Pour les migrants, les frontières sont des murs, des barbelés et des chiens. Elles séparent non seulement géographiquement des peuples, mais trient dans l’humanité ceux qui auraient de par leur situation géopolitique ou climatique le droit à la survie ou non dans le pillage en règle d’une planète fermée.
Causes d’exils et migrations forcées sont donc les deux faces de la même médaille d’une mondialisation qu’il faut bien nommer comme celle d’un système d’exploitation et de pillage des richesses, hier colonial, aujourd’hui politico-financier.
Le 20 juin dernier, Amnesty lançait un appel, pour ce qui était une “Journée mondiale pour les réfugiés”.
Il existe des milliers de raisons d’accueillir des réfugiés. Quelle est la vôtre ? disaient-ils.
Dans le même temps, lors du dernier Conseil européen, des déclarations franco-allemandes rappelaient l’impératif de l’accueil, la durabilité des migrations liées au climat et aux guerres, tout en prenant des mesures de contrôle accrus des frontières européennes. Une politique “sécuritaire” était promise à Calais, face aux appels au secours des associations.
On est en droit de se demander, période électorale passée en France, qu’elle serait la teneur véritable de la réponse aux questions d’Amnesty. Personne pour le moment ne voit un gouvernement prendre le chemin concret de l’accueil par la mise en place de structures et de politiques, en appui sur des campagnes de réhabilitation des réfugiés aux yeux des populations, permettant aux migrants de déployer autonomie et apport partagé de compétences.
Les solutions minuscules au regard des besoins dans différentes métropoles, les politiques “d’hébergement” ailleurs, sont quasi toujours carcérales, sous surveillance ou infantilisantes. L’immense majorité des migrants, demandeurs d’asile ou non, restent dans des situations de rue ou de précarité absolue.
L’humanité appelle à l’aide par la fenêtre !
Pour répondre à la question d’Amnesty, nous nous re-penchons sur une URGENCE, dans un premier temps et, à l’appel de lectrices et lecteurs qui se sont impliqués dans cette urgence, nous publions des “visages de migrants”.
L’urgence d’abord :
Appel à défendre City Plaza, squat de réfugiés à Athènes
Tout d’abord quelques informations qui permettent de comprendre la situation.
Le 17 mai dernier, après une procédure de fait engagée sous couvert du gouvernement Tsipras, mais pas directement, le Procureur a donné l’ordre d’évacuer trois squats à Athènes : City Plaza (hôtel occupé par des réfugiés et des solidaires) et deux autres squats (à Exarchia au 119 rue Zoodochou Pigis “Cat’s spirit / Women’s Squat” et en périphérie d’Athènes à Haidari, “occupation Papoutsadiko”). L’ordre du tribunal laissait quinze jours de délai aux occupants avant l’exécution. Il fut diffusé le 7 juin dans la presse, et d’après CNN grec il s’agit d’un ordre donné à la suite de plaintes déposées par des propriétaires des immeubles en question. Concernant City Plaza et toujours d’après CNN grec il s’agit du deuxième ordre d’évacuation communiqué par le procureur.
Le tout fut largement diffusé par des médias, accompagné par l’information que la propriétaire de City Plaza avait déposé plainte contre l’actuel ministre de Protection du citoyen et le chef de police pour manquement à l’obligation d’exécuter l’ordre du procureur. De toute évidence il y a actuellement une campagne dans plusieurs médias pour faire pression sur le gouvernement afin qu’il fasse évacuer City Plaza.
Une pétition, à l’inverse, s’adresse au gouvernement grec pour qu’il défende City Plaza et tous les squats de réfugiés. Il s’agit de contrer les pressions exercées sur le gouvernement pour qu’il donne l’ordre d’évacuation définitif.
Elle est ici : « The Greek Government : Defend all Refugee Squats.”
A signer et à diffuser le plus largement possible !
D’après un texte récent qui a été publié sur les médias et médias sociaux.
Un article, datant déjà du 9 octobre 2016, dans Regards croisés, vous donnera des éléments sur le fonctionnement du lieu autogéré.
City Plaza est donc maintenant sous menace d’expulsion, et une solidarité nécessaire commence aussi par la poursuite de l’information.
Appel est lancé dans l’immédiat pour envoyer des cartes postales au consulat.
Une signature de pétition (4000 signatures à ce jour) est en cours…
« The Greek Government : Defend all Refugee Squats.”
Les réfugiés continuent de venir en Grèce (mais moins massivement depuis l’accord passé avec la Turquie, et les routes de Macédoine coupées) et restent là, les voies de progression vers l’intérieur de l’Europe étant interdites par d’autres états membres.
Au City Plaza il y a 400 réfugiés dont 190 enfants. Beaucoup de Syriens, souvent Kurdes. Mais il y a aussi des Irakiens, Iraniens et Afghans.
Il y a également des mineurs isolés, mais ils font adulte, tellement ils ont muri sur la route.
Les conditions de vie dans les camps de l’Etat (gérés par les ONG qui acceptent encore) deviennent de plus en plus difficiles chaque jour ; surtout dans les camps “fermés” comme celui de Moria à Mytilene (il y a même eu des morts). L’été qui succède à l’hiver apporte d’autres problèmes, hygiène entre autres.
En avril 2016, 4 organisations d’extrême gauche, dont une anarchosyndicaliste avaient réquisitionné l’hôtel City Plaza, hôtel qui avait été construit pour les Jeux Olympiques, mais qui était vide…
Ils sont allés chercher des familles ou femmes avec enfants dans les camps de rétention gouvernementaux. Parce qu’ils avaient justement constaté les conditions exécrables de survie dans ces camps, et l’absence de libertés.
Rien que pour l’alimentation, le HCR (Haut commissariat aux Réfugiés) délivre des fonds. Mais il les remettent à des entreprises privées. Celles-ci pour le profit, font le minimum vital. Les barquettes alimentaires par exemple, sont stockées aux soleil par mesure d’économie.
Les soutiens des réfugiés, ont fait opérer et analyser des prélèvements. Résultat, c’est un élevage de bactéries…
Un accueil de réfugiés dans City Plaza a donc été organisé. Le lieu est très bien géré. Ils tourne avec des bénévoles, grecs et internationaux. Les bénévoles peuvent également résider sur place.
Depuis 15 mois, 2000 réfugiés ont été hébergés au City Plaza. Il y a un taux de rotation très important de 80%. Ce qui veut dire, qu’après une période où ils se posent, la plupart des réfugiés entrevoit des solutions.
Il n’y a guère d’autres moyens de quitter la Grèce que par avion. Et pour cela il faut des démarches, des papiers…
Toute cette organisation se fait sans 1 centime. Le HCR donne 17 euros par jour, pour chaque réfugié. Multiplié par le nombre de réfugiés, cela fait de grosses sommes. Au City Plaza tout se fait par dons, par solidarité. Des dons arrivent de l’Europe, les achats se font sur place. Et les formes d’auto-gérance des résidents fonctionnent.
Il y a des activités organisées. Comme des cours d’anglais, ou d’allemand, pour celles et ceux qui veulent aller dans ces pays, pour qu’en attendant ils avancent. Pour les enfants, des salles de jeux sont installées. Il y a des activités de loisir. Parfois il y a des plus gros projets. Par exemple un chorégraphe grec a enseigné la danse classique aux réfugiés. Quand ils ont fait leur présentation sur une place à Ahènes, le spectacle a été transmis jusqu’à New York.
Le gouvernement fait un effort pour rendre “le problème” invisible. Un problème qui n’existe pas, en réalité, avec les personnes, mais qui concerne la manière de gérer les gens/ les camps/ l’argent de la Haute Commissariat de l’ONU etc.… La police a déjà évacué des squats autogérés en Thessalonique, en utilisant comme prétexte les voisins qui “avaient peur pour les pauvres réfugiés qui vivaient dans des ruines” dont l’Église était une des propriétaires. Ils ont évacué aussi le camp d’Elliniko.
La cible prochaine semble être le City Plaza, et peut être les autres squats d’Athènes.
Apparemment, l’Etat se prépare (et ils préparent les “opinions publiques”) pour l’évacuation des migrants. Les soutiens sur place ont peu de moyens, matériels ou en énergies disponibles, pour les soutenir. Le moral est au plus bas, les camarades qui sont plus impliqués sont épuisés après 14 mois de lutte sans discontinuer. Il n’y a plus, après 2 ans, cette énorme vague de solidarité populaire qui existait et, – pour être réaliste – l’été est toujours l’époque favorable pour l’Etat pour effectuer des évacuations (les universités sont fermées, les gens qui travaillent sont en vacances.)
Evidemment, les soutiens ne céderont pas. Il ne s’agit pas seulement de défendre l’expérimentation d’autogestion ou pour la cellule de la solidarité internationale au cœur de la ville leur lieu, mais aussi de protéger 400 personnes qui, malgré tous leurs problèmes, vivent maintenant une vie digne.
Vous pouvez suivre City Plaza sur le web sur le site Internet (en grec et en anglais) et sur la page Facebook (en anglais, parfois il y a aussi de textes en français).
Encore une fois, merci !
Notre force, et notre langue commune est la solidarité !