Elles s’appelaient Zehra Berke, Hebûn Mele Xelîl et Ami­na Waysî.

Une attaque par drone, de l’ar­mée turque, les a visées. Elles étaient alors dans la région de Kobanê, au Roja­va. Au mépris de tous les accords inter­na­tionaux sur la Syrie, déjà passés con­tre les pop­u­la­tions de Syrie-Nord, et jouis­sant sans scrupules de la vio­la­tion du ter­ri­toire syrien qu’elle a imposée, la Turquie pra­tique des assas­si­nats poli­tiques ciblés.

Ces femmes étaient liées au Kon­gra Star, mou­ve­ment de femmes de la Syrie. Zehra Berke était l’une des coor­don­na­tri­ces pour la région de l’Euphrate. Inutile de rap­pel­er leur engage­ment con­tre Daech. La Turquie a visé délibéré­ment des actri­ces de la con­struc­tion en cours d’une société démoc­ra­tique, égal­i­taire et écologique au nord de la Syrie, sans que cela ne sus­cite de réac­tions nota­bles de la part de celles qui sont com­muné­ment nom­més “par­tis intéressées au conflit”.

Après un hom­mage à Havrin Kha­laf, un sou­tien aux pris­on­niers et pris­on­nières poli­tiques en Turquie, un poème sur la geôle de Diyarbakır, un écho aux œuvres de Zehra Doğan, deux poèmes dédiés à Nûdem Durak, chanteuse kurde, empris­on­née, Del­phine Durand nous fait par­venir ce texte que nous dédions aux vic­times des dernières exac­tions, mais aus­si à toutes les com­bat­tantes pour un futur dans la région, pris­on­nières de la Turquie ou libres et debout.

 

Chanson kurde

A toutes les âmes prisonnières

Ma chan­son pour ton amour

Comme un tor­rent mon poème vient

Frap­per à ta fenêtre à Kobanê

Mon cri lancé jusqu’aux étoiles

En effri­tant la houle du temps

Pour laver ma bouche dans l’orage

Ma chan­son pour ton amour

Pour que tu reviennes

Pro­fond comme l’avenir

Dans le champ de ma nudité

Qui s’oppose à ton angoisse

A la lune pour­rie du chant

Ter­ri­ble mon frère d’amour

Tu revien­dras dans les frelons de la lumière

Dans le flux de l’histoire

Il y a des larmes sur mes lèvres

Comme sur les lèvres d’une métaphore

Dans la four­naise des brisants

A Kobanê

Je reverdi­rai comme le vis­age de la mer

Je n’avais pas com­pris ce qu’est un labyrinthe

Jusqu’au jour où face à toi-même

Je fus ce soleil aux ailes fines


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Delphine Durand
Poétesse
His­to­ri­enne de l’art, mys­tique, poète, lais­sons au pluriel mag­nifique les mots de l’invisible… Del­phine est ontologique­ment présente dans la seule per­durable présence de l’art. Après des études de théolo­gie et de philoso­phie, elle choisit l’histoire de l’art mais son cœur ner­va­lien l’entraine vers des univers fan­tas­ma­tiques et sauvages, et enfin la poésie où nous sommes tous libres.