Les “Mères du Samedi” (Cumartesi anneleri) cherchent leurs enfants et proches depuis 1995. Ces femmes se rassemblent tous les samedis à Galatasaray à Istanbul, pour demander quel a été le sort de leurs enfants et proches “disparus”, en garde à vue, ou victimes d’assassinats non résolus.
Les revendications principales des familles sont la mise au grand jour des faits réels concernant leurs proches, enregistrés dans des documents d’Etat. Elles demandent la réforme du Code Pénal turc, afin qu’un délit de “disparition forcée” puisse être inclus de façon qu’il ne puisse pas être concerné par une prescription, et que la Turquie signe la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées
Devenue la protestation pacifique la plus longue de l’histoire de la Turquie, les rassemblements du samedi, entreront le 25 août 2018, dans leur 700e semaine de leur existence.
Les Mères du Samedi réclament vérité et justice depuis 700 semaines et appellent à la solidarité. “S’habituer à l’injustice est aussi honteux que de produire de l’injustice. Ne t’habitue pas ! Ne te tais pas !” disent-elles haut et fort, sous le soleil ou la neige…
A l’occasion de ce 700ème cri, un appel au soutien transnational a été lancé. Rejoignez-vous à leur lutte et apportez votre solidarité où que vous soyez en Europe, ou ailleurs dans le monde…
Des initiatives, manifestations et rassemblements sont organisés dans différents pays et villes, notamment à Paris, Cologne, Berlin, et à Genève, devant le siège de l’ONU…
Vous pouvez suivre et trouver les initiatives prévues dans vos villes respectives :
Facebook @cumartesianneleri | Twitter @CmrtesiAnneleri
Vidéo messages des mères (en turc) #CumartesiAnneleri700Hafta
Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées
Président du ComitéAppel à l’appel au Gouvernement turc pour qu’il mette fin à l’impunité et à l’injustice dans les cas de disparitions forcées, à l’occasion du 700e sit-in des Mères du samedi à la place Galatasaray, Istanbul, le 25 août 2018
Cher monsieur le Président,
Nous, défenseurs des droits de l’homme et membres de la famille de ceux qui ont disparu après avoir été arrêtés par les forces de sécurité de l’Etat, avons entrepris la plus longue action de désobéissance civile en Turquie à Galatasaray Square, Istanbul, tous les samedis depuis le 27 mai. 1995, dans le but de maintenir vivante la réalité des disparitions sous garde sur l’agenda national.
Nous avons mené cette action, car des centaines de personnes ont été arrêtées et ont été déplacées de force par les forces de sécurité en Turquie. Des instruments juridiques ont été introduits par l’État afin d’empêcher l’enquête sur le sort des disparus. Les agents publics auteurs et responsables des crimes de disparition se sont vus offrir des mesures de protection légales, judiciaires et administratives, et ils sont continuellement tolérés.
La politique qui a refusé de reconnaître le fait d’avoir commis des disparitions forcées comme un crime n’a pas seulement engendré un sentiment d’injustice, elle a également paralysé la société et empêché le développement d’un sens mutuel de la justice. Il a créé un milieu dans lequel l’assassinat et l’élimination des citoyens n’étaient pas perçus comme un acte criminel si l’auteur était un agent public. Cela a conduit à la création d’un climat d’insécurité et de peur, entraînant la société dans un état de silence dominant.
Les gouvernements successifs ont considéré nos enfants comme des ennemis et les ont assassinés, ont ordonné leur disparition et ont offert l’impunité aux auteurs des actes de terreur contre nos bien-aimés, simplement parce qu’ils ont défendu leurs droits et libertés fondamentaux, et parce qu’ils sont nés Kurdes, Assyriens ou Chaldéens, ou simplement parce qu’ils étaient socialistes. Ce sont les puissants qui ont fermé les yeux sur nos demandes de découverte des faits, de prévalence de la justice. C’est aussi la raison pour laquelle la Turquie a échoué dans la démocratisation.
Nous continuerons à exprimer nos demandes au Square Galatasaray à midi tous les samedis, avec les photos de nos disparus et des œillets rouges entre nos mains, comme nous le disons: Mettre en œuvre tous les changements radicaux, juridiques, judiciaires et administratifs nécessaires dans tout le système actuel ce qui génère l’impunité et l’injustice!
Mettre fin à la politique d’impunité et faire la lumière sur les crimes contre l’humanité et leurs auteurs!
Divulguer le sort de nos enfants bien-aimés qui ont disparu dans les mains de l’État et poursuivre les auteurs!
Fournir des garanties légales pour notre droit à réclamer la vérité et la justice!
La Turquie doit mettre fin à son mépris prolongé et signer la Convention internationale des Nations Unies pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées!
Nous allons organiser notre 700e sit-in le 25 août 2018. Nous invitons le Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées à appeler le gouvernement turc à répondre à nos demandes, qui sont également des composantes essentielles des droits de l’homme universels.
A cette occasion, nous aimerions vous demander un rendez-vous pour rencontrer le Comité des Nations Unies sur les disparitions forcées. Pourriez-vous s’il vous plaît laissez-nous savoir quelle heure vous conviendrait.
Sincères amitiés,
Au nom des Mères du samedi
Emine OCAK (Mère de disparu Hasan OCAK)
Elmas EREN (Mère de disparu Hayrettin Eren)
Hanife YILDIZ (Mère de disparu Murat YILDIZ)
Ajout Kedistan 25 août 2018 15h00
Les forces de police sont intervenues pour disperser le 700e rassemblement des “Mères du samedi”, qui à Istanbul réclament toujours les dépouilles de leurs enfants ou le récit et les traces de leur assassinat étatique. Ce 700e rassemblement faisait l’objet d’un large appel en Turquie et au niveau transnational. Grenades, coups, telles furent les réponses du régime à Istanbul.
Photo de l’arrestation de Emine, dont le fils Hazan a été torturé en détention en janvier 1995. Ses parents l’ont retrouvé ensuite dans le cimetière des sans-abri en mai 1995. Elle a été à Galatasaray pendant 23 ans pour le procès de ceux qui ont tué son fils.
Image à la une :
Extrait de l’affiche de l’initiative de Genève.