istanbul-by-nightAujour­d’hui c’est « ma journée off », je ne bouge pas.

Hier, je suis allée à la banque et faire les cours­es. A pied, avec les cabas à la main. Depuis je suis morte. Que de monde dans les rues !

Le nou­v­el an se rap­proche, bon­jour la frénésie de con­som­ma­tion ! Tu as des coups d’é­paules pour marcher entre ceux qui peu­vent acheter, et ceux qui sont frus­trés parce qu’ils n’en ont pas les moyens. Il y a des queues partout et tu observes de drôles de trucs. Des jeunes gens essayent de te dou­bler dans des queues. Je n’ose pas rous­péter mais j’élar­gis mes épaules pour blo­quer et je fais ma tête méchante. Pour mon­ter dans un bus tu te fais bous­culer. Si je suis avec ma soeur c’est encore pire. Eh ben, à 84 ans, elle n’ar­rive pas à lever le pied pour mon­ter les march­es du bus, alors je suis oblig­ée de la pouss­er sur ses fess­es. Une fois que tu es entrée dans le bus, par­fois per­son­ne ne te donne de place, tu voyages bus-public
une heure debout. Les plus jeunes tour­nent leur tête ou plon­gent leurs regards dans leur télé­phone portable pour ne pas crois­er tes yeux. Et par­fois, c’est le con­traire, tout le monde se lève en même temps, et tu as presque envie de pleur­er, telle­ment tu ne sais plus com­ment les remerci­er. Drôle d’an­i­mal que l’être humain…

J’ai lu les jour­naux d’au­jour­d’hui. La jour­nal­iste Gülse Birsel, demande c’est quoi cette appel­la­tion « Prési­dent »… Dans toutes les réu­nions, les con­férences de presse, tout le monde par­le du « Prési­dent ». C’est vrai ça ! Ca me grat­tait l’or­eille chaque fois que je l’en­tendais ce mot. Pour­tant jusqu’à preuve du con­traire la Turquie est une République et on doit par­ler du« Prési­dent de la République ». L’autre Tayyip veut chang­er le sys­tème et la Con­sti­tu­tion, rabaiss­er le Pre­mier Min­istre et don­ner tous les pou­voirs au « Prési­dent ». De toutes façons s’il s’est fait élire, c’est parce qu’il ne pou­vait pas faire un 3ème man­dat en tant que Pre­mier Min­istre. Alors il veut emporter tous les pou­voir là où il va. Si partout on utilise le titre « Prési­dent » c’est qu’on nous lave le cerveau, qu’on nous habitue à l’idée avant l’heure.

Les jour­naux par­lent des ques­tions du con­cours d’ad­min­is­tra­tion volées et ven­dues aux can­di­dats en 2010. Je me demandais pourquoi ils sor­taient ça des oubli­ettes 4 ans plus tard. Tayyip avait don­né l’or­dre à l’époque, il avait dit « Trou­vez-moi qui a fait ça ! ». Puis, il ne s’est rien passé. On apprend donc aujour­d’hui qu’ils les avaient bien trou­vé les coupables, mais qu’ils n’avaient rien dit. Pour cause, il s’agis­sait des bon­hommes de la « Cemaat ». [La Con­frérie religieuse] dirigée par Fetul­lah Gülen. Rien n’avait été fait à l’époque parce que Tayyip mangeait dans le même bol que Gülen. Main­tenant qu’ils sont devenus des enne­mis, eh ben, ils annon­cent les coupables. Que de cor­rup­tion, que de manip­u­la­tion ! C’est exécrable !

pot-de-vinEt puis on ressort en ce moment l’his­toire des boites à chaus­sures aus­si. Tout le monde hurle. Le 17 décem­bre 2013, 4,5 mil­lions de dol­lars avaient été trou­vés dans des boites à chaus­sures, chez 3 fils de min­istres, 50 hommes d’af­faires, et un directeur de banque, tous proches de Tayyip. C’est du pot de vin, et du vin de mil­lésime sans doute, vu les sommes. Ils ont refusé bien sur, en essayant de trou­ver des expli­ca­tions.  « C’é­tait des dons pour des oeu­vres de char­ité » ils nous ont dit, ou « C’est Gülen qui a mon­té un coup con­tre nous, il a fait plac­er cet argent chez nous. » Euh… oui, bien sur… 7 cof­fres de je ne sais com­bi­en de tonnes dans une des maisons : ils les ont sans doute placés quand la famille est allée manger un kebab au restau­rant d’à côté, et au retour ils n’ont rien remar­qué. Et j’en passe, surtout les écoutes télé­phoniques ren­dues publiques, où Tayyip pani­quant sur l’opéra­tion lancée par les pro­cureurs, dit à son fils « Vas‑y, mets tout l’ar­gent à zéro ». Ils ont dit que c’é­tait des enreg­istrements truqués, mal­gré les rap­ports tech­niques qui dis­aient le con­traire. C’é­tait drôle, dans les bus, dans le métro, des gens comme moi, des gens de tous âges, fai­saient écouter à toute la voiture ces enreg­istrements, en dis­ant « C’est mon devoir de citoyen de vous informer ». Bref, depuis les pro­cureurs ont été mutés et rem­placés, les policiers qui avaient obéi aux ordres des pro­cureurs ont changé de poste. Une fois que toutes les per­son­nes clés ont été bien rem­placées, les sus­pects ont été blan­chis et l’ar­gent mis sous scel­lé, leur a été ren­du. Eh oui. Mais ce n’est pas tout. L’é­tat doit leur pay­er égale­ment, les intérêts sur la péri­ode où cette argent a été blo­qué. C’est à dire, que nous, y com­pris moi, nous payons des intérêts à ces gens. On doit être le seul pays qui paye des intérêts sur des pots de vin. Alors voilà pourquoi tout le monde hurle. Et moi aussi.

Eh ben voilà, aujour­d’hui c’é­tait ma « ma journée off » et j’ai encore trou­vé le moyen de m’én­erv­er. Allez, je vais faire quelques mots croisés.

Votre Mamie

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Mamie Eyan
Chroniqueuse
Ten­dress­es, coups de gueule et révolte ! Bil­lets d’humeur…