Une marche était organ­isée ces jours derniers.

Les pop­u­la­tions aux alen­tours des quartiers et villes assiégées se mobilisent pour la lev­ée des “sièges” et l’ar­rêt des bom­barde­ments et exac­tions armées. Familles, amis, mais surtout habi­tants sol­idaires avaient décidé de par­tir ensem­ble, et de marcher vers Cizre et Silopi. Con­traints dans un pre­mier temps de rebrouss­er chemin, ils ont pris des itinéraires dif­férents et se sont retrou­vés face aux forces de répression.

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Des man­i­fes­ta­tions ont aus­si été dis­per­sées ailleurs à Diyarbakır.

A l’échelle de la Turquie, le sou­tien est très loin d’être à la hau­teur de ce qui se déroule. Le venin “nation­al­iste” dis­til­lé par le gou­verne­ment AKP et sa presse, fait telle­ment écho avec le “Turquie une et indi­vis­i­ble” des kémal­istes de tou­jours, que tout est pos­si­ble. Toutes les ques­tions sont ouvertes sur la nature de cer­tains groupes “mil­i­taires” qui agis­sent sur place et ter­rorisent les pop­u­la­tions, occu­pant les écoles, les maisons, tuant des civils, hommes, femmes ou enfants sous pré­texte “ter­ror­iste”. Le vocab­u­laire “géno­cidaire” employé, les méth­odes, font crain­dre le pire.  Le bilan dépasse déjà les 120 morts depuis quelques jours. Et ce décompte ne peut être fait réelle­ment, l’ar­mée bouclant l’in­for­ma­tion dans les quartiers où elle opère.

Que les pop­u­la­tions, par cette marche dés­espérée, veuil­lent mon­tr­er au monde leur isole­ment et pour­tant leur volon­té de paix peut paraître dérisoire. Que des jeunes, dans les quartiers, puis­sent résis­ter à une force armée dont les méth­odes sont dis­pro­por­tion­nées, ques­tionne sur les inten­tions réelles d’Er­do­gan et l’u­til­i­sa­tion poli­tique interne qu’il con­tin­ue à faire de cette “guerre con­tre les civils”. On est aus­si en droit de s’in­ter­roger sur les débats qui tra­versent prob­a­ble­ment les direc­tions poli­tiques et mil­i­taires du PKK d’un côté et du front démoc­ra­tique d’hier.

La divi­sion poli­tique gran­dis­sante du Pays tout entier, l’af­faib­lisse­ment de l’au­di­ence des par­tis démoc­ra­tiques, l’ef­fon­drement du mou­ve­ment anti guerre d’a­vant élec­tions, le repli “nation­al­iste” légal­iste du par­ti kémal­iste d’un côté, et la qua­si “carte blanche” don­née à l’ar­mée et aux forces de répres­sion peu­vent bas­culer dans un déra­page “géno­cidaire” à tous moments.

Et cha­cun peut se pré­par­er à des “images” d’hor­reur et de désas­tre, dans les semaines qui vien­nent, ana­logues à celles qui cir­cu­lent sur la Syrie.

Que faire ? Ici en France, c’est bien la ques­tion qui se pose. Dans un con­texte poli­tique pour­ri où la soit dis­ant gauche emprunte son vocab­u­laire à la droite extrême, et où l’at­ten­tion est polar­isée elle aus­si sur la peur du “ter­ror­isme” et le “néces­saire état d’ur­gence”, il est dif­fi­cile de sen­si­bilis­er large­ment sur ces “con­trées exo­tiques et basanées”.

Çà et là, des rassem­ble­ments de sol­i­dar­ité s’or­gan­isent à l’ini­tia­tive d’as­so­ci­a­tions kur­des. Tant qu’au­cune parole forte, capa­ble de bris­er le silence entretenu, ne se fera enten­dre, nous serons réduits au rôle d’in­for­ma­tion et de spec­ta­teurs de mas­sacres annon­cés, pris­on­niers que nous sommes, non de la cen­sure, mais du mur médi­a­tique et des “actu­al­ités politi­ci­ennes” à deux balles.

La marche pour l’or­gan­i­sa­tion con­séquente d’un sou­tien européen sera dif­fi­cile, mais Kedis­tan avec beau­coup d’autres sites amis, s’en fera l’é­cho et y par­ticipera en ouvrant son site à toutes les ini­tia­tives qui iraient en ce sens.

Kur­dish peo­ple deter­mined to march to Cizre and Silopi

Thou­sands of kur­dish peo­ple gath­ered from Şır­nak its dis­tricts have ear­li­er today start­ed a march towards Cizre and Silopi, both of which remain under a siege and onslaught by state forces.HDP deputies and co-may­ors of DBP held munic­i­pal­i­ties are among the thou­sands that have faced numer­ous obsta­cles and attacks by police and mil­i­tary forces on their way.

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La marche se pour­suit aujour­d’hui. Il y aurait env­i­ron 2000 per­son­nes, affrontant les “gaz” et les balles réelles des forces de répression.

Selon le jour­nal Cumhuriyet, aujour­d’hui, dans le même temps à Cizre l’ar­mée tire au canon et le nom­bre de morts et de blessés ne cesse de croître.

Sokağa çık­ma yasağının sürdüğü ve operasy­on­ların devam ettiği Cizre İlçes­i’ne git­mek üzere yola çıkan 2000 kişinin güven­lik kuvvet­lerinin gazları­na ve kurşunlarına rağ­men yürüyüşü devam ediy­or. Aynı zaman­da Cizre’de de durum kri­tik. HDP Şır­nak vek­ili Faysal Sarıyıldız güven­lik güç­lerinin top atışı yap­tığını söyley­erek, çok sayı­da ölü ve yaralı olduğunu bildirdi.

Le tweet du député Faysal Sarıyıldız sur place :

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- Il y a plusieurs morts et blessés graves à Cizre, nous ne pou­vons pas les trans­fér­er à l’hôpi­tal.
— A Cizre (quarti­er) Yafes, 20 civils sont coincés dans le sous-sol de l’im­meu­ble dont les étages sont en feu, suite à une incendie provo­qué par les tirs au canon.

Et les pho­togra­phies de Fatih Pinar


 

Ajout jeudi soir à 18h

Le pho­tographe Fatih Pınar nous informe :
La marche a été empêchée par les forces de sécu­rité. Les sou­tiens ont été oblig­és de faire demi tour…”

La ver­ité de ce qui se passe sur place à Cizre, n’est pas encore pour demain…

Notre chroniqueuse d’Is­tan­bul, Mamie Eyan, nous informe égale­ment, que les chaînes de télé n’en dis­ent pas un mot, ni de la marche, ni de Cizre, mais passent leur temps à dis­tribuer des injures con­tre Demir­taş, le Co-Prési­dent du HDP, qui s’est ren­du en Russie, actuelle­ment enne­mi numéro un de la Turquie, mal­gré le fait qu’il s’ag­it vis­i­ble­ment d’un voy­age prévu de long date.” 

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