Après les élec­tions du 1er novem­bre l’AKP attaque au Par­lement avec une reforme pour les fonc­tion­naires. Ca com­mence bien.

L’AKP ren­for­cé de la majorité qu’il a obtenu lors des élec­tions, prévoit des change­ments rad­i­caux dans la loi. Si cette réforme con­cer­nant la Loi n° 657 du 14 juil­let 1965 sur la fonc­tion publique [Memu­run Muhake­mat Kanunu] passe, la dif­férence entre « tra­vailleur  » et « fonc­tion­naire » sera sup­primée, tous les employés seront réu­ni sous l’appellation « salarié », empor­tant avec elle, la sécu­rité du tra­vail et de l’emploi pour les fonctionnaires.

Cette volon­té exprimée de nom­breuses fois par le Prési­dent de République en per­son­ne, provoque la réac­tion des syn­di­cats. Par ailleurs, le statut « fonc­tion­naire » étant stip­ulé dans la Con­sti­tu­tion, cette réforme néces­site égale­ment un change­ment  constitutionnel.

En 2014, un pack de  lois, pro­po­sait déjà de réor­gan­is­er les droits con­cer­nant les hauts cadres tels que les respon­s­ables de bureaux, directeurs, et les forces de sécu­rité, la police comme la gen­darmerie. Selon cette réforme les fonc­tion­naires con­cernés, en cas de muta­tion ou retrait de fonc­tion jugés abusifs, ne pou­vaient plus réin­té­gr­er leur ancien postes, même si la jus­tice leur don­nait rai­son à postéri­ori. De plus, les délais de l’application de la déci­sion de jus­tice, devaient être pro­longés à 2 ans à la place d’un mois. Par ailleurs, en cas de non appli­ca­tion de la déci­sion de jus­tice, aucune enquête, ni démarch­es pénales ne pou­vaient être demandées con­tre les respon­s­ables qui refuseraient d’obtempérer à la déci­sion judiciaire.

Suite à la demande des députés du CHP ce pack de lois avait été donc refusé par le Tri­bunal Con­sti­tu­tion­nel et l’AKP n’avait  pas pu aller jusqu’au bout de son projet.

Mais vis­i­ble­ment l’ambition de met­tre les fonc­tion­naires à genoux ani­me tou­jours l’AKP.

C’est à peine une sur­prise, car Erdoğan et Davu­to­glu remet­taient déjà le sujet sur la table à la veille des élections.

Erdoğan reve­nait lors d’un dis­cours, sur Fethul­lah Gülen, ancien imam, leader mys­tique de la « Com­mu­nauté », devenu depuis 2013 son enne­mi numéro :

« L’organisation par­al­lèle a infil­tré l’Etat comme un virus »

et ajoutait :

« Il y en a dans les ren­seigne­ments, à la fois de la police et le ren­seigne­ment nation­al, égale­ment notre armée… Ceux-là, ils sont partout. Et ils con­tin­u­ent à avoir une com­mu­ni­ca­tion sérieuse. Les min­istères… Ils sont dans pra­tique­ment tous les min­istères. Il est impos­si­ble de net­toy­er ceux-là de A à Z. Tant que la 657 n’est pas changée, ce ne sera pas résolu. Dès que la 657, c’est à dire, La Loi des Fonc­tion­naires chang­era, un nou­veau sys­tème pour­ra être enfin installé.”

Il fal­lait bien que le Pre­mier Minin­istre Davu­toğlu en par­le à son tour… Il pré­ci­sait alors :

«  Une fois que les gens sont embauchés, ils veu­lent être, du début jusqu’à leur retraite, sous la sécu­rité de l’Etat, et touch­er leur salaire, même quand il ne tra­vail­lent pas » 

Et com­para­it le cas de fig­ure avec le secteur privé, tou­jours dans son style caractéristique :

Un homme d’affaires qui pense que son employé ne tra­vaille pas, peut le rem­plac­er par un autre avec lequel il souhaite travailler.

Davu­toğlu soulig­nait qu’un fonc­tion­naire ou une bureau­cratie peu­vent être con­cernés par cer­taines garanties juridiques de l’Etat mais qu’il ne faut pas que cela inter­fère sur les per­for­mances.  « C’est à un tel point que, toutes les déci­sions revi­en­nent au Con­seil d’Etat, quelque soit le délit du fonc­tion­naire. Je dis, en tant que Pre­mier Min­istre, je vous observe depuis plus d’un an, quand il y a des erreurs, c’est moi qui donne des comptes, pas vous. Alors, à par­tir du 2 novem­bre quand nous for­merons un gou­verne­ment inchal­lah, si je dis je vois tels bureau­crates en suc­cès, je souhaite qu’ils con­tin­u­ent, mais tels autres qui ne réus­sis­sent pas, on va les laiss­er se repos­er un moment ou bien les affecter ailleurs, tous ces derniers iront au Con­seil d’Etat. 

Dans cette époque où l’organisation par­al­lèle est active, les fonc­tion­naires vont au Con­seil d’Etat pour le moin­dre change­ment et revi­en­nent avec une déci­sion prise instantanément. 

Nous devons penser à un sys­tème de per­for­mance basé sur le principe du mérite, plus com­pé­tent et plus act­if. Nous pou­vons recon­sid­ér­er la 657 avec ces perspectives.”

Davu­toğlu qual­i­fie ce mod­èle de tra­vail des fonc­tion­naires, de « tra­vail sou­ple ».

Il est évi­dent que la sou­p­lesse dans cette déf­i­ni­tion, est une qual­ité cap­i­tale de l’obéis­sance, néces­saire pour courber l’é­chine et se met­tre à genoux.    

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Naz Oke
REDACTION | Journaliste 
Chat de gout­tière sans fron­tières. Jour­nal­isme à l’U­ni­ver­sité de Mar­mara. Archi­tec­ture à l’U­ni­ver­sité de Mimar Sinan, Istanbul.