Le 9 mars 2020, ce ver­dict est tombé : Selçuk Mızrak­lı, co-maire de Diyarbakır, a été con­damné à 9 ans et 4 mois de prison pour “appar­te­nance à une organ­i­sa­tion ter­ror­iste”.


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Selçuk Mızrak­lı est médecin et homme poli­tique. Né en 1963 à Siverek, Urfa, dans le sud-est de la Turquie, il a occupé divers postes à la Cham­bre de médecine de Diyarbakır, dont celui de prési­dent. Il est égale­ment le prési­dent fon­da­teur et mem­bre du con­seil d’ad­min­is­tra­tion de la Mesopotamia Foun­da­tion. Il fut député du Par­ti démoc­ra­tique du peu­ple (HDP) du juin 2018 à mars 2019. Can­di­dat du HDP, lors des élec­tions locales du 31 mars 2019, il a été élu Co-maire de Diyarbakır Metro­pole avec 63% des suffrages.

Selçuk Mızrak­lı a été démis de ses fonc­tions par le min­istère de l’In­térieur, le 19 août 2019, au motif d’une enquête “liée au ter­ror­isme” aboutis­sant à un procès à son encon­tre. Il a alors été placé en déten­tion pro­vi­soire le 21 octo­bre.  Il est actuelle­ment détenu à la prison de Bünyan, dans la province de Kay­seri, donc déporté à 563 km de sa ville.

Suite à sa des­ti­tu­tion de ses fonc­tions, il annonçait à Bianet :

La volon­té démoc­ra­tique a été exé­cutée par une opéra­tion de minu­it. Les dernières miettes de la démoc­ra­tie en Turquie ont été détru­ites par cette déci­sion. Cette déci­sion est une indi­ca­tion que la prochaine péri­ode sera plus douloureuse. Il n’y a pas de vic­times indi­vidu­elles. La vic­time, c’est la démoc­ra­tie en Turquie, et l’ensem­ble de son électorat.

Les élec­tions du 31 mars ont été totale­ment ignorées. Quant à la région, la volon­té de mil­lions de per­son­nes a été ignorée. La Con­sti­tu­tion a été détru­ite. La sit­u­a­tion ne doit pas être lue en ter­mes de trois villes seule­ment. Nous devons l’abor­der dans son ensem­ble. En ce moment, tous les peu­ples de Turquie sont soumis à un test de démoc­ra­tie et de moralité.

Nous dis­ons que celui qui se tait face à l’in­jus­tice est le dia­ble muet. Per­son­ne ne devrait se taire face à cette injus­tice. Nous avons rai­son, et nous devons ampli­fi­er ce cri justifié.

Il y a beau­coup de policiers dans le bâti­ment de notre munic­i­pal­ité en ce moment. Je pense qu’ils sont en train de procéder à une perqui­si­tion. Je ne sais pas ce qu’ils cherchent. Mais je sais qu’ils ne trou­veront rien. S’ils veu­lent trou­ver de la cor­rup­tion, ils auraient dû le faire à l’époque de l’ad­min­is­tra­teur nom­mé par l’Etat.”

En fait, Selçuk Mızrak­lı ne fai­sait que d’ex­primer, encore une fois, les mêmes con­stats que les autres co-maires démis­Es ont mainte et mainte fois soulignés, déclarés, hurlés…

Rap­pelons que le 7 jan­vi­er dernier, dans un arti­cle con­cer­nant les dépor­ta­tions des pris­on­niers, nous annon­cions qu’à cette date, 32 co-maires ont été retiréEs de leur fonc­tions et rem­placéEs par des admin­is­tra­teurs nom­més par l’Etat. Et pour ces dépor­ta­tions déli­rantes, nous pre­nions comme exem­ple, le cas des 24 co-maires de villes kur­des. Selçuk Mızrak­lı fait par­tie de ces pris­on­nierEs frap­pés par les dépor­ta­tions dites “trans­ferts for­cées”, méth­ode d’isole­ment sans cel­lule, une dou­ble peine, une sorte de tor­ture...

Ce 9 mars, Selçuk Mızrak­lı n’a pas assisté à l’au­di­ence finale et il était représen­té par ses avocats.

Le Pro­cureur a réitéré ses accu­sa­tions et demandé une peine de prison d’un min­i­mum de 7 ans, 6 mois à 15 ans pour “appar­te­nance à une organ­i­sa­tion ter­ror­iste”. Le tri­bunal a pronon­cé pour Selçuk Mızrak­lı une peine de prison de 9 ans et 4 mois. Une peine, pré­cisons le “à la lim­ite supérieure”.

Ses avo­cats ont souligné la simil­i­tude de nom­breux cas de co-maires. Il ont affir­mé que la déci­sion est prise sur une base de non-droit, car toutes les allé­ga­tions faites dans le dossier comme preuves sont con­tre la loi. En effet, Cihan Aydın le bâton­nier du Bar­reau de Diyarbakır, pré­ci­sait à son tour, “Le ver­dict ren­du n’est absol­u­ment pas un ver­dict de tri­bunal. Nous ne pou­vons pas penser qu’il s’a­gi­rait d’une déci­sion judi­ci­aire. Nous ne pou­vons pas par­ler de preuves obtenues légale­ment. Nous avons d’ailleurs à plusieurs repris­es fait val­oir au tri­bunal que les preuves n’ont pas été obtenues légale­ment. Il s’ag­it de preuves pro­duites par la police, des ten­ta­tives de jus­ti­fi­er l’ex­tor­sion de la Mairie de Diyarbakır Metro­pole”.

Les avo­cats de Selçuk Mızrak­lı sol­liciteront la Cour de cas­sa­tion, ensuite la Cour européenne des droits humains.

Pen­dant ce temps, en Turquie, en Europe, partout au monde, tout le monde sait par­faite­ment que ces des­ti­tu­tions de fonc­tions, révo­ca­tions, pour­suites, con­damna­tions, qu’il s’agis­sent des femmes et hommes poli­tiques, ou intel­lectuelLEs, n’ont rien à voir avec un quel­conque “crime”, et que les chefs d’ac­cu­sa­tions sont arbi­traires et absurdes.

D’ailleurs pour trou­ver de vraies preuves, les policiers et pro­cureurs se don­nent telle­ment du mal, que finale­ment en créant les preuves eux-mêmes, ils devi­en­nent très inventifs.…

En effet le bour­reau peut être très créatif.

 


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