Aujourd’hui, j’ai appris un nouveau mot en français : intrusion. A ne pas confondre avec perfusion m’a-t-on dit, bien qu’il s’agisse d’un hôpital.
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Vous avez donc, chers amiEs françaisES, un ministre de l’intérieur qui pourrait postuler chez Erdoğan.
Attendez, je vous raconte…
Cela remonte à 2013. Cinq ans déjà que ce qu’on appelle tout simplement Gezi ici, battait son plein et son opposantE.
Un bref rappel d’abord, pour celleux qui ne sauraient pas de quoi il s’agissait. Le 28 mai 2013, à Istanbul, une cinquantaine de personnes entament un sit-in dans un parc, près de Taksim, pour protester contre sa disparition programmée et le début de la coupe d’arbres. Des riverains d’abord, vite rejoints par quelques écolos activistes.
Le projet d’urbanisme qui doit voir le jour à cet endroit est un mélange entre centre commercial et reconstruction d’ancienne caserne ottomane. Un condensé ô combien symbolique du régime d’Erdoğan, ex maire d’Istanbul et déjà presque président.
Bien évidemment, en 2013, la police n’est déjà pas du genre bisounours et l’affaire finit par une castagne pour déloger les manifestantEs. Cette répression sauvage fera s’étendre le mouvement à toute la Turquie, avec des revendications contre le régime, qui tombent des branches des arbres, comme des fruits mûrs. C’est notre mai 68 quelque part. Et cela va durer, de manifestations en répressions…
Le 6 juin 2013, six personnes étaient décédées, et plus de 4000 manifestants, dont 14 journalistes, avaient déjà été blesséEs. Vos télévisions en France, à 20h00, le 6 juin 2013, titraient sur “le malaise et les suicides dans la police”… Tiens ? Si, si, j’ai vérifié ! Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que vous aviez déjà le nez tellement sur votre nombril tricolore, qu’un soulèvement à l’échelle d’une grande partie de la Turquie, réunissant plus de 640 000 personnes, n’attirait guère l’attention de votre gauche. On attend toujours le tweet de soutien…
Mais, pour celleux qui voudraient plus de détails, je les renvoie au web savant.
Revenons-en à notre simple histoire d’hôpital qui se moque de la mosquée…
“Des intrus ont attaqué une Mosquée en plein Istanbul”, titrait une bonne partie des torchons, sur les conseils avisés du gouvernement de l’époque. Et les détails étaient croustillants sur l’intrusion.
“Des tchapouldjou (entendez maraudeurs, traine-savates) sont entrés dans la mosquée, avec leurs chaussures, ils ont bu et fourniqué !”. Or, l’imam d’une mosquée avait ouvert les portes aux manifestantEs attaquéEs par la police. Beaucoup de blésséEs y furent soignéEs par des médecins et infirmiers volontaires…
Alors, pensez-donc, lorsqu’on m’a raconté les fake-news de votre “bombe le torse d’intérieur” à vous, j’ai tout de suite repensé à celle-là. Et je me suis dit aussitôt qu’en plus d’être inventif, votre ministre était un plagiaire. A moins qu’il n’y ait une internationale du mensonge, lorsqu’il s’agit de salir ses oppositions. Si vous ne me croyez pas, regardez donc ICI !
Et comme on sait maintenant où nous a mené de telles répressions, juste pour conserver le pouvoir, on n’est jamais assez prudentE.
Aah, Gezi… Un soulèvement manqué, trahi aussi. Une intrusion d’une promesse de changement en Turquie. Ce sera bientôt la date anniversaire des cinq ans. Cinq années de larmes et de sang qui ont coulé depuis.