L’al­liance dite “République”, celle de la big­o­terie islamique, de l’ul­tra nation­al­isme guer­ri­er, autour d’un Reis libéral ottoman, rem­porte plus de la moitié des sou­tiens d’électeurs/trices en Turquie, aux élec­tions locales, avec près de 52% (chiffres gou­verne­men­taux provisoires).

Ces chiffres à 21h00 heure française sont étab­lis à par­tir de 75% des résul­tats dépouil­lés, et peu­vent encore vari­er en % et non en ten­dance globale.

L’al­liance dite “de la Nation” reste à peine à 40%, avec pour le CHP, le ren­fort bien­venu du “Bon Par­ti”,  plus nation­al­iste que lui, qui retrou­ve son score des Prési­den­tielles de 2018.

Les résul­tats glob­al­isés en pour­cent­age, juste­ment, se calquent qua­si sur ceux de la prési­den­tielle de 2018.

La seule option démoc­ra­tique et non nation­al­iste de ces élec­tions, le HDP, voit son score nation­al s’ef­frit­er, à la fois du fait des jeux d’al­liances et de retraits, d’ab­sence de can­di­dats partout, qui ren­dent son score peu lis­i­ble, mais surtout parce que la fraude mas­sive l’a con­cerné et frap­pé au pre­mier chef, dans les régions où il béné­fi­cie du plus grand sou­tien. Il rem­porte pour­tant des vic­toires locales que le régime va s’empresser de com­bat­tre demain. Sa cam­pagne, qui s’est déroulée davan­tage pour soutenir les mil­i­tants con­tre la répres­sion d’E­tat qu’à con­va­in­cre des électeurs/trices, a été réduite à min­i­ma, en dehors des fêtes de célébra­tion du Newroz. Adossé aux sou­tiens des grévistes de la faim dans les pris­ons, Sela­hat­tin Demir­taş en geôle, le par­ti est loin du bon en avant du post Gezi de 2013, qui lui don­na sa con­sis­tance large, et accom­pa­gna sa nais­sance. Les résul­tats au final per­me­t­tront toute­fois de con­stater, comme à Kars par exem­ple, que le HDP a été en mesure de con­quérir aus­si et qu’il fait presque 13% sur des can­di­dats d’Istanbul…
On peut soulign­er donc, que mal­gré répres­sion et fraudes, men­aces et manip­u­la­tions, les pop­u­la­tions des régions de Turquie à majorité kurde restent soudées et ont élu majori­taire­ment leurs représen­tantEs con­tre vents et marées…

C’est une défaite per­son­nelle pour Erdogan.

Entre autres villes tenues et déci­sives pour le HDP, où pour­tant la répres­sion fut féroce : Van, Mardin, Amed (Diyarbakır)…

La sur­prise viendrait de l’élec­tion dans la cap­i­tale Ankara où le CHP en coali­tion l’emporterait, de justesse, à confirmer.

Pour Istan­bul, Erdo­gan en per­son­ne avait fait d’une vic­toire écras­ante un enjeu per­son­nel. L’al­liance de son camp l’emporterait, selon des chiffres gou­verne­men­taux, tou­jours à véri­fi­er avec le résul­tat final, mais sans aucun panache. Le plébiscite espéré pour les grands pro­jets et le ray­on­nement néo-ottoman de la Turquie de 2023, à par­tir d’Is­tan­bul, n’est pas pour aujour­d’hui. C’est le seul sus­pens encore de la soirée électorale.

Selon ces mêmes infor­ma­tions du régime, sur les 30 métrop­o­les impor­tantes de Turquie, l’AKP en obtiendrait 16, le CHP 10, le MHP ultra nation­al­iste 1, le HDP 3.

Par­ler des tricheries du jour mérit­erait un autre arti­cle. A Malatya, où des nervis ont fait feu dans un bureau de vote, l’AKP fait 68% par exemple…

A remar­quer les résul­tats cli­vants qui ressor­tent des scores pour les “Assem­blées provin­ciales”, où le nation­al­isme et l’ul­tra nation­al­isme amè­nent les par­ti­sans du régime con­fon­dus à près de 60 %, le HDP, là, retrou­vant qua­si son score de la Prési­den­tielle dernier.

Là les résul­tats pour les 51 provinces impor­tantes sont CHP 3, MHP, 1, AKP 41 et HDP 7. Le HDP l’au­rait rem­porté dans 7 villes et 54 districts.

En dehors de ces résul­tats qui étaient atten­dus, avec la marge de fraude, et une cam­pagne nationale au pas de charge d’Er­do­gan, les grands traits car­ac­téris­tiques de la sit­u­a­tion des rap­ports de force en Turquie saut­ent aux yeux.

La force pop­uliste d’un Erdo­gan, avec ses trois piliers, l’un big­ot religieux, l’autre ultra-nation­al­iste, le troisième garant de la cor­rup­tion d’une économie libérale, est encour­agée par plus de la moitié des pop­u­la­tions, soit 25 mil­lions de per­son­nes env­i­ron. Voilà des félic­i­ta­tions qui devraient lui par­venir de “parte­naires européens”, bien­tôt en compétition.

Si on tente de regarder davan­tage du côté du verre à moitié plein, force est de con­stater que dans cette moitié, près d’un tiers applaud­is­sent tou­jours cepen­dant le roman nation­al­iste de la turcité. Ain­si, les 2/3 de la Turquie restent dis­posés à con­forter toutes les guer­res nationales.

Et c’est juste­ment un enjeu de ces après élections.

Le Prési­dent Erdo­gan a, dans un dernier dis­cours pré-élec­toral, réitéré ses men­aces sur le Nord syrien. Il a claire­ment énon­cé que la Turquie règlerait rapi­de­ment le prob­lème du “couloir de l’E­uphrate” par une inter­ven­tion uni­latérale. “Le prob­lème ne se règlera pas autour d’une table”. On peut enlever la part du dis­cours à voca­tion élec­toral­iste, et met­tre cepen­dant ces pro­pos en rap­port avec les 83 deman­des de lev­ée d’im­mu­nité par­lemen­taire d’une quar­an­taine de députés du HDP et trois du CHP, dont la grande fig­ure du parti.

Erdo­gan compte sur ces résul­tats élec­toraux, même s’ils ne révè­lent pas une pro­gres­sion irré­sistible de son influ­ence, pour se pass­er des tra­casseries géopoli­tiques avec la Russie, et prof­iter des ter­giver­sa­tions améri­caines et européennes pour met­tre ses men­aces à exé­cu­tion. Il compte surtout exercer une pres­sion sup­plé­men­taire pour obtenir des gages ter­ri­to­ri­aux et un rôle clé dans la crise d’après Daesh dans les camps de réfugiés, face à l’in­er­tie inter­na­tionale. Cela a marché avec les réfugiés syriens et l’Eu­rope non ?

S’il est bien évi­dent qu’Er­do­gan n’a que faire des pro­jets de “Con­sti­tu­tion syri­enne” avancés par la Russie, ses vel­léités ter­ri­to­ri­ales au Nord pèseront sur des rap­proche­ments et un ren­force­ment du régime syrien, con­tra­dic­toire­ment. La guerre d’Er­do­gan con­tre le PYD le pousse dans les bras de son enne­mi d’hi­er et servi­rait donc sa démon­stra­tion politique.

Et le résul­tat glob­al de ces élec­tions, qui met en lumière le nation­al­isme turc à fleur de peau, est un pousse à la guerre, une fois de plus.

Même si ces élec­tions passées pro­posent un répit, on imag­ine mal dans les pri­or­ités d’un Erdo­gan, changeant soudain son fusil d’é­paule, une propo­si­tion d’ “union nationale” en interne, pour résoudre la crise économique, en aban­don­nant les aven­tures guer­rières extérieures.

La Syrie ressor­ti­ra des urnes, inévitablement.

Ha oui, n’ou­blions pas de dire que dans cette Turquie éter­nelle, sur 8257 élus, seules 652 seront des femmes. Un bel élan !

1er avril — 1 hoo du matin — Il sem­blerait qu’Er­do­gan aurait recon­nu une défaite à Istan­bul dans son dis­cours post-élec­toral en dis­ant “je leur souhaite bien du plaisir”.… à peine 30 000 manquantes…à suiv­re donc, ce rebondisse­ment qui ne man­quera d’avoir une portée politique.


Vous pouvez utiliser, partager les articles et les traductions de Kedistan en précisant la source et en ajoutant un lien afin de respecter le travail des auteur(e)s et traductrices/teurs. Merci.
Kedistan’ın tüm yayınlarını, yazar ve çevirmenlerin emeğine saygı göstererek, kaynak ve link vererek paylaşabilirisiniz. Teşekkürler.
Ji kerema xwere dema hun nivîsên Kedistanê parve dikin, ji bo rêzgirtina maf û keda nivîskar û wergêr, lînk û navê malperê wek çavkanî diyar bikin. Spas.
You may use and share Kedistan’s articles and translations, specifying the source and adding a link in order to respect the writer(s) and translator(s) work. Thank you.
Por respeto hacia la labor de las autoras y traductoras, puedes utilizar y compartir los artículos y las traducciones de Kedistan citando la fuente y añadiendo el enlace. Gracias.
Daniel Fleury on FacebookDaniel Fleury on Twitter
Daniel Fleury
REDACTION | Auteur
Let­tres mod­ernes à l’Université de Tours. Gros mots poli­tiques… Coups d’oeil politiques…