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Sara Kaya, native de Nusay­bin, femme kurde, fémin­iste, élue du peu­ple, avait tous les défauts pour déplaire au régime turc… Con­damnée à 16 ans de prison, elle fait par­tie des “otages poli­tiques” qui rem­plis­sent les pris­ons en Turquie.

Sara est née en 1970 à Nusay­bin, elle y a gran­di, et fait ses études pri­maires et sec­ondaires. Elle est diplômée en ingénierie de la con­struc­tion de l’U­ni­ver­sité Dicle de Diyarbakır, et égale­ment en Admin­is­tra­tion des affaires de l’U­ni­ver­sité Anadolu d’Eskişe­hir. Elle est aus­si mère de 4 enfants. Sara a tra­vail­lé durant 19 ans à la munic­i­pal­ité de Nusay­bin, où elle a endossé pen­dant de longues années le rôle de porte-parole du syn­di­cat des tra­vailleurs de la municipalité.

Lors des élec­tions locales de 2014, elle sera élue co-mairesse de sa ville, représen­tant le Par­ti de la paix et de la démoc­ra­tie (BDP) avec un total de 36.697 voix et un score de 78,8 %. Son man­dat sera mar­qué par la déc­la­ra­tion d’au­to­ges­tion et les cou­vre-feux sub­séquents à Nusaybin.

Sara fut donc arrêtée le 28 août 2015 pour avoir annon­cé que la ville se gou­vern­erait elle-même… Dans la même année en sep­tem­bre, elle fut trans­férée de la prison de Mardin vers la prison de Sin­can à Ankara, à 1100 km de dis­tance… Elle fait donc par­tie de ces femmes et hommes déterminé.e.s, que le régime essaye bris­er par tous les moyens, donc aus­si par l’isole­ment, l’éloigne­ment du lieu de vie et des familles : les dépor­ta­tions for­cées nom­més par les prisonnier.e.s comme “trans­ferts d’ex­il”, sont fréquem­ment pra­tiquées en Turquie.

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Dépor­ta­tions de pris­on­niers, la pra­tique courante en Turquie

En novem­bre 2015, en atten­dant son procès, ou elle est jugée avec une demande d’une peine d’emprisonnement à per­pé­tu­ité, Sara retrou­ve une lib­erté con­di­tion­nelle qui sera de courte durée. En sep­tem­bre 2016, elle sera déchue de son poste de mairesse, puis le 13 jan­vi­er 2017, arrêtée lors d’un raid à son domi­cile et elle retour­na à la prison de Mardin.

Un mois plus tard, le 17 févri­er 2017, elle est trans­férée, cette fois à la prison de Van. Et, le 23 décem­bre 2019, à nou­veau déportée vers une prison de mau­vaise répu­ta­tion, celle de Tarse, à Mersin, à 650 km de sa ville…

Durant plus de trois ans de déten­tion pro­vi­soire, elle est ren­voyée, comme comme d’ailleurs de nom­breuses autres per­son­nes, d’une prison à l’autre. Faut-il pré­cis­er que son procès lui, se pour­suit devant le Tri­bunal de Mardin. Sara est donc oblig­ée de se défendre à dis­tance, par visio­con­férence, dis­crim­i­na­tion sup­plé­men­taire con­traire aux droits de la défense. 

C’est dans ces con­di­tions que se tient la dernière audi­ence de son procès, le 22 juin 2020, devant la cour crim­inelle de Mardin. Sara fut con­damnée à 16 ans de prison pour “vio­la­tion de l’u­nité de l’E­tat et de l’u­nité du pays” et “appar­te­nance à une organ­i­sa­tion ter­ror­iste”.

Ce même jour, Ümit Dede, Co-Vice-Prési­dent de la Com­mis­sion du Droit et des droits humain du HDP, déclarait : “Comme on le sait, après les élec­tions locales du 30 mars 2014, dans une démarche de géno­cide poli­tique, des enquêtes et des pour­suites imag­i­naires ont été lancées à plusieurs repris­es con­tre des maires et des mem­bres de con­seils du HDP. 93 maires du DBP ont été arrêtés, 84 munic­i­pal­ités se sont retrou­vées sous l’ad­min­is­tra­tion de tuteurs nom­més par l’E­tat. A nou­veau, depuis les élec­tions du 31 mars 2019, 45 munic­i­pal­ités du HDP ont été mis sous l’ad­min­is­tra­tion des tuteurs et 22 de nos co-maires ont été arrêté.e.s.
Le dossier dans lequel Sara Kaya a été con­damnée a égale­ment été pré­paré par la main d’Ü­nal Uyar, le super­viseur de la branche de Nusay­bin de TEM de l’époque, qui est d’ailleurs actuelle­ment incar­céré, accusé de tor­tures et pil­lages. Ce dossier comme d’autres est rem­pli d’al­lé­ga­tions inven­tées, et de preuves fab­riquées de toutes pièces.
Il est clair que la rai­son pour laque­lle le pou­voir judi­ci­aire, gâchette du pou­voir, arrête et con­damne lour­de­ment, avec grandes colère et haine, les co-mairess­es, est le rôle des femmes dans le HDP, et la pra­tique des co-maires.
Nous n’ac­cep­tons pas cette déci­sion illé­gale et sans scrupules prise pour Sara Kaya, et nous appelons le gou­verne­ment et le pou­voir judi­ci­aire à respecter la démoc­ra­tie et la volon­té du peu­ple. Ceux qui pensent pou­voir intimider les hommes et femmes poli­tiques du HDP par des arresta­tions et des con­damna­tions per­dront un jour.”

Le 9 mars 2018, Sara Kaya fut par­rainée en France par la Mairie de Vit­ry. Mais les sou­tiens se font atten­dre, et Sara, sans pro­tec­tion, voit peu à peu son sort oublié. Et bien que nous savons qu’ils/elles sont des mil­liers dans la même sit­u­a­tion, nous savons aus­si par expéri­ence que soutenir des mil­i­tantes de la trempe de Sara Kaya, c’est soutenir avec elles toutes ses co-détenues, pour lesquelles elle partagera la rel­a­tive sécu­rité qu’ap­porte les liens de sol­i­dar­ité tissés.

Cela com­mence par des envois réguliers de sim­ples cartes par exemple…

Parta­geons donc un max­i­mum cet appel au sou­tien. Toute per­son­ne empris­on­née en Turquie, lais­sée seule, oubliée court un dan­ger. Les sor­tir de l’anonymat dès lors qu’une mesure de répres­sion est prise est à min­i­ma une protection.

* Pour con­tourn­er les dif­fi­cultés de la cen­sure et être sûrs de la récep­tion, s’il vous plait écrivez vos mes­sages en turc. Vous pou­vez utilis­er cet out­il par exem­ple translate.yandex.com

Sara Kaya
Tar­sus Kadın Kapalı Cezaevi
C‑3
Tar­sus – MERSİN
TURQUIE

Petit film d’an­i­ma­tion maison…


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