En Turquie, 120 ouvrierEs de la marque de cosmétiques Flormar, du Groupe Rocher, sont licenciéEs parce qu’elles-ils se sont syndiquéEs, afin de mieux se défendre contre la direction de l’entreprise qui leur impose des conditions de travail indignes et des bas salaires. Depuis deux semaines, elles-ils se réunissent chaque jour devant l’usine à Gebze pour faire reconnaître leur droit syndical.
Alors que se syndiquer est un droit encore reconnu par la constitution turque, les entreprises mènent une politique très active contre la syndicalisation, notamment en faisant recours aux licenciements illégaux de manière systématique.
Flormar est une marque de cosmétiques possédée à 51% par le Groupe Rocher qui détient également la marque Yves Rocher. En effet, le 16 août 2016 Groupe Rocher annonçait avoir acquis 51% de Flormar, son concurrent turc, en poursuivant ainsi son internalisation.
Basée à Rennes, France, Yves Rocher est une marque mondiale de cosmétiques et de produits de beauté. L’entreprise est présente dans 88 pays et emploie 13.500 personnes, outre plus de 215.000 personnes employées indirectement. Kosan Kozmetik emploie 400 travailleurs et produit pour l’enseigne Flormar, numéro un du maquillage en Turquie, avec 21% de la part du marché. L’usine exporte aussi ses produits aux marchés de 104 pays, principalement vers les pays en développement. [IndustriALL]
Le 25 mai, les ouvrier-es de Flormar s’exprimaient ainsi lors d’une interview d’İleri Haber
Pınar Koca travaillait depuis 8 ans au Flormar et elle est une de premier-es à avoir été licenciée dès son adhésion au syndicat : “J’ai adhéré le 21 mars, et ils m’ont licenciée le 23. Ils ont motivé mon licenciement par ‘performance basse’. Ont-ils remarqué que ma performance est ‘basse’ au bout de 8 ans ?” Elle explique qu’elle ne bénéficie pas ainsi, de son droit d’indemnisation et qu’elle touche seulement l’indemnisation chômage en sortie. “Flormar prétend que nous agissons dans l’illégalité, or je n’ai utilisé que mon droit syndical” ajoute-elle.
Pınar précise que les dirigeants disent que les indemnisations ne seront pas payés aux résistant-es et font pression psychologique sur les ouvriers-es, en leur disant “Ils-elles peuvent rester à peine une semaine devant la porte, si vous les rejoignez, nous ne vous paierons pas vos indemnisations”.
“Je travaille depuis des années avec un SMIC. Il y a des personnes qui travaillent depuis 12, 15 ans, encore pour un salaire minimal. Les dirigeant-es et responsables ne se comportent pas d’une façon correcte.
Par exemple, on nous donne une carte d’une valeur de 500 livres turques mais on exige plein de conditions pour les utiliser. Tu dois venir travailler en continu pendant 60 jours. Si tu dois consulter un médecin, cela doit être le médecin de l’usine. Et le médecin ne donne pas de rapport. Une de nos ami-es a été blessée par un rouleau de film étirable qui lui est tombé sur la tête. Ils lui ont demandé si elle ne l’a pas jeté exprès sur sa tête !
Les ouvrier-es n’ont aucune valeur. Ils veulent que le capital augmente, mais que les ouvrier-es ne gagnent rien.”
Quant à Zuhal Aktaş, elle travaillait à l’usine depuis 3 ans et demi. Mère seule avec deux enfants, elle a la responsabilité de subvenir aux besoins de sa famille. “Je suis à la fois la mère et le père de mes enfants. Depuis 3 ans et demi, Flormar nous faisait des promesses. L’année dernière, des records ont été battus à l’usine. Au mois de mars, nous avons produit 60 mille produits, en travaillant jour et nuit. Cette année ils devaient augmenter nos salaires, mais ce fut une augmentation insignifiante. Par nécessité nous avons adhéréEs au syndicat et ce, de notre propre volonté. J’ai confiance dans le syndicat, mais j’attends aussi que la population de Turquie soutienne les femmes. Je fais appel particulièrement aux femmes, qu’elles ne restent pas indifférentes à notre résistance”.
Les ouvrierEs sont déterminéEs à faire accepter à la direction leur droit à se syndiquer, car comme elles-ils soulignent dans la vidéo ci-dessous, en tant qu’ouvrierEs, “sans le syndicat, il n’est même pas possible de faire valoir nos droits élémentaires, de se faire respecter, de “se protéger des accidents du travail, d’être payéEs correctement” et de vivre dignement”.
Les ouvrier·ères en lutte de Flormar appellent à la solidarité et nous rappellent :
“Ce n’est pas la maquillage, mais la résistance qui embellit !”
Soutenons les ouvrières et ouvriers en lutte contre Flormar en Turquie !
Boycottons les produits YvesRocher !
Un tract prêt à photocopier est proposé, pour distribuer devant les magasins Yves Rocher.
Vous pouvez télécharger le document pdf ici.
Vous pouvez également signer cette pétition
Voici leur message :
Ajout du 1er juin 2018 :
Quand un groupe capitaliste utilise les montages financiers pour créer un imbroglio permettant toutes les optimisations fiscales, tous les dumping sociaux sur les salaires et délocalisations de production, ça donne cette excuse qui botte en touche.
Evidemment, entre les “franchises”, les “marques” et la dénomination sociale d’une “maison mère”, le parfum du fric s’évapore.
Il n’empêche que les ouvrières en grève en Turquie produisent ce que vendent les franchises en Europe, et que celles-ci tirent bénéfices et profit des conditions sociales qui leur sont faites.
Capitaliste mondialisé pour le profit et l’optimisation, Rocher deviendrait indépendant pour ses responsabilités sociales ?
Image à la une : Photo par Hilal Tok