Depuis qu’elle a subi un trans­fert for­cé avec 19 autres codétenues de la prison de Diyarbakır vers l’im­monde prison de Tar­sus, Zehra partage le même quarti­er que mère Sisê.

Il y a quelques mois, le jour­nal­iste Özgür Amed écrivait pour Kedis­tan, l’his­toire de la vie de cette femme âgée, actuelle­ment empris­on­née, mal­gré de nom­breux prob­lèmes de san­té. La mobil­i­sa­tion, aus­si bien via les médias, les réseaux soci­aux, ou les démarch­es admin­is­tra­tives, pour deman­der sa libéra­tion n’a rien don­né. Et voici cette déci­sion de la com­mis­sion médi­cale : “Elle fait sem­blant, elle restera en prison”.

Pour­tant, selon le rap­port de l’hôpi­tal de Mersin établi après des exa­m­ens durant 8 jours, début Novem­bre 2018, Mère Sisê ne recon­nait pas le jour, le mois et l’an­née dans lesquels elle se trou­ve, ne con­nait pas son âge, ne se sou­vient plus de ce qu’elle a mangé la veille, n’ar­rive pas à mémoris­er les noms de ses codétenues, ne fait pas la dif­férence entre le jour et la nuit… Elle souf­fre d’in­con­ti­nence et a des déficits mus­cu­laires. Suite à une toux, la biop­sie pra­tiquée par l’hôpi­tal a révélé des soupçons de can­cer de poumons. En résumé, en prenant en compte son âge, les mal­adies dont elle souf­fre et les déficits physiques et psy­chiques, le rap­port con­state une perte d’au­tonomie de 97%, et pré­cise que son main­tien en milieu car­céral la met en danger.

C’est ce rap­port qui a été envoyé à la “com­mis­sion médi­cale”, avec la requête pour la libéra­tion de Mère Sisê…

Selon cette com­mis­sion, qui est con­va­in­cue que Sisê Bingöl “fait sem­blant”, et qui l’a à peine aus­cultée le 7 jan­vi­er 2019, son état général est cor­rect, aucun prob­lème de mémoire n’est con­staté, sa res­pi­ra­tion et le fonc­tion­nement car­diaque sont nor­maux. Elle a quelques lim­ites pour bouger ses jambes et ses hanch­es, des douleurs mus­cu­laires, et une baisse de la vue.

Le rap­port final noti­fie que Sisê Bingöl ne par­lant pas turc, les con­trôles d’ori­en­ta­tion spa­tio-tem­porels n’ont pas été faits, mais qu’elle marche et s’ex­prime tout à fait nor­male­ment. Il a été con­staté qu’elle a des ver­tiges et des évanouisse­ments dus à l’hy­per­ten­sion, qu’elle utilise des servi­ettes, car elle est incon­ti­nente, et quelques acci­dents de défé­ca­tion ont été notés. A l’é­tude de périphériques neu­rologiques, aucune patholo­gie moteur n’est observée. Elle décrit la perte de mémoire, mais lorsqu’on la fait par­ler, on con­state un effort pour “faire sem­blant d’être en mau­vaise san­té”. A part les con­séquences de prob­lèmes dia­bé­tiques, aucun déficit neu­rologique n’est observé.

Mère Sisê restera donc en prison…

Zehra a dess­iné Mère Sisê plusieurs fois… Et elle nous envoie un mes­sage, avec un nou­veau dessin, tou­jours réal­isé dans les con­di­tions lim­itées de la prison. Elle des­sine les por­traits de Mère Sisê, et le bébé Der­sim, 2 ans, qui reste avec sa maman, condamnée…

Donc la plus âgée et la plus jeune des femmes avec lesquelles elle partage son quo­ti­di­en carcéral.

L’aboutisse­ment de la procé­dure de Mère Sisê auprès de la com­mis­sion médi­cale… Ils ont ren­du un rap­port pour qu’elle reste en prison. Son état de san­té est très mau­vais. Elle tou­sse sans cesse. La nuit, elle ne dort pas du tout. Sa ten­sion est trop haute et elle n’ar­rive pas manger. Notre let­tre qui expli­quait sa sit­u­a­tion a été con­fisquée. Il l’ont fait patien­ter sans arrêt et lui ont dit qu’elle allait être libérée. Main­tenant, ils dis­ent qu’elle peut rester en prison. Nous ne l’avons pas com­mu­niqué, pour qu’elle ne soit pas triste.”

Leyla Güven par Zehra Dogan

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Dans le même temps où Ley­la Güven, députée du HDP, en grève de la faim, vient de se voir enfin libérée de la prison d’Amed (Diyarbakır), et où près de 230 autres pris­on­nièrEs ont à leur tour adop­té cette forme de lutte, Zehra pour­suit dans les pires con­di­tions son tra­vail de jour­nal­iste en prison, et utilise son art pour ce faire.

Elle a côtoyé Ley­la Güven durant des mois à Diyarbakır et l’avait aus­si dess­inée, avant son trans­fert for­cé vers Tar­sus. Cela ne fait d’elle pour autant ni une crim­inelle, ni une terroriste.

 

Le jour­nal­isme et l’art du por­trait ne sont pas des crimes !

 

Pour soutenir Mère Sisê :

Sisi Bingöl 
Tar­sus Kadın Kapalı CİK C‑3
Ali­fakı mahalle­si, Ali­fakı sokak
Tar­sus – Mersin TURQUIE

 

mere sise bebe dersim par zehra dogan

 


Iniq­ui­tous report: “Moth­er Sisê is malin­ger­ing” Click to read

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