Kedistan vous offre le journal de bord de Joseph, alias Jüse Idiart, un gars du Pays-Basque, parti à la découverte du Kurdistan Sud, en compagnie de son ami Ercan Aktaş, auteur de notre webmagazine, en visite familiale…
Vous trouverez la totalité de ce journal en suivant le lien “Le goût de l’exil“
Kurdistan et Kapitalistan | 1 ère partie
Il est difficile de décrire un pays quand on ne le connaît pas ; l’image que l’on offre est issue de sa propre réalité avec tout l’empirisme et les préjugés propres à un individu. Je ne m’étais pas vraiment fait d’idée quant à ce j’allais découvrir au Kurdistan. Le mot surprise définirait le mieux le sentiment que m’inspire ce voyage. Je vais de surprises en surprises.
Cet après-midi, Destina nous amène avec elle sur son lieu de travail. Nous commençons par déjeuner avec ses collègues, tous d’anciens kurdes du nord (terres sous administration turque) et anciens compagnons de lutte. Il sont plus ou moins interdit de séjour en Turquie. Les discussions se font en langue turque. Ercan me traduit que l’une d’entre elles, enceinte, leur fait part de son désir d’accoucher aux États-Unis. Je demande pourquoi à Ercan et il me répond : “Pour qu’il ait la nationalité américaine” . Candidement, comme d’habitude, je demande encore pourquoi. “Bah pour qu’il ait une meilleure vie”.
Après avoir bien mangé un bon repas végétarien à la cantine laborale, nous partons dans le bureau de Sidar, général manager, pour nous délecter d’un thé (délicieux) préparé par l’employée destinée à cette tache (les kurdes boivent tout le temps du thé), une femme d’origine népalaise. Avant de prendre la voiture pour rejoindre le centre ville, quelques collègues viennent voir avec curiosité les “fransi”.
Ils me posent des questions en anglais sur mon impression globale du pays, je leur répond qu’elle risque d’être assez réductrice vu mon peu de connaissance de cette contrée. Je souligne le fait que ce pays est loin de l’image que mon inconscient s’en était fait. Je leur fait part de mon impression. Selon moi, à Hewler, le capitalisme bat son plein, dans ce pays en plein développement. Venant d’un continent construit sur ce système économique, je ne m’attendais pas à le voir aussi exacerbé ici.
Les enseignes commerciales occidentales et orientales font fleurir leurs énormes panneaux lumineux de part et d’autres des routes et des rues. Les centres commerciaux poussent comme des champignons. Au volant de sa grosse bagnole blanche à essence, on vit le rêve américain de réussite sociale par la consommation. Le pétrole abonde. C’est impressionnant de voir le nombre de stations services neuves et en construction, il y en a partout ! Dans les différents supermarchés que j’ai pu visiter (si, si ça se visite un super marché et c’est un super support d’indices sociologiques) les produits occidentaux de luxe (ironie) se retrouvent à tous les rayons : sel américain bourré d’additifs, biscuits allemand à base de graisses hydrogénées, fromages-plastiques franco-français, tomates au jus d’Italie, appareils électroménagers chinois… le tout vendu à prix d’or.
Tout autour de nous, au milieu des terrains vagues et des champs de blé, des buildings et des lotissements gigantesques sont en cours de construction. Pour nombre d’entre eux les travaux semblent momentanément interrompus, je demande naïvement si c’est à cause de la chaleur (il fait 42ºC l’ombre). On me répond que c’est à cause de la crise économique due à la guerre contre Daesh. C’est vrai que ça à l’air de la banlieue madrilène post crise des surprimes, sauf que l’origine n’est pas la même…
Je constate et je pense ; les magasins, échoppes et bazars sont pleins à craquer, nous sommes en plein ramadan et tout comme Noël chez nous c’est le moment rêver pour faire exploser la consommation et décomplexer tout les excès. Le nombre de mendiants, notamment enfants et femmes est énorme, je mets ça sur le compte du ramadan. Donner l’aumône est une partie intégrante de ce mois de carême. C’est confirmé par Destina qui comme moi est choquée par le nombre de gamins nous tirant la manche, la paume de l’autre main tendue vers nous. Cependant, nous sommes en ville, et j’ai le travers d’y voir tous les défauts car je n’aime pas la ville. En ville tous les non-sens écologiques, économiques et sociaux me prennent à la gorge.
Il est temps de rentrer, une ballade à la citadelle, vieille-ville entièrement désertée, vient apporter un point d’orgue rafraîchissant malgré l’air suffocant qui nous entoure. Ici la nature reprend ses droits et les grenadiers fleurissent au milieu des ruines. Ce soir, on se couche tôt car demain 3h du matin on se lève pour partir explorer les collines et les montagnes du nord ouest. Habitant de Xiberoa (Soule), la plus petite des provinces basque, sauvage et montagneuse, mon cœur se réjouit d’aller vers ces pays de bergers que sont les montagnes kurdes. Mais que vais-je y trouver ? Surprise…
à suivre…
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