Rappelons que la jeune journaliste et artiste Zehra Doğan a été condamnée à 2 ans et 9 mois de prison et incarcérée depuis le 12 juin à la prison de Diyarbakır. Elle avait auparavant passé 141 jours dans les geôles de Mardin, jusqu’au 9 décembre 2016.
La solidarité n’avait pas manqué à l’appel, mais Zehra n’a pourtant pas pu quitter la prison à ciel ouvert de la Turquie avant d’être arrêtée à nouveau début juin. Ses oeuvres, elles, se sont échappées de cet univers carcéral.
Son voeu le plus cher est qu’elles soient exposées, puis vendues aux enchères, pour venir en aide aux familles victimes des exactions au Kurdistan, et plongées dans la précarité par l’emprisonnement des leurs, ou leurs licenciements suite aux purges qui se prolongent sous état d’urgence.
Ce sera chose faite dans le courant de l’année 2017/2018, Kedistan en a pris l’engagement auprès de Zehra.
Un choix de 22 tableaux sera présenté à Douarnenez, salle “Miettes de Baleine” en août 2017, durant la semaine de cinéma, du 18 au 26, avant qu’une exposition complète, constituée d’une soixantaine d’oeuvres ne parcourt quelques villes françaises et européennes.
Ces oeuvres inédites sont celles, récentes, de la “clandestinité”, et s’y joindront celles de prison de 2016.
Arrêtons nous un instant sur ces mois passés à la prison de femmes, en attente de jugement, de 2016, et sur ce qui constitua un acte fort de résistance à Mardin.
Celui-ci est parti d’un constat simple, après la fermeture et l’interdiction du journal Özgür Gündem.
“Puisque les sources d’information libre sont taries, recréons-les nous mêmes”
Ce fut le point de départ d’une résistance organisée de l’intérieur entre femmes, qui donna naissance à deux exemplaires manuscrits sur papier craft, qui circulèrent clandestinement. Un frisson vous parcourt, quand vous tenez entre vos mains ce qui est un “document” d’histoire témoignant de la ténacité de la résistance kurde, de l’inventivité, de l’organisation et de la solidarité entre prisonnières, tout comme de la politisation des prisons qui enferment tant de militantEs.
Ces documents feront l’objet de facs similés qui seront disponibles dès l’automne, et figurent avec quelques traductions d’articles, dans le livre qui accompagne l’exposition, disponible dès août pour Douarnenez, et que vous trouverez dans les librairies en octobre.
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Un livre
Il réunit différents textes de Zehra Doğan, et plus de 60 de ses oeuvres picturales, peintures et dessins. Un pied de nez que Zehra fait du fond de sa prison à ceux qui veulent briser ce qu’elle est. Un point d’étape dans sa résistance, à seulement 28 ans, à sa manière, tout autant politique que culturelle. Un fourmillement de vie, “Les yeux grands ouverts”.
Nous ne le répèterons jamais assez, il est des figures qui symbolisent à elle seules des combats. Zehra Doğan est de celles-là. Combattante de la cause des femmes, elle obtint un prix de journalisme pour son reportage à propos des femmes Yezidi martyrisées par Daech, puis passa des semaines sous couvre-feux dans les villes assiégées, pour témoigner, tant par l’écrit que par ses dessins, des meurtres commis par les forces de répression du régime turc. Sa récompense fut, cette fois, une condamnation pour “apologie du terrorisme”.
Zehra est tout sauf une “aristocrate” du journalisme. Lorsqu’elle fonda avec d’autres, à 25 ans, la première agence de presse composée uniquement de femmes en Turquie, elle ne fut pas pour autant invitée aux cénacles, tant les journalistes kurdes sont souvent eux aussi oubliés parce que kurdes. Ainsi va la Turquie, et son nationalisme omniprésent, même dans l’adversité.
Alors, soutenir Zehra Doğan, c’est être au coeur du sujet, et pas seulement abonder une revendication de “liberté d’expression”.
Soutenir Zehra c’est aussi la “protéger”, et l’aider considérablement, elle et ses proches, à résister et préparer l’avenir.
La faire connaître, la parrainer, lui écrire, permettre la réalisation de ses projets d’aide aux familles en détresse qu’elle a côtoyées, en nous faisant les mandataires, brandir son portrait ensuite à chaque occasion de manifestation devant un Consulat ou une Ambassade, cela est dans nos possibilités, dans vos possibilités.
Soutenir Zehra Doğan, c’est rendre concret la détestation d’un régime où démocratie et justice ont disparu, dénoncer le nationalisme, en mettant en lumière une figure qui n’a perdu ni sa joie, ni la flamme nécessaire au prochain Newroz.
Alors, à vos partages sur les réseaux sociaux, auprès de vos amiEs, de vos cercles militants ou associatifs… Et à vos initiatives… N’hésitez pas à vous servir de Kedistan pour cela, ses dossiers sont faits pour ça…
Cette année 2017/18 doit et peut résonner des demandes de libération, et à travers elles faire entendre toutes les autres.
English Zehra Doğan, a book, an exhibition, your support…