Vous avez été nombreu.ses à répon­dre à l’ap­pel d’as­so­ci­a­tions inter­na­tionales de défense des droits humains, de défense des artistes et jour­nal­istes, et… de Kedis­tan, pour envoy­er des cartes postales à Zehra Doğan.

De belles ini­tia­tives du type “ate­liers d’écri­t­ure pour Zehra” ont été organ­isées, lors d’ex­po­si­tions ou non. Nous ne pou­vons les citer toutes.

Et comme elle ne peut répon­dre à toutes et à tous, les kedi se font facteurs.


Mes cherEs amiEs,

Je voudrais m’adress­er à vous comme “amiEs” parce que depuis que je me suis fait arrêter, vous ne m’avez jamais lais­sée seule. J’ai reçu de vous, sans cesse, des let­tres et des cartes. Vous m’avez fait ressen­tir con­stam­ment votre présence, dans ce lieu étroit, de deux étages de 20 mètres car­rés, qui con­tient 32 per­son­nes. C’est une chose au delà du méta­physique. Je n’ar­rive pas encore à décrire cela. Mais, grâce à vous je suis désor­mais encore plus forte.

Vous ne m’avez jamais fait vivre la soli­tude. Et main­tenant, j’ai des cen­taines d’amiEs, que je ne con­nais pas, dont je n’ar­rive pas à mémoris­er les prénoms. Et cette sit­u­a­tion m’ap­porte une nou­velle pen­sée. Pour ressen­tir la chaleur des per­son­nes, est-il néces­saire qu’elles soient près de moi ? Ou bien, pour les aimer, est-il oblig­a­toire de voir leur vis­age ou de con­naitre leurs noms ? Tout cela n’est pas indispensable.

Si l’u­nivers est un macro cos­mos ; et si nous sommes cha­cunE une par­tic­ule de cos­mos, comme Aris­tote le dis­ait, venant d’un tout, for­mant un tout,  si nous sommes tous et toutes des par­ties changeantes, nous sommes unEs. Je sais donc, quelque part, que vous êtes en même temps moi. Et vous respirez par con­séquent pour moi aus­si, le bel air, dont je suis mal­heureuse­ment privée. Nos vies, nos avenirs, nos exis­tences sont liés tel une spi­rale les unEs aux autres. Peut être que votre objec­tion devant mon état d’emprisonnement, et celui des autres, est déter­minée par cela ?

Dans cha­cune de vos let­tres, je peux lire votre rejet aus­si de toutes les injus­tices. Le fait de savoir qu’au­tant de belles per­son­nes exis­tent au monde, nous rend heureux-se, moi et tous les pris­on­nierEs. Ain­si, quand je sor­ti­rai un jour, nous allons com­mencer à papot­er comme si nous nous con­nais­sions depuis des années.

Je vous remer­cie, pour toutes les let­tres et cartes que vous avez écrites jusqu’à aujour­d’hui, et pour les cen­taines de cartes que vous m’avez envoyées pour mon anniver­saire. Ce fut le meilleur anniver­saire de ma vie. Je me suis sen­tie renaître de mes cendres.

Et je voudrais pré­cis­er que, par ici, peut-être parce que beau­coup d’en­fants sont mis au monde, les anniver­saires ne sont pas célébrés beau­coup, et sou­vent, oubliés. J’ai dû couper un gâteau d’an­niver­saire, je pense seule­ment pen­dant mes années d’u­ni­ver­sité, et encore juste cer­taines années… Et cela m’avait don­né comme une sen­sa­tion qu’une femme pour­rait ressen­tir en por­tant une tenue dans laque­lle elle est mal à l’aise… C’est pour tout cela que j’ex­prime que, pour la pre­mière fois, j’ai pu don­ner un sens à ce jour, grâce à vos let­tres qui m’ont trou­vée ici, entre les qua­tre murs. Je vous en remer­cie beaucoup.

Zehra qui vous aime.

Note des kedi :

Oui, décidé­ment, quand la sol­i­dar­ité est dés­in­téressée mais active, elle sert à quelque chose, la preuve.

L’é­tape sup­plé­men­taire à franchir serait d’u­nir tous les sou­tiens mul­ti­ples qui se font jour depuis deux ans, pour exiger sa libéra­tion. Ce n’est pas gag­né, et les obsta­cles sur le chemin sont encore nombreux…

Nous vous encour­a­geons à con­tin­uer ce soutien.
Vous en trou­verez un mode d’emploi pos­si­ble ICI.

Et voici son adresse :

ATTENTION : Une mesure d’éloignement for­cé vient d’être prise par l’Etat turc con­tre Zehra Doğan. Le 23 octo­bre 2018, elle a été envoyée dans la sin­istre prison de Tar­sus (Tarse). LIRE : Turquie • Zehra Doğan déportée avec 20 pris­on­nières et partagez autour de vous comme sur les réseaux sociaux.
Toute cor­re­spon­dance vers l’ancienne adresse à la prison de Diyarbakır ne retrou­vera pas Zehra. Nous com­mu­niquons sa nou­velle adresse :

Zehra Doğan C‑3
Tarsus Kadın Kapalı CİK 
Alifakı Mahallesi Alifakı sokak 
Tarsus – MERSİN 
TURKEY


Quelques images ?

Avec l’aimable autori­sa­tion de l’or­gan­isatrice de ce 4ème ate­lier d’écri­t­ure à Mar­tigues, dans le Sud de la France au Café asso­ci­atif “les Ral­lumeurs d’Etoiles”

Ini­tiée lors de cet ate­lier de sou­tien du 24 mai dernier, une réal­i­sa­tion col­lec­tive con­tin­ue encore aujour­d’hui de réu­nir les sou­tiens autour d’une table créa­tive et de s’en­richir de nou­veaux messages.

Le street-artist Kider a aus­si attrapé les feu­tres pour Zehra, et son mes­sage expose en grandes let­tres le mot “ÖZGÜRLÜK” : liberté !

La réal­i­sa­tion sera envoyée à Zehra dans les jours prochains.

  • martigues zehra dogan

Zehra Doğan : “Thank you for your let­ters and post­cards!” Click to read
Zehra Doğan : “Gra­cias por vues­tras car­tas y postales” Haga clic par leer

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Zehra Doğan
Auteure, mem­bre d’hon­neur de Kedistan
Jour­nal­iste, artiste. Jour­nal­ist, artist. Gazete­ci, sanatçı.