C’est sur les réseaux sociaux, en survolant des gueulantes mêlées aux rires que j’ai appris l’existence du “wushu”. Un sport qui vient de Chine paraît-il…
Le sport n’est pas trop ma tasse de thé et peut être vous non plus… Mais là, le sujet est au delà du “wushu”, et révèle des pratiques qui valent le détour… Là, c’est le wushu, mais en Turquie, (et pas que), les exemples du même type sont légion dans tous domaines.
Alors c’est quoi ce wushu ?
Le Wǔshù, avec sa traduction littérale “art martial”, est remis, sous l’appellation “wushu moderne”, au gout du jour. C’est à dire que des arts martiaux chinois traditionnels sont poussée dans le monde impitoyable de la compétition. Alors le wushu, pratiqué sous différentes disciplines avec ou sans armes, a aujourd’hui une fédération internationale (IWUF), des fédérations continentales et des fédérations nationales, toutes reconnues par le comité international olympique (CIO). Le premier championnat du monde de wushu a eu lieu à Pékin en 1991. À partir des années 2000, il s’étend sur les cinq continents. Des tournois pour adultes et enfants sont organisés et tous les deux ans un championnat du monde ont lieu.
Bon, pourquoi alors tout le monde parle de wushu ces jours-ci ?
Le wushu, pour sa fédération turque, est une vraie affaire de famille. Père vice-président, mère et fille sportives et arbitres, parfois les deux à la fois… Ces jours-ci la fédé occupe l’actualité, avec une révélation par le journal Birgün, d’un scandale sportif : Fatma Akyüz, la mère dans la famille wushu turc, entraineuse de l’équipe nationale, participe au championnat de Turquie de Taï Chi qui s’est déroulé les 21, 22 , 23 février 2020. Etant la seule sportive de la catégorie femme vétéran, elle est donc déclarée championne. Par ailleurs, dans le même championnat, elle fut également arbitre.
Pourtant, selon la réglementation, un sportif ou sportive, qui a rempli le rôle d’arbitre, ne peut participer aux tournois durant un an. En cas de non respect de cette règle il-elle est sanctionnéE. Donc elle/il ne peux encore moins remplir les deux rôles en même temps, ça va de soi !
Suite à la révélation de Birgün, la fédération a fait une déclaration : “Wushu est un sport familial. Pour le sport wushu kung fu, de nombreuses familles endossent les rôles de sportifs, entraineurs, arbitres et administrateurs et participent activement avec tous leur membres. Une de celles-ci est la famille Akyüz, celle d’Abdurrahman Akyüz qui est le premier sportif qui a représenté notre pays dans des championnats du monde. Avec ces sacrifices, dévouement et services exceptionnels et ses réussites, la famille Akyüz est une famille pionniere et exemplaire du wushu kung fu ainsi que pour le sport de Turquie et du monde.”
Je vois que notre fédé familiale ne figure pas dans les membres de la Fédération européenne de wushu (EWUF). En janvier l’adhésion de 8 pays dont la Turquie fut suspendue, pour “création d’une organisation de wushu conflictuelle”, sans doute une façon polie de dire “fédération pirate”…
Mais la famille wushu n’en est pas à son premier essai… Voilà ce que j’apprends. C’est majestueux !
Le vice président de la Fédération de Wushu de Turquie est Abdurrahman Akyüz. Sa fille Elif participe en juin au championnat de wushu de Turquie, mais là il y a un hic : elle est à la fois sportive et arbitre. Son père, a la tête de la fédération, sa mère dans la délégation d’arbitres, Elif n’a plus qu’à faire deux pirouettes pour devenir championne.
J’écris tout cela mais Elif a l’air de gazer dans son domaine. Pourquoi bon sang, mêler famille, administration, arbitrage pour porter de l’ombre sur ses médailles, surtout si elles sont réellement méritées. Enfin, le choix de priorités, c’est aussi une affaire de famille. Je me tais.
Lorsque ce sujet arrive dans l’actualité, non seulement aucune sanction n’a été donnée, mais en plus une déclaration de la fédération annonce que “le wushu est un sport familial” et en pointant ceux qui critiquent ces pratiques, ajoute ces précisions avec de grandes phrases agglutinées, que j’essaye de démêler pour vous :
“En Turquie et dans le monde, un groupe précis, organisé, produit des scénarios et fictions en assemblant mensonges, calomnies qu’ils considèrent comme leurs métiers. Nous les avons en face de nous, comme un secteur qui fonctionne avec ces habitudes et qui suit cette mode dans l’air du temps. Ces organisations sans scrupules, formant une pelote de profit, se sont transformées en conglomérat. Ces ignominieux aux casiers pour extorsions, rackets, chantages, détournements, et qui le plus grave encore, vendent leur pays, composent un gang mondial dans lequel différentes ailes politiques et sociales sont réunies par le mal.”
Tenez-vous bien : “Leur objectif est de renverser les pouvoir légitimement élus, en usant des méthodes illégales et des coups d’Etat, et fonder pour leur propre profit, leur propre empire, avec la complicité du sionisme mondial.”
Le président Mehmet Zeki Akıncı, précise qu’il rédige cette déclaration au nom de la fédé afin d’ouvrir les esprits, pour que la réalité soit vue. et continue : “Nous connaissons vos intentions et buts. Votre problème est le voile ! Nous avons fait d’une personne voilée une championne et le monde s’est mis en face de nous. Ils ne nous ont pas pris dans leurs compétitions. Mais nos filles, avec leur dignité au sujet de voile, et leur supériorité dans le sport qu’elles pratiquent, ont laissé tout ce monde bouche ouverte. Nos filles sont dignes du championnat de Turquie, du championnat du monde, et fierté de l’humanité.”
Comme ça, des progressistes de gauche, aux soutiens de Fetullah Gülen, en passant par l’aile à cheval sur la laïcité, jusqu’aux juifs, tout le monde est habillé.
Quand on gratte un peu, on découvre que l’organisation “familiale” du wushu turc remonte à loin. Il y a 7 ans déjà, ces affaires frauduleuses étaient remarquées et dénoncées par le média de gauche “soL gazetesi”. Le journal, paraissant à l’époque, comme quotidien papier, avait parlé dans ses pages, d’une allégation de pot-de-vin, concernant ma même famille. Et la famille Akyüz avait ouvert un procès contre le journal, demandant dommages et compensations.
De quoi parlaient les articles de soL gazete ?
Lors du 11ème championnat du monde de wushu, qui s’est déroulé le 10 octobre 2012 à Ankara, Elif Akyüz fut championne du monde, dans le discipliné “lance du nord”. Avec ce titre, Elif devenait également la première des sportifs européens atteignant la médaille d’or.
Mais, suite à cette victoire, il y a eu un hic : Ersin Metin Yavuz qui travaillait lors du championnat, dans “OTY Turizm” l’entreprise organisatrice. Il a envoyé une requête de plainte à la présidence du Conseil d’inspection du Ministère des sports turc expliquant, que Elif Akyüz avait obtenu sa médaille avec pot-de-vin : Abdurrahman Akyüz, président de la fédération à l’époque, aurait acheté la médaille de sa fifille moyennant 7 montres Rolex, et 14 mille dollars qui auraient fait le bonheur des arbitres et représentant des fédérations internationales présentes dans le championnat. Je vous offre le résumé, mais vous pouvez atteindre les détails en turc, dans l’article de soL gazete.
Le verdict ?
Le tribunal d’Ankara prononce un verdict intéressant. Il se base sur les quatre principes liés à la presse : la véracité, l’actualité, intérêt publique, l’engagement intellectuel entre sujet et expression. Il décide donc que l’information relayée par le quotidien soL gazetesi est véridique, qu’il concerne l’actualité et implique l’intérêt public, et que par conséquent il est légitime et ne mérite pas de condamnation. Le tribunal notifie également, qu’une enquête a été ouverte sur cette affaire, par le Conseil des inspection de la fédération, et il déclare qu’Abdurrahman Akyüz doit payer les frais du procès.
Les avocats de la famille font appel. La Cour suprême confirme la décision.
Comme soL gazete le souligne, 7 ans se sont écoulés, et l’homme n’a non seulement pas payé les frais laissés à sa charge, mais il a gardé ses responsabilités au sein de la fédération. Les frais d’un procès perdu étaient sans doute plus difficile à régler que de mettre la main à la poche pour sortir que 7 Rolex et 14 mille dollars pour une douteuse médaille. Quant à son rôle dans la fédération, il n’est plus président, officiellement et pour la forme, mais poursuit son chemin comme “vice président”.
Là, c’est wushu, mais les exemples de même type sont légion dans tous domaines, disais-je plus haut.