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4• Sous vos applaudissements
Et Jésus se retourna, et sur un ton courroucé, lança à Saint Thomas, qui n’avait pas suivi et était resté sceptique sur la rive du lac, un : “Thomas fais pas chier, fais comme tout le monde, marche sur les pierres !”.
Voilà, le miracle s’était accompli.
Pourquoi diable continuer cette partie de mikado en commençant par la fin d’une histoire même pas drôle ?
Juste parce qu’en ces temps de Covid19, se raccrocher aux branches, marcher sur les pierres, avoir confiance, rester unis et “croire” aux consignes, deviennent en politique des sourates ou des mantras.
Epargnons nous les gargarismes au vinaigre de framboise, les prières du soir, les culs levés en cadence, les tournicotons et les pains azym, tout autant que les cloches et les lapins en chocolat. Chacun gèrera ses peurs de la mort comme il veut. Mais sachons que sous le bruit des cloches, des prêches et des sermons, le cerveau est peu disponible.
Epargnons nous aussi les miracles qui poussent comme feuilles sur les branches, ou en pilules blanches qui ruissellent sur l’écran plat, les chloro et les sans, et ces annonces qui tombent à pic pour masquer la pénurie générée durant des décennies par “la main du marché”, en matière de santé humaine.
Tournons les yeux ailleurs. Ô pas longtemps. Lorsqu’on regarde les cartes du monde, et les projections de l’épidémie sur le continent africain, on se dit qu’ils auront beau chercher les pierres, comme d’autres qui vivent à la fois sous l’empire de la mondialisation et la corruption de leurs dirigeants, apprise à l’école de leurs anciens maîtres. Mais, ces Africains, ne sont-ils pas habitués ? Ne revivent-ils pas le cauchemar de Darwin à chaque épidémie ? Même si les cailloux vont manquer, entre Coran et missel, ils s’en remettront ! Ils ont bien supporté la colonisation ! Fermez la Méditerranée.
Et il est intéressant aussi de faire un saisissant rapprochement entre un départ d’infection à Mulhouse en France, et la façon dont la bonne parole évangélique s’est répandue ensuite dans le monde, sitôt après. Le Président d’une des plus grandes puissances mondiales, élu en grande partie par ses éluEs là, fut l’un de ceux, et le reste en partie, qui adopta la stratégie du déni jusqu’au bout face à un virus qu’il continue à qualifier de “chinois”. Son ami Bolsonaro ne le contredira pas. Ainsi voyage de par le monde ce passager clandestin biologique.
Jésus se tourna alors vers ses apôtres et leur dit : “Que votre coeur ne se trouble point. Croyez en Dieu, et croyez en moi. Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. Si cela n’était pas, je vous l’aurais dit. Je vais vous préparer une place.…” Nous irons tous au paradis.
Là nous ne sommes plus dans l’histoire drôle, mais dans l’après réanimation.
Bon, comme il est simple et facile de pourfendre les croyances, de “blasphémer”…
En est-il de même lorsqu’on s’attaque aux idéologies, et en premier lieu à celles que d’époques en époques, de siècles en guerres, de conquêtes en marchés, ont secrété et construit les propagandistes du capitalisme, comme dans l’antiquité les grands prêtres et les scribes embaumaient leurs dirigeants royaux ?
Là, les pierres deviennent béton. Et le ciel bas est lourd comme un couvercle.
Alors que le Covid19 révèle au grand jour l’extrême fragilité d’un système de rapports entre humains, aujourd’hui mondialisé et pourtant en concurrence permanente, ses inégalités, son incohérence, ses capacités destructrices, l’ordre est donné de regarder le doigt, et non la fissure. Et chacun devant son écran.
Rester unis derrière le doigt.
La courbe doit faire le gros dos, ne pas rester debout. Face à l’incurie, aux manques, au virus qui entre par tous les pores, on oppose et on impose à plus d’un tiers de l’humanité la distanciation sociale, le confinement, la réthorique de guerre, en suscitant pour donner le change ici et là des miracles d’applaudissements et de bougies aux fenêtres. Et si tu n’y crois pas, fais comme tout le monde, ne réfléchit surtout pas.
Et sous ce masque de comédie (les vrais se vendent au marché noir), on prépare le lendemain qui ne sera plus pareil. Celui où il faudra garder en mémoire que l’unité derrière les chefs a sauvé le monde, fut-elle ici ou là flanquée de policiers… Que seuls ceux qui n’ont pas sombré dans “l’anarchie” ont survécu. Et que si la guerre laisse découvrir quelques ruines économiques, après tout, la vie continue et vaudra bien quelques sacrifices supplémentaires . A la guerre comme à la guerre
Et si même, d’aventure, on parvenait à se redresser, la courbure passée, avant le voisin, le concurrent, nous aurions de sérieux atouts pour revenir sur le Marché. Et tans pis pour le climat, il s’est reposé, on peut bien par nécessité s’exonérer des désormais vieilles précautions et principes. Faudra redémarrer nom de Dieu ! La banque attend votre dévouement à la cause commune.
J’ai souvenir d’une strophe de Prévert, encore lui, issue de ce merveilleux texte “Crosse en l’air” qui donnait à peu près cela : “je vous mets à l’index, à l’index !! dit le Pape. Et l’Evêque de répondre : Haa il est bat, le pape ! Sais-tu où on l’met l’index, dans la rue de l’Echaudée ?”.
Je crains fort que demain, en guise de changement, à force de miracles, ce soit “Echaudée pour tout le monde !”
(à suivre)
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