Les élections législatives, malgré la guerre qui se mène contre les civils dans une bonne partie des régions à majorité kurde, les couvres feux instaurés d’une ville à l’autre, les zones de “sécurité renforcée”, les projets de déplacer des bureaux de vote, les crimes de guerre enregistrés jour après jour, se dérouleront le 1er novembre en Turquie.
Et le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) a fait savoir par la bouche d’un de ses représentants en exil, Bese Hozat, qu’il décrétait la suspension des “hostilités” jusqu’à la date du scrutin, de façon unilatérale. La mesure a été adoptée et sera annoncée officiellement le 11 octobre et prendra effet sur le principe à partir du 15 .
“Cela n’exclura pas la possibilité d’auto défense des populations ou de riposte en cas d’attaque directe de combattants”, a rappelé le responsable politique.
Cette décision était attendue, et pourra laisser au HDP la possibilité de développer une campagne sur le thème de la “paix civile”, qu’il a déjà largement commencée, et démontrer qu’il a sur cette question un large soutien populaire.
On ne peut guère à l’inverse espérer une “trêve” du côté des forces de répression d’Etat, ni des forces armées et unités spéciales. Ces élections sont donc ouvertes sous la menace et si la constitutionnalité de celles-ci n’est pas à remettre en cause, le déroulement sera probablement chaotique, malgré la présence d’observateurs “tiers” demandée par le HDP entre autres.
Les bureaux de vote à l’étranger seront ouverts dans les consulats, du 8 octobre au 25 octobre
Cela semblera à certainEs une prise de position peu “élections piège à cons” que d’appeler les amis turques et kurdes ici à voter. Mais, comme lors d’élections en Grèce, dans un moment où il était possible de pousser un processus politique favorable, ou de soutenir une dynamique de référendum, cette séquence électorale turque est de la plus haute importance. Elle peut, si elle redonne à ce parti le nombre de députés du dernier scrutin (13,1%) et davantage, réouvrir un possible en Turquie. Rappelons que le HDP est un parti d’opposition démocratique qui cristallise à la fois les luttes et mobilisations passées, la lutte des minorités et au premier chef celle des Kurdes, et que le sujet n’est pas la nature réformiste de ce parti, mais les forces qui le soutiennent. Il y a urgence en Turquie à bloquer Erdogan et l’AKP.
Personne n’a d’illusion sur ce que sera la réaction des bigots obscurantistes (et néo libéraux) et des ultra nationalistes. Mais si un fort courant s’exprime, même dans les urnes, à la fois contre ce gouvernement et contre la guerre, empêchant la formation d’un nouveau gouvernement AKP, l’opposition ne pourra qu’être renforcée et encouragée à poursuivre. Ces élections peuvent jouer un rôle de catalyseur, et contraindre à des recompositions politiques dans le contexte de “drôle de guerre”. Sauf à penser que les libéraux kémalistes ont des envies de suicide, on peut voir un possible gouvernement de “paix civile” sortir de cette séquence politique turque. Même si cet espoir est ténu, ne pas l’encourager serait développer un fatalisme totalement à côté des attentes des populations.
Les déplacements criards du “Calife” en Europe, qui a appelé au vote pour le “vieux rêve Ottoman” et “l’unité nationale contre le terrorisme” montre bien que chaque voix va compter, et qu’ils le savent bien.
Et si les élections ne changeront rien en soi, elles ouvriront une nouvelle séquence politique ou marqueront la continuité de la dérive vers le chaos et le pouvoir absolu.