Notre amie Zehra Doğan, nous annonçait ce soir, au téléphone, avec beaucoup de joie, l’ouverture de son exposition “141”, à Diyarbakır.
L’exposition porte le nom “141” qui correspond au nombre de jours que Zehra vient de passer en prison.
Zehra, est une artiste et une des journalistes de l’agence féministe JINHA fermée par décret fin 2016. Elle avait travaillé pendant plusieurs mois, à Nusaybin sous couvre-feu.
Placée en garde à vue à Mardin, le 21 juillet 2016, après la levée des “sièges”, puis détenue à la prison de Mardin pendant 141 jours, donc environ 4 mois et demi, le 9 décembre dernier, lors de sa première audience, elle avait été libérée sous contrôle judiciaire.
Durant sa détention, elle n’avait pas abandonné ses activités journalistiques et artistiques, et avait envers et contre tout continué à dessiner. Elle avait, avec ses amies détenues, contribué à faire naître deux magnifiques exemplaires manuscrits d’ ”Özgür Gündem — Geôle” en soutien au journal qui avait été interdit et fermé par décret à son tour.
La ténacité, l’optimisme, et le sourire de Zehra, qui considère que les prisons sont aussi des lieux de luttes avaient été accueillis comme une sacrée leçon de résistance.
“Nos amiEs artistes ont beaucoup de mal à se réaliser, ouvrir des expos, car chaque fois, la répression anéantit leurs projets” nous disait aujourd’hui Zehra, peu de temps après l’inauguration de son “accrochage”, qui s’est déroulée à 16h. “J’avais une première exposition de programmée à Diyarbakır, mais l’attribution de “curateur” à la Mairie de Diyarbakır a tout arrêté.” Entre temps, Zehra avait été l’invitée d’honneur de l’exposition organisée par l’Association France-Kurdistan à Paris, où des reproductions de ses dessins de prison ont été récemment exposés. La lecture de son message, puisqu’elle ne pouvait être présente, lors de l’inauguration, fut un grand moment d’émotion.
Photos : Refik Tekin
Ce soir, les œuvres de Zehra sont de nouveau sur des murs. Elle ajoutait au téléphone, avec enthousiasme, “Cette fois une galerie marchande abandonnée à Diyarbakır s’est présentée comme un lieu adapté à une exposition… Rendez-vous compte, nous l’avons organisée en trois jours !”
Pour l’inauguration venuEs pour la soutenir, étaient présentEs, Başak, la compagne de Selahattin Demirtaş, Osman Baydemir, ancien maire de Diyarbakır, et le député local du HDP, Ziya Pir…
L’exposition restera ouverte jusqu’au 1er mars.
Prochaine étape, le 23 février, la deuxième audience, à laquelle Zehra comparaitra en liberté, mais court le risque d’être condamnée et incarcérée.
Accusée d’être “membre d’organisation illégale”, au titre de la loi “antiterroriste”, appliquée avec diligence sous l’état d’urgence, une peine de 5 années de prison est demandée à son encontre.
Elle risque donc, toujours, de retourner derrière les barreaux. Le 23 février donc, “nous serons tous avec Zehra” !
Ajout du 23 février : Turquie • Zehra Doğan condamnée au silence