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Par Ayşen Şahin, pub­lié le 11 juil­let en turc sur Evrensel

 

A l’at­ten­tion des autorités concernées…

Vous est-il déjà arrivé de chercher l’ar­gent de votre pain à sept étages sous-terre ?

Vous, avez-vous déjà enter­ré vos col­lègues de vos pro­pres mains parce que les mines qui devraient appartenir à l’É­tat avaient été pri­vatisées, et  que le dos du cap­i­tal étant caressé dans le sens du poil, la sécu­rité de l’emploi n’ y est pas instaurée ?

Vous, êtes-vous déjà allée à Ankara, non pas en vous calant dans les sièges des véhicules pare-balles à des mil­lions de dol­lars, mais à pied, dans le froid et la tem­pête ou le soleil sur le front ?

Vous, avez-vous déjà demandé jus­tice devant le tri­bunal, à la porte de votre pro­pre par­lement, où vous n’êtes pas autorisés à entrer ?

Vous, avez-vous déjà essayé de regarder dans les yeux 453 enfants qui ont été lais­sés sans père pour cause de négligence ?

Vous, avez-vous déjà gag­né de l’ar­gent avec votre sueur ?

Vous, avez-vous déjà dor­mi sur du béton pour chercher vos droits ?

Vous, avez-vous déjà eu à con­duire sur une longue route pen­dant des jours, sans dormir suffisamment ?

Com­bi­en de tombes avez-vous vis­itées dans votre vie, vous ?

Ils ont marché à Ankara exacte­ment 16 fois, parce que vous avez ignoré les droits de 888 tra­vailleurs, tout en effaçant les mil­lions des dettes fis­cales de ceux qui maquignon­nent entre eux, les ter­res valant des cen­taines de millions.

Vous avez envelop­pé de men­songes, des mil­liards, mais vous n’avez pas tenu la parole pour 25 mil­lions que vous aviez promis pour droit d’un vrai travail.

Ils ont couché sur du béton pen­dant 6 jours, vous avez pu les regarder dans les yeux et dire: “si on vous donne vos droits, ce sera un précé­dent pour les autres.”

Alors qu’au trem­ble­ment de terre d’Izmir, où votre min­istre fai­sait un show devant les caméras au risque de gaspiller la charge du télé­phone d’une per­son­ne encore sous les décom­bres, les mineurs, lais­sant leur résis­tance en sus­pend, étaient allés par­ticiper aux travaux de sauvetage.

Non pas pour se faire des primes, non pas en coupant la cir­cu­la­tion avec des con­vois de pro­to­co­laires comme vous, en met­tant ain­si en dan­ger la vie de cen­taines de per­son­nes, mais pour sauver ne serait-ce qu’une vie, en met­tant la leur en danger.

Vous, vous n’êtes jamais allés dans leurs mines et n’avez jamais demandé quels étaient leurs problèmes.

Partager la peine du mineur n’é­tait pas porter la même chemise durant deux jours. Vous, vous ne savez pas ce que c’est que de partager la peine.

Vous savez, main­tenant, les armes que vous avez dis­tribuées comme des petits pains se révè­lent. Main­tenant, la roue de la jus­tice tourne de votre côté. Main­tenant, face à tous celles et ceux qui deman­dent leur droits, vous êtes aveu­gles, sourds, vous êtes lacry­mos et balles en caoutchouc. Main­tenant, vous, dans des demeures sous grande pro­tec­tion, dans des con­vois de dizaines de voitures, dans des meet­ings à grandes foules, dans des médias sol­dats sous ordres, vous vous croyez des importants.

Bien qu’ils sachent qu’ils sont au bout des armes que vous dis­tribuez, ayant la force de met­tre un bâton dans votre roue, se ten­ant droit debout devant vos forces de sécu­rité, tra­vail­lant plutôt que pour eux-mêmes, pour leurs cama­rades, n’at­ten­dant pas un cen­time de prof­it per­son­nel, résis­tant pour leurs droits, bons organ­isa­teurs, belles per­son­nes, ce sont Tahir Çetin et Ali Faik İnt­er qui étaient les vrais impor­tants, les vrais lead­ers. Ils sont morts à cause de vous. Sachez le comme cela. A côté des meneurs de résis­tances ouvrières, qui sont donc les politi­ciens, qui vont et viennent ?

C’est l’ar­ti­cle le plus court que j’ai jamais écrit dans ma vie.

Parce que le deuil est acerbe, il sape les longs mots.

Parce que ce sont les jours où la colère ne ren­tre pas dans les mots.

Parce que plus meurent de belles per­son­nes, nous nous rap­pelons que notre temps est compté.

Main­tenant, si vous regardiez d’autres sources que vos médias achetés, vous ver­riez et enten­driez la phrase “leurs sou­venirs vivent dans notre lutte” et ne vous y attarderiez jamais. Sachez que le fardeau de cette phrase est lourd pour celles et ceux qui la disent.

Cela sig­ni­fie endoss­er leurs luttes. Ce qui est endossé, sont l’en­tête­ment, le courage, le cœur et les rêves des deux lead­ers syndicaux.

Autrement dit, vous pou­vez lire cela comme ceci : désor­mais l’ob­jec­tif est de graver leurs noms à l’en­trée des mines nation­al­isées pour que leurs sou­venirs vivent, retir­er vos pho­tos des murs, décrocher des portes les plaques en laiton gravées de vos noms, et voir les noms listés comme respon­s­ables de tous ces morts, sur des enveloppes de let­tres envoyées en prison, juste en dessus du numéro de quartier.

Leurs sou­venirs vivront dans notre lutte.

Nous, lorsque nous dis­ons que nous n’ou­blierons pas, nous n’ou­blions pas.

Nous n’ou­blierons pas.

Pour votre information…

Ayşen Şahin


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