Les 9, 10 & 11 mars s’est tenu à Bure, un week-end de sol­i­dar­ité avec le Kur­dis­tan révo­lu­tion­naire et de réflex­ion autour des théories et pra­tiques du communalisme. 

Vous trou­verez les arti­cles de retour en suiv­ant l’é­ti­quette Bure-Kur­dis­tan.


Compte-ren­du du 10.03.2018 • Présen­ta­tion de la Jine­olo­jî (Jinéolo­gie)
Rédac­tion collective

Qu’est-ce que la Jineolojî ?

En langue kurde, “Jin” sig­ni­fie “femme”, aus­si ce mot con­stitue la racine du mot “Jiyan” qui sig­ni­fie “vie” ; et “Lojî” sig­ni­fie l’idée de sci­ence. La “Jine­olo­jî” est donc la “sci­ence des femmes” et de la vie en général. Ce terme appa­raît pour la pre­mière fois dans le troisième vol­ume du Man­i­feste pour une Civil­i­sa­tion Démoc­ra­tique d’Abdullah Öcalan, inti­t­ulé “Soci­olo­gie de la Liberté”.

Mais pour com­pren­dre cette sci­ence des femmes, il faut com­pren­dre le développe­ment de la lutte des femmes kur­des au sein du PKK et leurs liens avec celle des femmes du monde entier. La Jine­olo­jî est fondée à par­tir de 40 ans d’expériences du Mou­ve­ment des femmes kur­des, que ce soit au sein des unités d’autodéfense armées (guéril­la) ou des assem­blées civiles du par­ti. La rela­tion entre théorie et pra­tique est fon­da­men­tale dans l’évolution du mou­ve­ment, à par­tir de réflex­ions et de struc­tures telles que la créa­tion des comités d’égalité homme/femme avec pour objec­tif de résoudre les prob­lèmes soci­aux et la vio­lence con­tre les femmes ; l’analyse des femmes et de la famille (les rela­tions patri­ar­cales dans la société kurde et au sein du mou­ve­ment de libéra­tion) ; la créa­tion de la guéril­la fémi­nine (non-mixte) ; et l’évolution des organ­i­sa­tions et du par­ti autonomes des femmes.

Le mou­ve­ment des femmes kur­des a dévelop­pé ses pro­pres con­cepts, comme la “théorie de la sépa­ra­tion” (appelé égale­ment “divorce total”) qui implique une volon­té de rup­ture rad­i­cale avec le sys­tème de l’État-nation patri­ar­cal, cap­i­tal­iste et colo­nial ; “tuer le mâle dom­i­nant” qui implique la trans­for­ma­tion de la société pour libér­er les indi­vidus de la men­tal­ité patri­ar­cale et d’oppression ; “hevjiyana azad” qui aspire à l’établissement d’une coex­is­tence libre entre les indi­vidus ; et “Xwe­bûn” qui aspire à se retrou­ver et être soi-même. Tous ces con­cepts ont un lien indis­so­cia­ble avec une con­cep­tion écologique, sociale et révo­lu­tion­naire de la lib­erté et le retour vers la nature, la vie com­mu­nale et la libéra­tion des gen­res. L’idéologie de la libéra­tion est la base du Mou­ve­ment des femmes kur­des. Elle se traduit par la néces­sité du Welat­parezî *, l’organisation et la lutte (autonome des femmes), la libre-pen­sée (en oppo­si­tion à la men­tal­ité patri­ar­cale et la pres­sion qu’elle exerce sur les femmes), l’éthique et l’esthétique (la cohérence entre les valeurs révo­lu­tion­naires et la forme qu’on leur donne).


* Welatparezî : La traduction de ce mot en langue kurde serait “patriotisme”, cependant le terme français porte des connotations patriarcales et nationalistes absentes du concept kurde. Littéralement, “welatparezî” signifie “protéger le pays”, entendu comme l’environnement, la culture et les origines d’où l’on vient.

En 2011, le pre­mier comité de recherch­es de Jine­olo­jî est con­sti­tué au sein du PAJK (Par­ti de libéra­tion des femmes du Kur­dis­tan). En 2015, la pre­mière con­férence de Jine­olo­jî est organ­isée dans les mon­tagnes du Kur­dis­tan. En jan­vi­er 2018, a eu lieu la pre­mière con­férence de Jine­olo­jî au Roja­va et dans la Fédéra­tion démoc­ra­tique du Nord de la Syrie.

De là va naître une feuille de route pour un tra­vail à long terme. Pour se libér­er, il faut savoir ce qui nous domine et ce con­tre quoi nous devons lut­ter ; il faut con­stru­ire une sci­ence à tra­vers l’échange et le débat ; les femmes et leur pen­sée doivent être présentes dans tous les domaines de la vie (poli­tique, sociale, économique, édu­ca­tion, san­té, etc.) ; il faut join­dre la théorie et la pra­tique ; la société doit s’approprier ses recherch­es ; et la libéra­tion des femmes ne pour­ra pas se réalis­er sans la libéra­tion de toutes les formes de dom­i­na­tion de la société mod­erne capitaliste.

LISEZ AUSSI La jinéologie : une science de la libération des femmes

Pourquoi une science des femmes ?

La sci­ence est l’accumulation des con­nais­sances de la société, c’est ce qui lui donne la capac­ité d’évoluer, de se trans­former. La sci­ence des femmes donne la capac­ité aux femmes d’analyser et de com­pren­dre le monde à par­tir de leur pro­pre per­spec­tive et per­son­nal­ité, pour emporter toute la société dans un mou­ve­ment de transformation.

La pre­mière étape est de savoir d’où vient l’asservissement des femmes (his­torique­ment, mais égale­ment actuelle­ment), com­ment le sys­tème patri­ar­cal s’est-il con­stru­it et com­ment il se repro­duit. Pour cela, la Jine­olo­jî pro­pose de remet­tre les femmes au pre­mier plan ‑là où la sci­ence mod­erne, la philoso­phie et la reli­gion nous avaient exclu­ent-; retrou­ver la place des femmes dans le passé des sociétés non-éta­tiques de l’époque néolithique (matri­cen­trées, com­mu­nales et écologiques) ; et auto-organ­is­er des comités, académies et assem­blées de femmes pour une mise en pra­tique et un enrichisse­ment des recherch­es dévelop­pées par la Jineolojî.

A VOIR Documentaire La guerre des filles

Nous con­sid­érons la femme comme “le plus ancien groupe humain colonisé” (A. Öcalan, Libér­er la vie : la révo­lu­tion de la femme). A la fin de l’ère néolithique, le patri­ar­cat rég­nait et bâtis­sait son autorité sur les femmes de trois manières : par “la coloni­sa­tion” des femmes et son util­i­sa­tion à des fins sex­uelles ; le con­trôle de l’é­conomie et du tra­vail des femmes ; la con­struc­tion d’une oppres­sion men­tale sur le plan idéologique (soutenue par la mytholo­gie et la reli­gion, puis la philoso­phie et la sci­ence) en réduisant les femmes à un statut de “femme au foy­er” et en les exclu­ant de l’espace social et poli­tique pub­lic, pour l’intérêt du mâle dom­i­nant qui — à tra­vers ce mod­èle — asservi­ra ensuite l’ensemble de la société.

A LIRE Libérer la vie : la révolution de la femme Abdullah Öcalan
A VOIR Documentaires sur les sociétés matriarcales :
Sur les traces de la déesse-mère
Mosuo, le pays où les femmes sont reines 

De là découlent tous les sys­tèmes d’exploitation et d’esclavage, la pro­priété privée et l’accumulation de biens, la société de classe, le sys­tème éta­tique, le mil­i­tarisme, l’impérialisme, etc. : un développe­ment que nous appelons “civil­i­sa­tion cap­i­tal­iste”. L’époque actuelle — que nous appelons “moder­nité cap­i­tal­iste” — en est l’apogée.

Mais il y a tou­jours eu de la résis­tance de la part des femmes et de la société con­tre ce sys­tème patri­ar­cal et de dom­i­na­tion : nous définis­sons cette résis­tance comme “civil­i­sa­tion démoc­ra­tique” avec comme objec­tif au XXIème siè­cle de gag­n­er cette bataille com­mencée il y a 5000 ans. Cette vic­toire sera la mise en place de ce que nous appelons la “moder­nité démocratique”.

Les objec­tifs de la Jine­olo­jî sont donc de résoudre la crise et les dilemmes du XXIème siè­cle ; ter­min­er la lutte des femmes kur­des pour leur exis­tence à tra­vers une trans­for­ma­tion sociale rad­i­cale, créer une unité entre idéolo­gie, soci­olo­gie et sci­ence inscrite dans une pen­sée social­iste, révéler les fonde­ments du Con­fédéral­isme Démoc­ra­tique (basé sur les idées de munic­i­pal­isme lib­er­taire et d’écologie sociale de Mur­ray Bookchin, l’émancipation de la jeunesse et la libéra­tion des gen­res) ; émanciper les femmes à par­tir de l’analyse de la civil­i­sa­tion ; réalis­er la sec­onde révo­lu­tion des femmes au Moyen-Ori­ent (la pre­mière étant con­sid­érée comme la cul­ture com­mu­nale matri­cen­trée – appelée “société naturelle” — qui a ini­tié la révo­lu­tion agri­cole et dévelop­pé d’incroyable sources de con­nais­sance à l’ère néolithique) ; et enfin réalis­er la troisième rup­ture sex­uel en faveur des femmes (la pre­mière rup­ture est la nais­sance des mytholo­gies et du con­flit entre dieux et déess­es con­tre la société de la Déesse-Mère ; la deux­ième rup­ture est la dis­pari­tion des déess­es et le monothéisme ; la troisième rup­ture est celle que nous vivons aujourd’hui, con­sid­érée comme l’opportunité d’une libéra­tion totale des femmes et de la société).

Critique des sciences modernes positivistes

La Jine­olo­jî pro­pose une analyse des méth­odes et des enjeux des sci­ences mod­ernes pos­i­tivistes qui n’ont pas réus­si à résoudre les prob­lèmes soci­aux liés à la moder­nité cap­i­tal­iste. Elle cri­tique leurs déf­i­ni­tions prob­lé­ma­tiques et décon­nec­tées de la société, la dichotomie sujet-objet, leur car­ac­tère ori­en­tal­iste, euro-cen­triste et andro­cen­triste (cen­tré sur l’ “homme blanc” et son hégé­monie épisté­mologique). Les recherch­es des femmes insuff­isantes ont défor­mé ou frag­men­té leur réal­ité. Les sci­ences mod­ernes ser­vent au développe­ment du cap­i­tal­isme, du colo­nial­isme et sont dirigées vers le prof­it, le pou­voir et le con­trôle physique et men­tal de la société. Ces sci­ences sont ultra-ratio­nal­istes, elles ignorent la con­nais­sance empirique, exclu­ent la pen­sée méta­physique et imposent une vision de la “vérité” qui devient la nou­velle “reli­gion sécu­laire” de notre temps.

Jineolojî et féminisme

La Jine­olo­jî n’est pas une forme de fémin­isme mais le(s) féminisme(s) est (sont) une impor­tante ressource pour la Jine­olo­jî. Nous con­sid­érons le fémin­isme comme “le soulève­ment de la plus anci­enne colonie” (Abdul­lah Öcalan). La Jine­olo­jî inclue les recherch­es et expéri­ences des théorici­ennes et des mou­ve­ments fémin­istes social­istes, anar­chistes, écol­o­gistes, décolo­ni­aux, etc., mais elle ne s’en con­tente pas et à par­tir de ces références et les expéri­ences des femmes kur­des au Moyen-Ori­ent, elle crée sa pro­pre épisté­molo­gie et émet aus­si des critiques.

Le Mou­ve­ment des femmes kur­des a des liens avec les mou­ve­ments fémin­istes et révo­lu­tion­naires en Turquie, en Europe et partout dans le monde. Par le biais de la Jine­olo­jî, nous ani­mons les femmes de toutes parts à tra­vailler ensem­ble et à se com­pléter grâce aux partage d’expériences et aux débats.

Pour la Jine­olo­jî, les prob­lèmes du fémin­isme (spé­ciale­ment dans les sociétés libérales) sont qu’il ne rompt pas avec les appareils d’État et les insti­tu­tions du sys­tème ; il tra­vaille avec les femmes mais ne prend pas en compte la trans­for­ma­tion des hommes ; il est sou­vent coupé de la société et des autres femmes (mar­gin­al­isé et/ou accom­modé au sein du sys­tème de la Moder­nité Cap­i­tal­iste ou de ses insti­tu­tions) ; il reste un mou­ve­ment théorique et ses principes de “libéra­tion” ne reste qu’un con­cept qui n’a pas réus­si à créer une alter­na­tive réelle pour l’ensemble de la société ; il est sou­vent euro-cen­tré, citadin (absent des milieux ruraux) et mod­erne (ne prend pas en compte les savoirs ances­traux) ; il est sou­vent mal-organ­isé et indi­vid­u­al­iste ; et les mou­ve­ments fémin­istes sont frag­men­tés (en dif­férentes “vagues” ou “courants”).

Méthodes de la Jineolojî

La Jine­olo­jî cherche l’unité entre les femmes, la vie, la nature et la société basée sur une redéf­i­ni­tion de l’existence des femmes à par­tir de leur pro­pre esprit (“Xwe­bun”) ; une rela­tion forte avec la “Soci­olo­gie de la Lib­erté” théorisée par Abdul­lah Öcalan ; une vie libre (“hevjiyana Azad”) sans rela­tion de pou­voir ; un puis­sant mécan­isme d’autodéfense des femmes, le rétab­lisse­ment des liens entre sci­ence, savoir et éthique ; l’inclusion des hommes dans ses analy­ses et son pro­jet de trans­for­ma­tion ; et la réin­ter­pré­ta­tion du savoir des femmes, de la société et de la déf­i­ni­tion de la vie.

La Jine­olo­jî développe ses pro­pres recherch­es à tra­vers la per­spec­tive des femmes — con­tre la men­tal­ité dom­i­nante — dans les domaines de l’épistémologie, l’ontologie, l’archéologie, l’étymologie, l’histoire et la sociologie.

Abdul­lah Öcalan a déclaré que “l’his­toire de l’esclavage n’a pas encore été écrite, et l’his­toire de la lib­erté attend d’être écrite”. La Jine­olo­jî rejette la vision pos­i­tiviste-déter­min­iste de l’his­toire qui con­sid­ère “l’é­tat et la société de classe” comme inévitable dans l’évo­lu­tion de la société. Elle n’aborde pas l’histoire de manière linéaire ou “pro­gres­siste”, mais cir­cu­laire. Elle inclue l’histoire orale et celle de la résis­tance sociale. Elle prend en compte l’intégralité de l’espace-temps (du con­texte) et l’importance des his­toires par­ti­c­ulières au sein de l’histoire universelle.

La Jine­olo­jî agit dans les domaines de l’éthique et l’esthétique, l’économie, la démo­gra­phie, l’écologie, l’histoire, la san­té, l’éducation et la politique.

Le mou­ve­ment des femmes kur­des et la Jine­olo­jî aujourd’hui visent à rem­plir le vide qui exis­tait entre la théorie, la pra­tique, la vie, la sci­ence et la société, grâce au pro­jet de trans­for­ma­tion des hommes et l’éducation des nou­velles gén­er­a­tions ; l’organisation d’unités d’autodéfense dans les qua­tre par­ties du Kur­dis­tan ; la co-prési­dence (homme/femme) et une représen­ta­tion dans tous les espaces poli­tiques et soci­aux ; les assem­blées, les com­munes et les ini­tia­tives de femmes dans la société “civile” ; les organ­i­sa­tions spé­ci­fiques aux femmes, leurs insti­tu­tions, leurs académies dans les domaines de la diplo­matie, la cul­ture, l’économie, l’éducation, la san­té, etc. ; et le développe­ment d’une source de con­nais­sance impor­tante trans­mise par et pour la société grâce à ces expériences.

Mise en pratique au Kurdistan, en Europe et dans le monde

Il existe des comités de Jine­olo­jî dans toutes les régions du Kur­dis­tan, de la Turquie et d’Europe. La Jine­olo­jî est égale­ment en cours de développe­ment en Amérique du Nord et du Sud.

Au Bakur (Kur­dis­tan occupé par l’État turc), un mag­a­zine — Jine­olo­jî — trimestriel est édité en langue turque. Chaque numéro est dévelop­pé autour d’un thème spé­ci­fique : crises sociales, méth­ode, révo­lu­tion au Moyen-Ori­ent et rela­tions avec la Jine­olo­jî, autodéfense, nature de la femme, mas­culin­ité, etc.

Au Roja­va et au cœur de la Fédéra­tion démoc­ra­tique du nord de la Syrie, une académie de Jine­olo­jî a était créée afin de for­mer les femmes à la Jine­olo­jî pour qu’elles puis­sent ensuite elle-même for­mer d’autres femmes et dévelop­per leurs pro­pres savoirs. La Jine­olo­jî est désor­mais incluse dans le pro­gramme sco­laire du Roja­va et du camp de réfugié-e‑s de Makhmour (Başur, Kur­dis­tan occupé par l’État irakien). Des for­ma­tions sont réal­isées pour pré­par­er les pro­fesseures à pou­voir enseign­er la Jine­olo­jî aux enfants, dès l’école pri­maire. Une fac­ulté de Jine­olo­jî a été ouverte en octo­bre 2017 au Roja­va et depuis le 8 mars 2017, la con­struc­tion du vil­lage autonome et écologique de femmes “Jin War” est en marche.

Plus d’informations sur Jin War :
www.jinwar.org | Facebook @jinwarwomensvillage
A LIRE Jinwar, village de femmes au Rojava sur Kedistan
A VOIR Documentaires : Jinwar (french subtitles) | Jinwar 2017

En Europe, deux Con­férences de Jine­olo­jî ont été organ­isées en Alle­magne (2014) et France (2016) ; un Cen­tre de Jine­olo­jî (cen­tre de recherch­es qui organ­ise égale­ment des sémi­naires et des for­ma­tions partout en Europe et dans le reste du monde) a été créé en jan­vi­er 2017 à Brux­elles ; deux ren­con­tres européennes de Jine­olo­jî ont eu lieu en Alle­magne en Août 2017 et au Pays Basque en Mars 2018. Des groupes de tra­duc­tion sont act­ifs partout pour traduire en divers­es langues les d’articles et les brochures sur la Jine­olo­jî, ain­si que le livre Intro­duc­tion à la Jine­olo­jî (orig­i­nale­ment écrits en langues turque ou kurde).

LA JINEOLOJÎ 
Site Internet (en français) www.jineoloji.org/fr
Contacter "Jineolojî center" : jineolojicenter@riseup.net

Image à la une : “Femmes Kur­des” de Zehra Doğan, artiste jour­nal­iste kurde, empris­on­née en Turquie. (Voir la vidéo)

Bure — Kur­dis­tan • ¿Qué es la Jine­ología? Haga clic para leer

Vous pouvez utiliser, partager les articles et les traductions de Kedistan en précisant la source et en ajoutant un lien afin de respecter le travail des auteur(e)s et traductrices/teurs. Merci.
Kedistan’ın tüm yayınlarını, yazar ve çevirmenlerin emeğine saygı göstererek, kaynak ve link vererek paylaşabilirisiniz. Teşekkürler.
Ji kerema xwere dema hun nivîsên Kedistanê parve dikin, ji bo rêzgirtina maf û keda nivîskar û wergêr, lînk û navê malperê wek çavkanî diyar bikin. Spas.
You may use and share Kedistan’s articles and translations, specifying the source and adding a link in order to respect the writer(s) and translator(s) work. Thank you.
Por respeto hacia la labor de las autoras y traductoras, puedes utilizar y compartir los artículos y las traducciones de Kedistan citando la fuente y añadiendo el enlace. Gracias.
KEDISTAN on EmailKEDISTAN on FacebookKEDISTAN on TwitterKEDISTAN on Youtube
KEDISTAN
Le petit mag­a­zine qui ne se laisse pas caress­er dans le sens du poil.