La poétesse Delphine Durand envoie au Kedistan, ces vers dédiés à la romancière Aslı Erdoğan avec ces mots :
“Un poème pour cette magnifique figure de la résistance”.
L’audience finale du “procès Özgür Gündem” s’était déroulée le 14 février 2020, et terminée par un acquittement, pour Aslı Erdoğan, accusée de “propagande pour une organisation terroriste”. Le 10 juin dernier, le tribunal local expéditif (Istinaf) a prononcé une décision “à l’unanimité” et “au nom de la Nation turque” et, le 18 juin, Aslı prenait ainsi connaissance du document qui annonçait la réouverture de son procès et la poursuite de son calvaire…
Même si cette annonce, on le sait, est destinée davantage à mettre en garde et faire taire la désormais exilée qu’est Aslı Erdoğan, en faisant peser sur elle des menaces en cas de volonté de retour, elle constitue pourtant psychologiquement pour Aslı une blessure supplémentaire.
Avec tout notre soutien…
Pour retrouver tous les hommages poétiques de Delphine Durand sur Kedistan, suivez ce lien.
Pour lire les quatre articles de Aslı Erdoğan, qui furent utilisés pour “instruire” les chefs d’accusation, cliquez ici.
Pour Aslı Erdoğan
Toute fleur n’est que la crête d’un invisible incendie
La vie est lourde à ceux qui n’ont eu pour souvenirs
que les morts
Déjà la vie si longue
Nous étions ces arbres couchés
qui font feu contre le ciel
en Turquie
Il ne me reste plus rien qu’une robe
et des pieds en sang
sur les chemins du souffrir
A travers les plaies je vois la neige
la faim est un jardin d’oiseaux noyés
Quand viendra l’heure
de t’écouler comme une eau pure
d’être diamant dans la cendre
Te souviens- tu d’Istanbul ?
Venir là bas c’est fêter la poussière
comme si vivre assoiffait la blessure
Nos lèvres ne sont plus que caillots ailés
qui font affront aux étoiles
Quand je pense que nous allons mourir
dans des buissons de flammes
sous la masse du boucher
nous nous taisons
pétrifiés
Et les sœurs assassinées qui murmurent a nos oreilles
j’entendrai ma mère chanter
Dans toutes les prisons
un corps mutilé de femme nue
couché dans les forêts de haute lice
moi qui pensait vivre encore des années
comme le papillon de nuit
L’espoir nous assoiffe
Ta liberté nous donne les ailes du soleil
Image à la une: “Dans les forêts de haute lice”, dessin aquarelle de Naz Oke — Pour l’acheter : adoptart.net
Soutenez Kedistan, FAITES UN DON.