Le collectif “Bombalara Karşı Sofralar İstanbul” (De la Bouffe, pas des Bombes) existe depuis 3 ans.
Voilà comment le collectif se présente :
“Depuis que nous existons, nous avons réalisé plus d’une centaine d’activité dans tous les coins d’Istanbul. Notre priorité est de partager les aliments considérés comme déchets, obtenus dans des zones les plus visibles de l’économie centrées sur le gâchis capitaliste, et de les recycler et partager sur des tables véganes ouvertes à toutes et tous.
Parallèlement, nous essayons aussi, de démontrer concrètement, par des activités comme des ateliers, marchés de troc, que les idéaux et pratiques anti-autoritaires et anarchistes, peuvent exister dans nos lieux de vies, non pas dans l’avenir, mais dès aujourd’hui, maintenant.
Dans les deux dernier mois, lorsque l’état d’urgence grâce auquel l’Etat se survit, s’est renforcé, quelques uns des visages de l’Etat, en uniformes, se sont montrés à Taksim, devant les tables que nous avions dressées pour les 90èmes et 95èmes fois, comme nous le faisonst depuis 3 ans, tous les mercredis.
D’abord, sur la place de Galatasaray, ensuite, sur avenue d’Istiklal, nos tables ouvertes, sur lesquelles nous partageons notre repas freegan, nos affaires, nos documentaires et notre musique ont été dispersées par la police. Nous avons répondu à ces agressions en dressant de nouveau nos tables, et proposant nos activités, et nous continuerons. Nous ne reconnaissons pas la légitimité d’une quelconque source de pression. Nous ne permettrons pas que les rues, deviennent autre chose que des espaces de liberté de tous les êtres y vivant. Par ailleurs, les prisons, les casernes, les écoles, les asiles, les refuges pour animaux, les aquariums, ou les constructions en béton, continueront tous à être des zones de résistance.”
Page facebook du collectif “Bombalara Karşı Sofralar İstanbul”| Twitter @fnb_sofralar
Agression policière du 95è table de partage le 23 novembre 2013
Le collectif a une vision globale et cohérente sur le système. Il ne suffit pas, pour dénoncer le gaspillage, de faire “entre soi” des “disco soupes”, comme il en existe dans certains pays européens. Encore faut-il d’une part identifier clairement les causes systémiques de ce gaspillage alimentaire, le système économique qui les organise, le productivisme qui en est le moteur (et au passage les modèles agricoles d’élevages d’animaux) et d’autre part organiser le partage auprès des plus modestes, promouvoir l’accueil et l’entraide, comme la co-gestion de la récupération des surplus… Bref, il s’agit d’une pratique militante anticapitaliste de proximité.
Une table dressée, tout en dénonçant les massacres de l’Etat à Cizre
En bonus, nous publions ce texte de Dicle, que nous avons trouvé comme une jolie petite pomme rouge, en fouillant dans la poubelle Facebook.
Bonjour, je suis une personne propre sur moi qui fouille les poubelles
“La raison de la famine et la misère du monde n’est pas de ne pas pouvoir nourrir les pauvres, mais l’insatiété des riches.”
Ils sonnent à votre porte en parlant de vos “faims” pendant les périodes d’élections, sans pour autant trouver de solutions à la famine, à la misère et au chômage.
Le système, où les habitudes de production et de consommation ne sont pas analysées, où on ils ne s’intéressent qu’au vote des gens qui consomment comme s’il existaient 10 Terres semblables. Les ambitions qui les font rêver sont plus importants que nos utopies, pour ce monde dont les rivières sont engorgées par des barrages, les terres sont empoisonnées de pesticides et des grains OGM, les mers se noient dans des sacs en plastiques, l’atmosphère est polluée… Si nous sommes vivantEs, la révolution c’est maintenant, tout de suite ! La révolution est dans le panier de courses, elle est dans le sac en tissu, dans le frigidaire, dans l’assiette, dans la poubelle. Elle est partout.
Qu’est-ce que le freeganisme ?
En quelques mots simples, le terme est né d’un mixage de “free”, gratuit, et de “véganisme”, ne consommer aucun produit animal. C’est un mouvement anti consommation et gâchis. Mais il est anticapitaliste.
Pourquoi il y a autant de déchets ?
Parce que nous consommons plus que nos besoins et nous ne recyclons pas. Nous sommes avides, et nous préférons jeter que de partager. Au lieu de manger le pain d’hier en le chauffant, nous le jetons à la poubelle et en achetons de nouveau. Nous avons des propos de “travailleurs” éloignés de la réalité du travail que le soleil, la pluie et l’agriculteur/trice fournissent. Et quand quelqu’unE nous sort un couplet qui affirme que le véganisme est juste une façon de vivre égalitaire et éthique, accompagnée de quelques mots sur les droits des animaux, en vous montrant que le kebab que nous aimons tant, est en vérité le cadavre d’un animal, nous pensons bien faire de l’étiqueter de petit bourgeois, comme si le carnisme n’étaient pas proposé dans tous les coins de rue, avec des odeurs quasi pornographiques.
Nous sommes la seule espèce, qui s’écrase sous des décimaux qui ne peuvent être calculés avec l’idée ni pratique, et qui écrasons donc les autres espèces encore plus. Cette stratégie mondiale nous est vendue pour que nous consommions toujours plus, tout ce qui n’est pas fondamentalement nécessaire pour vivre. Si vous ne consommez pas, si je ne consomme pas, croyez-vous que les travailleurs/ses perdront leur travail ? Si les humains, n’égorgent pas d’animaux, n’en mangent pas, les moutons disparaitront-ils ? Si vous n’arrivez pas à sortir de ces questionnements, c’est que vous avez bien entrainé les centres producteurs de prétextes de votre cerveau. Cette révolution sera une révolution, quand tout cela sera dépassé.
Qu’y a‑t-il dans les poubelles ?
Les fruits et les légumes. Ils prennent leur part de l’effort du système qui nous formate et qui fait de nous en uniformisant un peu partout, des personnes qui ne sont pas véritablement “nous”. Il faut que tous les fruits exposés sur des étagères soient tous bien ronds, bien brillants, bien rouges, mauves, jaunes et qu’ils parlent avant tout à vos yeux, tels qu’on vous a appris à les voir. Combien de fruits et légumes parce qu’il portent une marque, parce qu’ils sont un peu déformés, parce qu’ils sont en dessous de la taille moyenne, se retrouvent dans les profondeurs des poubelles, au lieu d’atterrir devant celles et ceux qui en ont besoin ? Nous n’avons pas de données exactes pour le savoir.
Il n’y a pas de faim, il y a avidité et un gâchis. Il y a trahison au soleil, à la pluie, à la terre, et aux mains qui la travaillent.
Dicle Ürünay