Erdoğan a à nou­veau demandé un vote du Par­lement, pour respecter les formes, con­cer­nant l’u­til­i­sa­tion des forces armées turques, en “inter­ven­tions extérieures”, pour un an. Il s’ag­it bien sûr, dans le con­texte, de la Syrie et de l’Irak.

Pour la Syrie, cela ne fait qu’avalis­er l’in­ter­ven­tion en cours, qui a débuté avec la prise de Jer­ablus.

Con­cer­nant l’I­rak, et l’of­fen­sive prochaine annon­cée de la “coali­tion con­tre Daech” à Mossoul, il faut rap­pel­er que le gou­verne­ment irakien (pro chi­ite), et la par­tie kurde iraki­enne, (mal­gré les ren­con­tres avec Erdoğan), ont tou­jours vu d’un mau­vais oeil la présence de mil­i­taires turcs dans cette alliance en cours. Erdoğan le sait par­faite­ment, et s’il a insisté sur “la zone tam­pon” néces­saire à sta­bilis­er en Syrie, bien davan­tage que sur la lutte con­tre Daech, on devine facile­ment le dou­ble jeu de la Turquie qui pré­pare à nouveau.

C’est ce que n’ont pas man­qué de faire remar­quer les députés d’op­po­si­tion (HDP), dans leurs inter­ven­tions, soulig­nant que Daech, dans cette motion, était moins citées que ce que la Turquie con­sid­ère comme “ter­ror­istes” en Syrie, c’est à dire les groupes com­bat­tants du Rojava…

Au pas­sage, il faut dire que c’é­tait la “ren­trée parlementaire”.

Et quelle ren­trée ! Pour la pre­mière fois, aucun alcool sur les buf­fets, aucun “couteau” non plus, (sans doute par sécu­rité anti coup d’é­tat ?), et un por­trait du “Prési­dent de la République”, Erdoğan him­self, trô­nant au dessus des con­vives. La prési­den­tial­i­sa­tion est affichée avant même la réforme constitutionnelle…

Cette motion n’a pas été votée par l’op­po­si­tion, on le savait.

Mais qu’ap­pelle-t-on “oppo­si­tion” ? Le CHP aus­si ? que tout le monde en Europe con­tin­ue de qual­i­fi­er de “cen­tre gauche” ? Non, les kémal­istes du CHP, 2e par­ti du pays après l’AKP d’Er­doğan, engagés avec lui depuis juil­let dans l’u­nion nationale-iste et l’é­tat d’ur­gence, se sont con­tentés, comme d’habi­tude, de “mis­es en garde”, avant de vot­er des deux mains.

Un de leur député a expliqué qu’il serait plus judi­cieux de “con­forter les posi­tions mil­i­taires dans les villes où le ter­ror­isme (kurde) a été com­bat­tu, plutôt que ris­quer “l’en­lise­ment en Syrie” (sic). Puis il ont voté la motion don­nant blanc seing aux inter­ven­tions extérieures “pour la sécu­rité de la Turquie”.

Après le vote favor­able à la lev­ée de l’im­mu­nité par­lemen­taire des députés d’op­po­si­tion HDP, après les votes sur les amende­ments sur la loi ter­ror­isme, qui ont large­ment autorisé les purges d’après coup d’é­tat, les fer­me­tures de médias, les empris­on­nements de jour­nal­istes, après l’u­nion nationale et l’é­tat d’ur­gence, le CHP débute la ses­sion du par­lement “crou­pi­on” par une nou­velle carte blanche pour le gou­verne­ment AKP. Les “social­istes” français, à côté, seraient des gauchistes !

On ne peut donc que se réjouir du fait que les organ­i­sa­tions de société civile pour la Paix, aient réa­gi immé­di­ate­ment con­tre le vote de cette motion, en appelant à dire NON. Cela sig­ni­fie que le HDP, et donc le seul front à même de soutenir et tiss­er la résis­tance, est à nou­veau écouté par des franges de la gauche turque mod­érée, large­ment divisée depuis juil­let par l’al­légeance du CHP. Et il ne s’ag­it pas de com­bines politi­ci­ennes, mais de pos­si­bles relances d’une oppo­si­tion con­tre “les guer­res”, si tant est que l’op­ti­misme puisse encore exis­ter dans cette démocrature…

On peut s’at­ten­dre à un chan­tage rapi­de d’Er­doğan, en direc­tion des Etats Unis, con­cer­nant les vieilles exi­gences de la “zone tam­pon” en Syrie. Avoir pour Erdo­gan, un ali­bi “par­lemen­taire”, pour ren­forcer sa présence mil­i­taire en Syrie, et men­ac­er, pourquoi pas, d’aller même met­tre son nez sur le chemin d’Alep, servi­rait bien, en péri­ode élec­torale améri­caine, à obtenir ce qu’il cherche depuis trois ans : une implan­ta­tion durable reje­tant  défini­tive­ment la pos­si­ble jonc­tion entre eux, des trois can­tons du Rojava.

C’est donc une autori­sa­tion à nou­veau de “dou­ble jeu” turc, qui a été votée. Et ce n’est pas une anec­dote. On peut savoir à l’a­vance qu’Er­doğan ne s’en servi­ra pas pour la Paix. Les gou­verne­ments européens se “réjouiront” de la déci­sion, en par­lant cer­taine­ment de “Mossoul”, et salueront sans doute l’en­gage­ment d’une armée de l’Otan et d’une puis­sance régionale… et diront-ils, “enfin rev­enue à la rai­son con­tre Daech”…à suivre.

Erdoğan, de sur­croît, fait la démon­stra­tion, sans risques, qu’il “respecte son par­lement”. La démoc­ra­tie quoi ! Et, une fois de plus, désigne les “empêcheurs de tourn­er en rond”, le HDP, avec qui les comptes seront “réglés” dans les mois qui vien­nent, tou­jours grâce à la loi “ter­ror­isme”.

Une fois de plus, toutes les ques­tions poli­tiques sont liées entre elles, et cha­cune con­stitue une pièce de jeu d’échec pour Erdoğan.

Et s’il fal­lait con­forter cette hypothèse d’une ten­ta­tive de pres­sion vis à vis des Etats Unis en cam­pagne, pour obtenir enfin sa zone tam­pon, il suf­fit d’é­couter une par­tie des pro­pos d’Er­do­gan, et de les lier à ce vote qui vient d’en faire le réel chef des armées en “opéra­tions extérieures”.

 

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Extraits :

Nous faisons avec la Russie, des pas impor­tants pour que nos rela­tions se nor­malisent. En nous focal­isant sur des objec­tifs com­muns, nous souhaitons porter nos rela­tions au dessus du niveau où elles étaient avant. Dans plusieurs domaines, nos rela­tions se rap­prochent de leurs niveaux anciens.… Avec Israël, qui a répon­du à nos deman­des pour Mavi Mar­mara, nous essayons de pro­gress­er dans des rela­tions qui seront béné­fiques pour tout le monde.”

Nous sommes témoins, surtout dans cette dernière péri­ode, de sérieuses inco­hérences et signes de ‘poli­tique à têtes mul­ti­ples’ des Etats-Unis d’Amérique, dans leurs poli­tiques qui con­cer­nent notre région. Une par­tie de la Direc­tion des Etats Unis mène avec insis­tance un tra­vail com­mun avec l’organisation ter­ror­iste PKK/PYD/YPG, une autre par­tie essaye de suiv­re des poli­tiques plus proche de nos sen­si­bil­ités. (…) Nous allons con­tin­uer nos efforts, pour que ce prob­lème que nous com­prenons venir de la péri­ode des élec­tions aux Etat-Unis, puisse être résolu sans laiss­er de dégâts durables sur les intérêts vitaux de notre pays.”


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