Les milieux intel­lectuels et lit­téraires en Europe, se sont à juste titre émus de l’arrestation, des appels au sec­ours, puis des men­aces de « prison à vie » qui pèsent sur Aslı Erdoğan.

C’est ain­si.

Il arrive qu’une per­son­nal­ité, un nom, au milieu de beau­coup d’autres, fasse l’unanimité pour un « sou­tien ». Et la per­son­nal­ité comme le tal­ent de cette femme y inci­tent. Elle n’a par ailleurs eu de cesse elle-même, avant son arresta­tion, de soutenir celles et ceux, qui dans l’océan de répres­sion, subis­saient les pires des oppres­sions, dis­crim­i­na­tion, voir meurtres pro­gram­més. L’an­née qui vient de s’é­couler en Turquie en regorge.

Elle avait choisi de con­seiller un jour­nal cat­a­logué comme “pro-kurde”, Özgür Gün­dem, et qui avait dû renaître de ses cen­dres plusieurs fois dans son exis­tence. Il est à nou­veau inter­dit, et ses auteurEs empris­on­nés atten­dent les peines qui seront pronon­cées, bien sûr sous l’accusation “d’apologie du ter­ror­isme”, entre autres.

Cette sol­i­dar­ité des milieux intel­lectuels, qui ont réa­gi à la pub­li­ca­tion d’une de ses let­tres d’appel au sec­ours que nous avions traduite, fait chaud au coeur.

« Nous atten­dri­ons effec­tive­ment un mou­ve­ment plus résolu de la part des médias européens, qui, en d’autres cir­con­stances, n’hésitaient pas à établir des comptes à rebours sur leurs 20h, lorsque des otages étaient détenuEs. » écriv­ions-nous. Même si les télévi­sions restent encore sourdes…
Avant cela, les milieux lit­téraires en Alle­magne et Bel­gique, et ailleurs en Europe, avaient déjà forte­ment réagi.

Cette émo­tion est d’autant plus remar­quable, dans ce con­texte poli­tique, où la déten­tion d’une femme, fut-elle écrivaine lue et con­nue ici, pour­rait paraître “anec­do­tique”, lorsqu’on voit l’ampleur des purges, des fer­me­tures de médias, d’interdictions d’associations, la sus­pen­sion d’éluEs, la mise en geôle des respon­s­ables, co-maires et députéEs du par­ti d’opposition démoc­ra­tique HDP, les décrets fas­cisants qui s’accumulent.

Mais ain­si va “l’émotionnel”, l’indig­na­tion sou­vent sélective.

Pour­tant, il n’y a AUCUNE dif­férence entre la mise der­rière les bar­reaux d’un Demir­taş ou d’Aslı. Tous deux défend­ent des valeurs humaines et poli­tiques, l’idée de la paix et d’un avenir com­mun pos­si­ble pour TOUS les Peu­ples de Turquie. L’un est un poli­tique, un élu et respon­s­able de mou­ve­ment, l’autre une écrivaine human­iste, qui partage les mêmes per­spec­tives d’avenir en com­mun pour la Turquie, mais les exprime à sa manière. AucunE des deux ne prêche pour sa chapelle, mais au con­traire lutte pour tous.

Alors, qu’attendons nous pour faire plus amples échos à ces mobil­i­sa­tions par­al­lèles de sou­tien, et pour­tant iden­tiques sur le fond, qui se man­i­fes­tent en Europe ?

Au Kedis­tan, nous n’avons jamais opposé cul­ture et poli­tique, humains et organisations…
Et nous ne com­prenons guère que les uns défi­lent sous des dra­peaux tan­dis que d’autres pub­lient des sou­tiens dans les “revues lit­téraires”, dans la plus stricte étanchéité souvent…

Il serait temps, si nous com­prenons l’appel lancé par Aslı, de faire en sorte que s’épaulent les pris­es de con­science, quelles que soient leurs moti­va­tions, que ce qui se déroule au Moyen-Ori­ent, et en Turquie, a des con­séquences directes sur les états européens, leurs replis, et celui de leurs opin­ions publiques.
Alors, en l’absence d’un mou­ve­ment col­lec­tif et uni­taire, faisons en sorte, pour qu’il en naisse un en Europe, de ne pas oppos­er les con­sciences qui se révoltent.

Ce large mou­ve­ment de sou­tien ne naî­tra pas, soyons en sûrs, de grandes mess­es uni­taires “en défense de la démoc­ra­tie”, où les cen­taines de par­tic­i­pants sont tout juste plus nom­breux que les sig­na­tures de par­tis ou d’organisations. Celles et ceux qui se mobilisent en défense d’Aslı Erdoğan, par exem­ple, ne se recon­nais­sent pas dans ces rassem­ble­ments là, surtout avec le soupçon de réveils tardifs à l’aube de cam­pagnes élec­torales. De la même façon, des ini­tia­tives de sol­i­dar­ité human­i­taires pour les pop­u­la­tions du Bakur, n’ont que faire de listes de sig­na­tures au bas d’un appel. Enfin, les “man­i­fes­ta­tions” à répéti­tion, qui ren­con­trent la “sur­dité” totale des dirigeants poli­tiques européens, finiront par ne plus mobilis­er que des con­va­in­cus et des opiniâtres, dont nous sommes.

Alors, il serait peut être temps de réfléchir à l’échelle européenne, sur le “com­ment” unir les con­sciences, qui, du fait de la démoc­ra­ture turque, retrou­vent des réflex­es ici pour dénon­cer la perte de tout human­isme act­if, que ce soit sur l’accueil des réfugiés, le repli iden­ti­taire, ou le retour des méth­odes de la bête immonde en Turquie. Cela ne se fera pas dans de sim­ples appels “uni­taires” d’organisations, cha­cune dif­férente, cha­cune avec son his­toire, ses égos parfois…

Un tel mou­ve­ment a existé durant 4 années pour Sara­je­vo assiégée… Cer­tains s’en sou­vi­en­nent peut être. D’autres, on l’e­spère, y réfléchissent-ils ?

Mais pour l’heure, et pour revenir au con­cret pos­si­ble, con­cer­nant l’émotion que sus­ci­tent l’emprisonnement et la con­damna­tion pour Aslı Erdoğan au silence à vie des geôles turques, nous avons, à Kedis­tan, un appel à lancer. Pour une fois, nous ne fer­ons pas que de l’info.

Nous appro­chons de décem­bre, de ses rues ani­mées, de ses cadeaux de fin d’année… de l’é­mo­tion tar­ifée à rubans de couleur.
Il ne serait pas con­tra­dic­toire d’y faire entr­er « l’humain » et « l’intelligence », au delà de la grande braderie sous le sapin de fin d’année.

Puisque les milieux lit­téraires et intel­lectuels se mobilisent, pourquoi ne pas quit­ter les réseaux soci­aux et le web, et faire descen­dre Aslı Erdoğan dans les rues éclairées, dans les vit­rines des libraires, dans les “cafés”, pour un jour ou plus en décem­bre… Pourquoi ne pas lire ses textes, ne pas par­ler autour, comme elle l’aurait désiré elle même, en défense de TOUS les pris­on­nierEs politiques ?
Les con­sciences human­istes autour de vous ne man­queront pas, soyez en sûrs, si vous les sollicitez.

Nous allons nous y impli­quer nous aus­si, et s’il faut con­stru­ire un out­il pour une telle cam­pagne en décem­bre, nous nous y impliquerons.

Quit­ter le virtuel pour aller réveiller les con­sciences serait un bon début pour que l’exemple d’Aslı Erdoğan fasse écho à celui de Zehra Doğan, de Sela­hat­tin Demir­taş, de Figen Yük­sek­dağ et de toutEs les autres, qui, en pre­mière ligne, subis­sent les aban­dons de toutes valeurs humaines, préludes au grand repli nation­al et au pop­ulisme iden­ti­taire qui nous guette.

Expos, vit­rines de libraires, lec­tures de textes à l’in­térieur ou dans la rue, échanges, dif­fu­sion d’extraits/flyers sur un ou plusieurs jours, “café spé­cial”, en inci­tant la presse locale à en par­ler… Tout est pos­si­ble, à la con­di­tion de faire vite, que les libraires volon­taires puis­sent s’or­gan­is­er… A quelques unEs qui se réu­nis­sent, dans un pre­mier temps…

Alors, chiche ?
Appel à toutes les bonnes librairies, à toutEs les comé­di­enNEs, lecteurs, lec­tri­ces, à toutes les bonnes volon­tés à même col­lec­tive­ment, partout où c’est pos­si­ble, pour don­ner vie à l’appel au sec­ours d’Aslı Erdoğan, qui par­le pour nous toutEs et non pour elle même.

Vous pou­vez trou­ver tous les arti­cles de Kedis­tan con­cer­nant Aslı, dans ce dossier spé­cial.

Premières suites :

Le mag­a­zine en ligne Dia­critik a décidé de pub­li­er chaque jour un extrait de texte… N’hésitez donc pas à vous en servir.

Et cet appel pub­lié sur le site de la Mai­son éclose

Créa­tion dès aujour­d’hui d’une page Face­book : Free Aslı Erdoğan @freeaslierdogan

Signez la pétition !

Mer­ci à vous toutes et tous. Mer­ci pour Aslı.

La liste des initiatives de soutien que nous avons pu collecter ultérieurement…

 

En moins d’une semaine, une cam­pagne pour la libéra­tion d’Aslı com­mence à mobilis­er aus­si des rédac­tions, et c’est tant mieux enfin ! Mer­ci Franceinfo


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