est-ce que n’im­porte lequel d’en­tre vous aurait-il  fait ?”

Un autre, Ayaz Karam, qui a tra­vail­lé par le passé comme jour­nal­iste, mais était sans emploi au moment de son arresta­tion, est accusé d’avoir reçu de l’ar­gent de pou­voirs étrangers pour désta­bilis­er le Kur­dis­tan. En tout et pour tout : 200$ envoyés par un proche rési­dant à l’é­tranger, et 10$ de crédit de télé­phone offerts par un ami…

Sher­wan Sher­wani, Ayaz Karam, Gohdar Zebari, Shiv­an Saeed, Hari­wan Issa

Les avo­cats n’ont pas eu accès aux pièces du procès, et n’ont pas pu voir leurs clients avant celui-ci, en vio­la­tion de toutes les con­ven­tions sur les droits humains. Les dossiers de l’ac­cu­sa­tion étaient bien mai­gres : quelques mes­sages tirés de con­ver­sa­tions What­sApp ou Mes­sen­ger. On accuse l’un d’es­pi­onnage parce qu’il a sur son télé­phone une pho­to de l’in­térieur des locaux de l’U­nion Islamique du Kurdistan…(photo qui illus­tre un arti­cle qu’il a écrit sur le sujet)…

Pour dénon­cer ce procès kafkaïen con­tre les jour­nal­istes et autres opposants,  plusieurs man­i­fes­ta­tions ont eu lieu dans les villes qui ne sont pas sous la coupe des Barzani. On attend main­tenant les réac­tions des pro­mo­teurs du Gou­verne­ment région­al du Kur­dis­tan (KRG), des his­to­riens, jour­nal­istes, édi­to­ri­al­istes, ou autres respon­s­ables de l’in­sti­tut kurde de Paris par exem­ple, qui ne cessent d’en van­ter le car­ac­tère démocratique…

En atten­dant, alors que la prop­a­ga­tion du Covid s’in­ten­si­fie, la majorité de la pop­u­la­tion souf­fre d’une crise économique aggravée par la cor­rup­tion et doit main­tenant affron­ter l’au­tori­tarisme erdo­ganesque du clan Barzani, alors que dans les mon­tagnes, au Nord, il appuie les cam­pagnes mil­i­taires de l’é­tat turc con­tre le PKK.

Loez

Cet arti­cle a large­ment été écrit grâce au suivi sur Twit­ter de Ren­war Najm (@RenwarNajm) et Rebaz Majeed (@Rebaz_Majeed), Kur­dis­tan Watch (@KurdistanWatch).


Image à la Une : Sher­wan Sher­wani, Gohdar Zebari, Ayaz Karam.

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Loez
Pho­to-jour­nal­iste indépendant
Loez s’in­téresse depuis plusieurs années aux con­séquences des États-nations sur le peu­ple kurde, et aux luttes de celui-ci.