La Fon­da­tion de recherch­es SETA vient de pub­li­er un rap­port de 200 pages inti­t­ulé : “Les pro­longe­ments des médias inter­na­tionaux sur la Turquie”. (Rapor: Ulus­lararası Medya Kuru­luşlarının Türkiye Uzan­tıları)


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Le rap­port s’in­téresse par­ti­c­ulière­ment aux rédac­tions en langue turque de BBC, Deutsche Welle, Voice of Amer­i­ca, Sput­nik, Euronews, CRI (radio chi­noise nationale) et Inde­pen­dent. Il “analyse” la ten­dance de ces médias, cri­tique leur ligne édi­to­ri­ale et, cite des exem­ples d’articles qu’il con­sid­ère comme “par­ti pris”. Ils sont accusés de men­er un tra­vail de sen­si­bil­i­sa­tion pour mod­i­fi­er l’im­age de la Turquie.

Ce rap­port, pré­paré avec une soi-dis­ant “ambi­tion” d’étudier la presse inter­na­tionale, fait une énuméra­tion nom­i­na­tive de touTEs les jour­nal­istes d’origine turque qui tra­vail­lent au sein des médias observés, y ajoutant leur par­cours et biogra­phie. Il va jusqu’à l’observation des comptes per­son­nels de réseaux soci­aux de ces mêmes jour­nal­istes qui, tou­jours selon SETA n’auraient pas le droit de révéler leur ten­dance poli­tique. Il focalise ain­si sur “tel jour­nal­iste partageant les pub­li­ca­tions de tel média”, et, avec à l’ap­pui des copies d’écran, les affiche… Même les partages con­cer­nant le principe de la lib­erté d’expression et d’information devi­en­nent un critère “dou­teux”.

SETA, “révèle” dans son rap­port, que les jour­nal­istes des départe­ments en langue turque des médias BBC, DW, Voice of Amer­i­ca, Sput­nik et Euronews parta­gent plutôt les arti­cles de jour­naux dont ils-elles étaient jour­nal­istes aupar­a­vant, priv­ilé­giant donc les partages de pub­li­ca­tions de sup­ports qui “vien­nent au pre­mier plan avec leurs pro­pos anti-gou­verne­men­taux”, tels que BirGün, T24, Bianet, Evrensel, Cumhuriyet, Diken, DW Turc et RSF .

SETA observe ain­si un par­al­lèle entre ces médias inter­na­tionaux et les médias turcs de ten­dance kémal­iste, de gauche, et sécu­laires. “On peut exprimer que, dans ce cadre, tous ces médias pos­sè­dent un lan­gage édi­to­r­i­al unique, allant à l’encontre de leurs principes” annonce le rapport.

Les infor­ma­tions parues dans les médias observés sont cri­tiquées, et le rap­port con­tient des pro­pos du genre “Bien que le lien des députéEs HDP avec l’organisation ter­ror­iste (com­prenez le PKK), et le fait qu’ils-elles trans­met­taient à pro­pos de la lutte con­tre le ter­ror­isme menée par l’Etat, des infor­ma­tions fauss­es et spécu­la­tives qui soulèverait la réac­tion des pop­u­la­tions de la région (com­prenez kurde), BBC Turc a con­sid­éré les députéEs HDP comme des sources fiables.”

Ce rap­port de dénon­ci­a­tion immonde qui se pré­tend être “sci­en­tifique”, fine­ment pré­paré, con­stitue un gros dossier de fichage. Sa pub­li­ca­tion a provo­qué une forte réac­tion, notam­ment des jour­nal­istes, organ­i­sa­tions cor­po­ra­tives et syn­di­cats, comme TGS,  Syn­di­cat des jour­nal­istes en Turquie.

Quant aux médias au ser­vice de l’E­tat, ils se jet­tent sur le rap­port et cri­ent au loup avec des manchettes dénonçant “les enne­mis de l’ex­térieur” à l’opin­ion publique : “Remar­quable rap­port de SETA ! De nom­breuses organ­i­sa­tions étrangères ont com­mencé leurs activ­ités en Turquie”. Comme si les départe­ments en langue turque venaient tout juste d’être créés, et avaient pour objec­tif de détru­ire la Turquie…

Turquie rapport SETA

Remar­quable rap­port de SETA ! De nom­breuses organ­i­sa­tions étrangères ont com­mencé leurs activ­ités en Turquie”.

Le rap­port est remar­quable par­ti­c­ulière­ment par le lan­gage util­isé et sa méth­ode, qui se révè­lent sim­i­laires aux rap­ports pré­parés par les ren­seigne­ments généraux dans dif­férentes péri­odes en Turquie. L’om­bre des “sci­en­tifiques” du MIT se pro­file derrière.

L’af­fichage en clair des jour­nal­istes ain­si dénon­céEs, con­stitue une men­ace réelle sup­plé­men­taire pour celles et ceux qui sont objets de procès en cours. Leur juge­ment n’étant pas ter­miné, cette source, con­stitue un risque qui affecterait les déci­sions de justice.

Mais reste-t-il de la Jus­tice et du Droit en Turquie ?

La Fon­da­tion SETA se présente comme telle :

La Fon­da­tion SETA pour la recherche poli­tique, économique et sociale, est un insti­tut de recherche à but non lucratif qui se con­sacre à des études nova­tri­ces sur des ques­tions nationales, régionales et inter­na­tionales. L’ob­jec­tif de SETA est de pro­duire des con­nais­sances et des analy­ses actu­al­isées et pré­cis­es dans les domaines de la poli­tique, de l’é­conomie et de la société et d’in­former les décideurs poli­tiques et le pub­lic de l’évo­lu­tion des con­di­tions poli­tiques, économiques, sociales et cul­turelles. SETA éval­ue les ques­tions nationales et inter­na­tionales dans un con­texte his­torique et culturel.

La mis­sion de SETA est de favoris­er la recherche col­lab­o­ra­tive et inter­dis­ci­plinaire, d’en­richir le débat stratégique et de fournir aux décideurs des secteurs pub­lic et privé des infor­ma­tions, des analy­ses et des propo­si­tions d’ac­tion indépen­dantes et faisant autorité.

Dans la con­clu­sion titrée “Résul­tats et con­seils”, le rap­port noti­fie que la qua­si total­ité des médias étrangers qui pub­lient en Turquie par­lent d’une voix uni­voque. Il con­seille, “Selon leurs principes annon­cés, ils devraient instau­r­er une ligne plurielle”.

A pro­pos des jour­nal­istes, le rap­port con­seille, en se bas­ant encore une fois sur les “principes” de ces médias, “leur per­son­nel ne devrait pas effectuer de partages révélant leurs pro­pres ten­dances, mais il a été observé qu’il y a de nom­breux employéEs qui ne respectent pas cette règle. Les médias doivent con­trôler leur per­son­nel et mon­tr­er le soin que leur iden­tité poli­tique ne se reflète pas dans le lan­gage de pub­li­ca­tion.”

SETA con­seille égale­ment “Les départe­ments de Turquie de ces médias doivent être con­trôlés par leurs hiérar­chies prin­ci­pales”.

Pour finir : “La fia­bil­ité et l’impartialité des médias étrangers qui pub­lient en Turquie, doivent être suiv­ies et con­nues de l’opinion publique. Pour ce faire, “un groupe de suiv­is et de rap­ports” doit être con­sti­tué. Du fait du car­ac­tère par­ti­c­uli­er de la presse, il ne serait pas per­ti­nent que cette for­ma­tion soit con­sti­tuée par l’Etat (encore heureux!). Une for­ma­tion con­sti­tuée à par­tir de la société civile doit être encouragée.”

Il est curieux que le rap­port analyse prin­ci­pale­ment l’im­age “poli­tique” et ne s’é­tende pas sur la “touris­tique”.

Et le mot de la fin qui tue : “Le nom­bre d’exemples à suiv­re, tel TRT World, qui fait l’édition publique inter­na­tionale de la Turquie, doit être aug­men­té.

Pour infos, en 2016 on pou­vait déjà décou­vrir : “Le rap­port inti­t­ulé “Les branch­es du PKK dans le nord de la Syrie, PYD-YPG”, pré­paré par la Fon­da­tion turque de recherche en poli­tiques économiques [SETA] , a per­mis de dévoil­er le lien organique entre le PYD et le PKK, ain­si que leurs objec­tifs dans le nord de la Syrie. Il a été prou­vé que le PYD est la sous-branche du PKK”. Grat­tez un peu et on pour­ra décou­vrir que “Mon­sieur l’Am­bas­sadeur” en était con­seiller scientifique…

Vous l’au­rez com­pris, le jour­nal­isme en Turquie et ailleurs ne serait plus un crime s’il reflé­tait tou­jours “la voix de son maître” dans tous ses aspects, selon ce rap­port qui tombe à pic pour envis­ager “sci­en­tifique­ment” une cen­sure con­tre des médias qui, en Turquie, dif­fuseraient de “l’é­tranger” une image écornée du régime. A l’oc­ca­sion, dénon­cer à une par­tie de la dias­po­ra favor­able au régime des “traîtres qui écrivent de l’é­tranger” afin qu’elle “les rap­pelle à la rai­son” sem­ble aus­si être la rai­son du rap­port. Le régime turc pour­suit donc sa poli­tique de pres­sion à l’étranger…

Vu l’ab­sence de réac­tions et les com­plic­ités européennes et inter­na­tionales, il aurait tort de se priver…


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