Elle joue à Mamie Eyan diriez-vous, en lisant ce bil­let d’humeur. Mais voilà, une vidéo de l’INA a tra­ver­sé mon écran, m’a pro­jetée un demi siè­cle en arrière, et je ne peux que la partager.

La petite fille que je fus, était curieuse, obser­va­trice et “sage” dans tous les sens du terme. Elle décou­vrait plein de choses dans les pages des livres, par­ti­c­ulière­ment Tout l’Univers, elle suiv­ait ce qui se pas­sait dans le monde par les jour­naux et la télé, encore dans ses bal­bu­tiements, et même si elle ne com­pre­nait pas tout, buvait des yeux, la vie qui l’entourait.

Je me sou­viens que je voy­ais déjà très bien que le monde ne tour­nait pas rond…

J’étais sub­juguée par la l’évolution tech­nologique qui ne dessi­nait pour­tant que le début de sa courbe exponentielle.

Je rêvais de l’espace, de mar­tiens, de remèdes mir­a­cles con­tre les mal­adies, d’apprentissage de savoirs en une nuit et que sais-je encore…

Je m’attristais de voir injus­tices, iné­gal­ités, vio­lences, atroc­ités dans les qua­tre coins du monde, et encore plus proche, dans mon univers d’enfant…

Je m’émerveillais en même temps, de la beauté, de l’art, de la musique, et je m’étonnais des êtres humains qui étaient autant capa­bles de pro­duire ce noir douloureux et visqueux que de faire jail­lir couleurs, lumière et beauté…

Bien sûr, je n’arrivais pas à met­tre ces mots que vous venez de lire sur ces ressen­tis… Je dis­ais sans cesse “Mais, je vais grandir”.

Dans cette phrase pleine d’espoir, tournée vers le futur, se nichait toute une rib­am­belle de choses. Je me sou­viens de cha­cune comme si c’é­tait hier. “Mais, je vais grandir”… Je vous invite à lire entre les mots : “Je suis petite, je vais grandir. La vie s’étend devant moi. Dans tout cet espace de temps, l’humanité dont je fais par­tie, telle une graine de sable, grandi­ra, lui aus­si”. Enten­dez, “Je vais grandir, avoir de l’expérience de vie, appren­dre. Pen­dant que j’arpenterai mon chemin, l’humanité avancera, elle aus­si”.

Avancer ; un mot, qui pour moi, encore aujourd’hui, porte en son sein, le posi­tif. Aller, approcher, gag­n­er du ter­rain, pro­gress­er vers quelque chose d’idéal. Je sais pour­tant aujourd’hui, que le grand tableau de l’idéal est extrême­ment sub­jec­tif. Mais revenons donc à la petite fille qui pen­sait en d’autres mots, que l’humanité, en “avançant” dans le temps, avancerait aus­si dans la sagesse. Je voy­ais un monde futur débar­rassé de ses haines, de ses igno­rances, de tous ses maux. Plus de guer­res, ni vio­lences, famines, mal­adies. Et une human­ité ayant le bon sens, la tolérance, l’égalité, le savoir, le partage, la sol­i­dar­ité, belle et col­orée de tous les pinceaux de la mix­ité, por­tant l’amour de l’autre et de tous les vivants, trou­vant sa place dans la nature avec respect. Un human­ité grandie, comme moi qui allait grandir…

Il n’est sans doute pas utile de vous décrire, la claque qu’a reçue cette petite fille que je garde tou­jours dans mon ven­tre de femme depuis un demi siè­cle… La claque fut puis­sante et lente. Ce fut douloureux. Mais, la soif, la volon­té, l’entêtement, et l’espoir tou­jours présents, peu­vent être puis­sants aus­si. Les pen­sées et espoirs de la petite fille que je fus, sont désor­mais des sou­venirs, sans oubli­er que ses ressen­tis et rêves ont ani­mé, for­mé l’adulte que je suis dev­enue. Je n’ai aucun doute que les étoiles de son coeur bril­lent dans d’autres cœurs d’enfants aujourd’hui. Si, en tant qu’adulte je reste fidèle à elle, et me laisse volon­tiers à ses rêves, c’est parce que je pense avec toute la bien­veil­lance que je peux avoir, à mon mod­este niveau de grain de sable, au futur des jeunes générations.

Je voudrais deman­der aux enfants d’aujourd’hui, com­ment eux, elles, imag­i­nent leur futur. Je suis cer­taine que leurs répons­es seraient réal­istes mais débor­dantes d’espoir.

Et pour revenir au titre de cette chronique, com­ment le Reis en Turquie peut-il à ce point con­fis­quer les rêves d’en­fants et leur pré­par­er la pire des nuits sans songes ?


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Naz Oke
REDACTION | Journaliste 
Chat de gout­tière sans fron­tières. Jour­nal­isme à l’U­ni­ver­sité de Mar­mara. Archi­tec­ture à l’U­ni­ver­sité de Mimar Sinan, Istanbul.