Des jour­nal­istes de Kedis­tan ont suivi les deux journées de la ses­sion du Tri­bunal des Peu­ples, qui s’est tenue à Paris, les 15 et 16 mars 2018. En voici une deux­ième par­tie de compte rendu.

Cette ses­sion du Tri­bunal Per­ma­nent des Peu­ples, qui s’est tenue le 15 et 16 mars à Paris fut présidée par Philippe Tex­i­er, (juge hon­o­raire à la Cour de Cas­sa­tion , expert indépen­dant auprès de la Com­mis­sion des droits de l’homme), assisté et entouré notam­ment par :  Mad Benchikh, Luciana Castel­li­na, Tere­sa Almei­da Cas­tro, Domeni­co Gal­lo, Denis Hal­l­i­day et Nor­man Paech.

L’acte d’accusation for­mulé à l’en­con­tre de l’État turc, fut argu­men­té par Jan Fer­mon, (avo­cat au Bar­reau de Brux­elles, actuel secré­taire général de l’Association inter­na­tionale des avo­cats démoc­rates). Rap­pelons que la Turquie n’a jamais répon­du à l’in­vi­ta­tion qui lui a été faite par voie offi­cielle d’être représen­tée ou défendue par un avo­cat de son choix. Des deman­des ont pour­tant été réitérées à l’ou­ver­ture et lors de la clô­ture de la ses­sion, après la plaidoirie du pro­cureur, pour l’accusation.

Cette ses­sion avait pour titre générique : Ses­sion sur les allé­ga­tions de vio­la­tions du droit inter­na­tion­al et du droit inter­na­tion­al human­i­taire par la République turque et ses fonc­tion­naires dans leurs rela­tions avec le peu­ple kurde et leurs organisations.

Dans un pre­mier arti­cle, nous avions décrit com­ment des experts ont longue­ment, après la présen­ta­tion de l’acte d’ac­cu­sa­tion, con­tribué à éclair­er le cadre juridique inter­na­tion­al, en appui sur la jurispru­dence et le droit inter­na­tion­al cou­tu­mi­er, qui se lit au tra­vers d’ac­cords et traités inter­na­tionaux, de juri­dic­tions inter­na­tionales recon­nues par une majorité d’E­tats, dont pour beau­coup la Turquie elle-même, de tri­bunaux dédiés et juge­ments ren­dus, et de réso­lu­tions de l’ONU à car­ac­tère juridique. Cet éclairage fut opéré sur deux points prin­ci­paux con­cer­nant le “droit à l’au­todéter­mi­na­tion des Peu­ples” et “le ter­ror­isme”, d’où peu­vent découler la recon­nais­sance d’un état de guerre, et la car­ac­téri­sa­tion des actes de guerre et des par­ties au con­flit… (Pour con­denser des ques­tions com­plex­es de droit international).

Des his­to­riens uni­ver­si­taires et chercheurs dont Hamit Bozarslan, ont, pour le tri­bunal, apporté égale­ment une exper­tise sur le siè­cle passé qui vit dans cette région les soubre­sauts de la chute de l’Em­pire Otoman et la nais­sance de l’actuelle République de Turquie, dans le même mou­ve­ment de la créa­tion d’E­tats-nation dans le Moyen-Ori­ent. Soubre­sauts qui virent tour à tour se dérouler un géno­cide, celui du Peu­ple arménien, et des atteintes graves dans la même prob­lé­ma­tique géno­cidaire pour d’autres Peu­ples et minorités religieuses… Cela pour situer une con­ti­nu­ité his­torique que le Tri­bunal mit ensuite en lumière…

Dans le pre­mier arti­cle, nous insis­tions égale­ment sur la grav­ité et la solen­nité des débats qui con­fèrent à ce Tri­bunal Per­ma­nent des Peu­ples, autorité à trans­met­tre ensuite les résul­tats de ses ses­sions à des Instances recon­nues, (telles que le Par­lement européen, la Cour Européenne des droits de l’Homme, les com­mis­sions de l’ONU et autres organ­i­sa­tions inter­na­tionales et régionales) pour qu’elle se sai­sis­sent elles-mêmes de dossiers à juger, jusqu’i­ci ignorés par la jus­tice, con­cer­nant le sujet débat­tu. En l’oc­curence, la guerre menée par l’E­tat turc con­tre un Peu­ple dont une majeure par­tie de ses com­posantes appar­ti­en­nent à son ter­ri­toire. Le but des audi­ences étant de “restau­r­er l’autorité des peu­ples lorsque les États et les organ­i­sa­tions inter­na­tionales ont échoué à pro­téger les droits de ces peu­ples”.

De larges extraits vidéos en qua­tre langues, sont désor­mais disponibles.

L’après midi du 15 mars et une large par­tie de la mat­inée du 16 mars furent con­sacrés aux “crimes de guerre”, “aux vio­lences con­tre les femmes”, pour lesquels un très grand nom­bre de témoignages oraux, archives pho­tographiques ou filmées ou inter­ven­tion en visio-con­férences, doc­u­men­tèrent l’acte d’accusation.

A cet instant, rap­pelons que l’ex­is­tence du mag­a­zine Kedis­tan ren­con­tra, dès 2015, cette actu­al­ité des “crimes”, et nom­bre de témoins de ceux-ci qui déposèrent ces deux jours. Nous sommes un cer­tain nom­bre de mem­bres de l’équipe, à avoir vécu et doc­u­men­té, au jour le jour, ces états de sièges où ces exac­tions et crimes de guerre se déroulèrent, à 5000 km de dis­tance, et avec l’aide de témoins sur place, de jour­nal­istes et pho­tographes de Turquie qui firent alors un tra­vail d’archives remar­quable qui servi­ra de preuves aujour­d’hui.  Nous n’en furent pas moins forte­ment impres­sion­nés, en revivant par l’im­age, la parole, la présence physique d’ac­teurs rescapés de ces crimes, qui ont déposé avec courage et déter­mi­na­tion, aujour­d’hui, devant ce tri­bunal, qui attestera de leur parole, ce qui revêt toutes les car­ac­téris­tiques de crimes de guerre, crimes con­tre l’hu­man­ité et crimes d’é­tat. Nous avions, avant cette ces­sion, listé dans un arti­cle dédié, ces “crimes de guerre”, leur con­texte et déroule­ment. Nous vous ren­voyons donc à cette lec­ture, pour cette par­tie du pro­gramme, les liens fig­u­rant dans l’ar­ti­cle. Cer­tains sont des vidéos qui furent vision­nées et déposées comme preuves.

Nous avons alors égale­ment eu une pen­sée forte pour notre amie Zehra, artiste et jour­nal­iste, incar­cérée à l’is­sue du siège de Nusay­bin, puis jugée pour en avoir doc­u­men­té les destruc­tions et mas­sacres. Une grande par­tie des 50 oeu­vres “évadées” en 2017, et qui s’ex­posent en Europe, serait à vers­er à ce dossier d’ac­cu­sa­tion. Rap­pelons que Zehra a été con­damnée a qua­si 3 années de prison et est tou­jours en geôle à Amed, pour avoir été témoin vivantE et avoir décrit les crimes de guerre.

L’ex­a­m­en de ce qui a été présen­té par l’ac­cu­sa­tion et argu­men­té comme des crimes de guerre, com­mis et dili­gen­tés par un Etat, avec une chaîne hiérar­chique de respon­s­abil­ités et des déci­sions pris­es en con­nais­sance de cause, s’est pour­suivi le 16 mars.

(A suiv­re…)


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