La poétesse Delphine Durand livre sur Kedistan des hommages poétiques. Pour les retrouver tous, suivez ce lien.
Le Rojava est menacé plus que jamais aujourd’hui dans son existence même, comme projet politique réponse à la guerre et aux nationalismes, comme espoir de Printemps. Les forces hostiles à toute paix tentent de l’écraser et de lui arracher les ailes.
Papillons du Rojava
papillons
pansements sanglants
visages déterrés et crânes rasés
éponges traînées
papillons épuisés, sans souffle
dans le lac du ventre
le rossignol chante son désir
condamné par tous à mort
sabres dépecés
femmes dont la peau laisse voir les os
leurs ailes me terrifient
sequins d’or sur les cadavres
mes ailes veulent s’ouvrir
soulève-moi
brûle-moi
les tués sans nom vont s’agenouiller
et je cours
je fuis ce troupeau qui monte du rivage
mon poème
cet humble trésor laissé aux dents de la foule
l’oiseau qui se déchire aux vitres
son duvet colle encore aux étoiles
pour empêcher mon sang de geler
je compte les chevaux noirs
superbes et sans limites
qui ont connu l’énigme de n’être pas
pieds nus dans les décombres des villes
les articulations brisées une à une
bouillies, loques sous les bottes innombrables
la voix verrouillée dans la bouche
libres dans l’herbe
dormant dans mes veines
brûlant mon plancher d’insomnie
la lumière est cette attente folle
qui n’a jamais voulu être le deuil
face au canon du fusil
elle s’enroule dans la myrrhe et l’or
sur l’oreiller blanc des mots
notre cœur nous dépasse
Image : inspirée d’une photo de Loez, publiée dans Ballast
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