Le détail de l’his­toire… Après Hitler cité en exem­ple de “Prési­dent” par Erdoğan, dans une prise de parole, la référence sans com­plexe aux fas­cistes de Tolède, pour jus­ti­fi­er les destruc­tions au Kur­dis­tan turc, il ne manque plus qu’une belle référence à Mus­soli­ni pour bien mar­quer la nature du régime turc.

Et cela parce que le Par­lement alle­mand a voté la recon­nais­sance du géno­cide arménien à une majorité écrasante.

la réso­lu­tion por­tait sur la« com­mé­mora­tion du géno­cide des Arméniens et autres minorités chré­ti­ennes dans les années 1915 et 1916 ».

Binali Yıldırım, le nou­veau Pre­mier Min­istre turc commente…

C’est un vote absurde. C’est un inci­dent ordi­naire qui n’a ni tête ni queue, arrivé pen­dant la 1ère Guerre Mon­di­ale en 1915, et qui peut arriv­er dans n’importe quel pays.
Ce serait une erreur de l’in­stru­men­talis­er pour des cal­culs de poli­tique intérieure.”

Et ce com­men­taire fut fait avant même le résul­tat des votes. Le Pre­mier Min­istre avait clos le débat avant les résul­tats : “Il ne se passera rien. On les con­sid­ér­era comme inex­is­tants.” annonçait-il. “Nous savons que ceux qui essayent de deman­der des comptes à la Turquie n’ont pas de bonnes inten­tions. Nos rela­tions avec l’Allemagne en seront affec­tées, sans aucun doute.” et il pré­cise quand même que ces “effets négat­ifs” ne chang­eront rien pour l’entente avec l’UE, sur les migrants.

Une man­i­fes­ta­tion organ­isée par la “Plate­forme de Sol­i­dar­ité turcs-alle­mands” s’est déroulée à Berlin. Les asso­ci­a­tions mem­bres de la plate­forme, nation­al­istes, ultras nation­al­istes, big­ots et kémal­istes d’Alle­magne étaient toutes présentes. Des par­tic­i­pants sont égale­ment venus de Bel­gique et de France.

Les médias alle­mands, avaient eux aus­si, large­ment pub­lié en amont et com­men­té les pres­sions et mobil­i­sa­tions en direc­tion du Bundestag :

Des groupes d’origine turc s’é­taient organ­isés et mobil­isés con­tre le pro­jet de loi et fai­saient pres­sion sur les autorités fédérales, et s’adres­saient tout par­ti­c­ulière­ment à Cem Özdemir, co-prési­dent de l’Alliance 90 / Les Verts (Bünd­nis 90 / Die Grü­nen) et député de Bun­destag, qui sou­tient le pro­jet de loi. Il a été cible de men­aces et d’insultes. Les protes­ta­tions et cam­pagnes étaient bien sûr soutenues par le gou­verne­ment d’Erdoğan. 537 de ces asso­ci­a­tions avaient écrit aux députés.

Ce vote au Bun­destag, qui s’ac­com­pa­gne d’une demande d’ou­ver­ture des archives, n’a pas fini de faire par­ler. Car, si, comme pour d’autres Etats européens avant l’Alle­magne, ce vote de recon­nais­sance est venu au Par­lement pour des raisons en par­tie de poli­tique intérieure, le rôle de l’Alle­magne durant le géno­cide des Arméniens n’est pas non plus de la plus grande clarté…

Le géno­cide des Arméniens a été recon­nu par une ving­taine de pays, dont la France. Ce rôle de l’Alle­magne dans le géno­cide – allié bien infor­mé à l’époque – explique que celle-ci ait mon­tré peu d’empressement jusqu’i­ci. Angela Merkel,  la chancelière, le vice-chance­li­er, prési­dent du Par­ti social-démoc­rate, le min­istre des affaires étrangères alle­mand n’ont pas par­ticipé, le jeu­di 2 juin, au vote, ce qui en dit long sur l’at­ti­tude du gou­verne­ment fédéral.

Mais revenons sur l’ex­as­péra­tion du nou­veau Pre­mier Min­istre, et sa sor­tie à la Jean Marie…

Il dit tout haut ce que le Prési­dent dit plus bas. Et il a été choisi pour ça par l’homme qui par­le à l’or­eille des Pre­miers Min­istres désor­mais. Davu­toğlu, son prédécesseur, avait lui, été plus empressé auprès de Dame Merkel, lorsqu’il avait négo­cié l’ac­cord sur les réfugiés. Il était alors pour­tant par­faite­ment infor­mé déjà sur ce vote plan­i­fié au Bundestag.

Mais s’il fal­lait encore démon­tr­er que les “ambi­tions européennes” de la Turquie ne sont que poudre aux yeux à l’in­térieur, et pré­texte à l’ex­térieur, voilà qui est encore fait, après d’ailleurs que L’Eu­rope ait recalé pour un temps, la ques­tion de la “sup­pres­sion des visas”, négo­ciée en annexe du deal sur les réfugiés.

S’il fal­lait démon­tr­er surtout que le refoulé géno­cidaire turc est plus que jamais instru­men­tal­isé par le régime, c’est chose faite aus­si. On le sait, Erdoğan a assem­blé autour de sa per­son­ne, en ten­ant bon sur le “géno­cide”, des kémal­istes jusqu’aux ultras nation­al­istes, sur fond d’idéolo­gie pop­uliste big­ote et revan­charde de l’AKP. Et le “détail” est tel, qu’il hante la poli­tique turque, et ver­rouille toute avancée vers la prise en compte de la réal­ité de mosaïque cul­turelle et eth­nique de la Turquie. Quelles que soient les “diver­gences” poli­tiques entre les kémal­istes et l’AKP, ils se rejoignent sur le nation­al­isme exclusif, qui s’est tou­jours nour­ri du refoulé géno­cidaire, trans­mis de généra­tions en généra­tions, par l’é­cole de la Nation.

Lorsque le mou­ve­ment démoc­ra­tique kurde, et sa branche com­bat­tante, pro­pose le “con­fédéral­isme” démoc­ra­tique à la Turquie, le gros mot sonne comme celui du géno­cide. Et les méth­odes employées par les forces de répres­sion de l’E­tat turc à leur encon­tre, s’in­spirent aus­si du refoulé.

Et celles et ceux qui veu­lent en sor­tir aujour­d’hui, en but à la répres­sion quo­ti­di­enne, pren­dront cette déc­la­ra­tion du Pre­mier Min­istre tout neuf, comme un aver­tisse­ment : “Voyez, sur le géno­cide avec l’Alle­magne… même pas mal… Alors n’at­ten­dez rien vous non plus de cette Europe là…”

Finale­ment, pour mar­quer le coup, la Turquie a quand même rap­pelé son ambas­sadeur à Berlin.

Nous revien­drons dans d’autres bil­lets sur l’im­por­tance cap­i­tale de cette péri­ode de l’his­toire turque, et de l’om­bre portée sur le présent par le détail.


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