Plusieurs inscriptions signées par “Esadullah Team” (Esadullah : le lion d’Allah) ont été observées et photographiées à Sur (Diyarbakir) qui sort tout juste d’un couvre feu de 4 jours lors duquel 3 personnes dont une enfant de 12 ans ont perdu la vie.
Çağlar Demirel, député HDP, annonçait à l’agence d’information Dicle (DIHA) le 15 octobre que son parti allait poser une question à l’Assemblée Nationale, au Ministre d’Intérieur, au gouvernement provisoire AKP, et au Président.
- Qui est ce “Esadullah Team” ?
- A Sur, de milliers de policiers et de forces spéciales étaient déployés. Etaient-ce là les équipes qui opèrent sous le nom de “Esadullah Team” ?
- Quel est le lien du “Esadullah Team” avec Daech ?
- Quel est le lien du “Esadullah Team” avec l’Etat ?
- L’Etat a‑t-il entrainé des forces de contra ?
- Quel est le lien du “Esadullah Team” avec le gouvernement provisoire ?
Demirel soulignait « L’Etat a déchaîné la terreur aussi bien par les arrestations et les gardes à vue, que les insultes, la violence et les massacres qu’il a commis à Sur. »
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Nous avions commencé dans un article récent à poser les mêmes questions, celles-ci étant de plus en plus partagées par la presse turque même sous surveillance, et revenant dans des témoignages.
En effet cette signature alimente des rumeurs existantes sur le fait que des djihadistes, mercenaires seraient intégrés dans les forces de sécurité en Turquie. Une partie de la population locale accuse la police, une autre pense qu’une organisation islamiste opère séparément de la police. Les anti-kurdes avancent comme d’habitude, la thèse qu’il s’agirait d’une opération pour manipuler l’opinion publique, orchestrée par le PKK, afin de “victimiser” leur propre organisation.
Sur ce sujet, la Direction des forces de Sécurité turques n’a fait aucune déclaration.
Des témoignages, des observations, parfois photos à l’appui existent depuis un moment donc les questions aussi…
Plusieurs articles ont relayé le fait que les combattants de Daech blessés étaient soignés dans des hôpitaux turcs dans des villes près de la frontière. Différents témoignages concordaient également sur le fait que les ambulances qui transfèraient des blessés de Daech via la frontière ne rentraient pas vide, mais transportaient de nouveaux combattants fraîchement enrôlés.
Les avocates du “Bureau d’aide judiciaire contre l’agression sexuelle et le viol durant une garde à vue” qui a publié un rapport détaillé de leur enquête sur les camps de réfugiés syriens soulignait leurs soupçons sur le fait qu’au moins un des 22 camps situés en Turquie serait réservé aux familles de combattants de Daech.
Article Kedistan : Femmes est réfugiées, double discrimation
Nous avions entendu deux témoignages de femmes de Cizre, devant les caméras de la délégation de 150 femmes du BIKG, (initiative des femmes pour la paix) qui s’était rendue sur place après la levée du couvre feu de 9 jours.
Ces femmes qui apportaient leur version des fait sur ces 9 jours de blocus ultra violent ajoutaient « C’était des gens de Daech ! ».
Article Kedistan : 150 femmes à Cizre (vidéo)
Le 4 octobre dans la commune de Harbiye (Defne-Hatay), frontalière, en plein centre du village, un minibus s’est renversé suite à un accident de la route ordinaire. Les habitants étaient arrivés sur les lieux pour secourir les voyageurs, mais les 30 hommes se sont dispersés en panique dans les petites rues. Devant ce comportement suspect, les habitants ont rapidement observé que les plaques d’immatriculation du véhicule étaient différentes en avant et arrière. Avec le soupçon qu’il s’agirait bien des djihadistes du Daech, ils ont suivi les hommes. La police est arrivée sur place. Elle a mis les hommes en sécurité dans une école et les a protégé derrière un cordon de sécurité. Ensuite ces hommes ont été transférés par la police. Aucun correspondant de presse, ni témoin n’a pu obtenir une explication sur ce qu’ils sont devenus, aucune déclaration n’a été faite. Il n’est pas donc difficile de penser qu’ils ont été libérés.
S’ajoutent sur ce genre d’observations dont nous ne citons ici que quelques exemples, les dernières images et informations concernant des pratiques brutales des forces de sécurité, dans les zones d’affrontement.
En effet, tirer un corps, derrière un blindé, attaché par une corde, le filmer et publier, ou encore tuer 4 jeunes en arrachant leur tête, ne faisaient pas partie des modes opératoires de la police ou des forces spéciales turques jusqu’à ce jour, bien qu’elles ne sont pas des bisounours. Ce sont des méthodes qui font penser étrangement à celle de Daech et il n’est pas difficile de mettre côte à côte les images publiées par leur soin avec celles de ces derniers jours en Turquie et de se poser des questions.
Toutes les armées du monde ont utilisé de tout temps des supplétifs en leur sein ou des libérés sur parole pour leurs basses oeuvres. Là, le vivier est proche, et les recrutement de Daech se font dans les zones frontalières. Les ultra nationalistes ne sont pas en reste, et certains se reconvertissent du côté des musulmans radicaux pour faire bonne mesure. L’appellation d’Etat profond, qui sert commodément à désigner les connivences obscures ne suffira peut être pas à expliquer tout.