Pour les célébrations du Newroz, il y avait cette année entre 100 000 et 150 000 personnes, et ce, malgré le climat d’oppression maintenu par l’Etat turc. Cette année, les célébrations ont pu se dérouler également à Van, Mersin, et même Istanbul.
La foule est moins dense que l’an passé, et cela s’explique aisément par ces trois dernières années qui virent se succéder crimes de guerre, déplacements et remplacements de populations, destructions de villes et quartiers et régime de terreur à l’encontre du Peuple kurde. Et dans leur coeur, ce sont des millions de Kurdes qui fêtent un désir de Printemps.
Pourtant, les habitantEs des villes ayant subi depuis trois ans les exactions et destructions sous couvre-feux comme ceux de Nusaybin, Mardin, Cizre, Sirnak ou Yuksekova se sont rassemblés ici en grand nombre pour célébrer le Nouvel An kurde, alors qu’ils/elles vivent toujours pour beaucoup dans une très grande précarité.
Les “délégations” étrangères arrivées sur place ont reçu un accueil très chaleureux, au moment où les Etats européens ferment les yeux sur l’agression de l’Etat turc au Nord de la Syrie contre Afrin et la volonté d’Erdoğan de poursuivre sa guerre vers le Rojava et les cantons de la Fédération démocratique Nord Syrie. La question est dans toutes les têtes.
Rappelons-nous que la fête de 2017 fut endeuillée par l’assassinat de Kemal Kurkut, jeune étudiant violoniste, que la presse aux ordres fit passer alors pour une “bombe humaine”, et un attentat évité.
Malgré ce contexte, auquel les populations kurdes sont accoutumées, tant il est récurrent depuis des décennies, tout juste interrompu un moment par le “processus de résolution” qui fut rompu par l’Etat en 2015, le Newroz reste la fête de l’espoir dans un avenir sans oppression. Et les couleurs, les chants et danses accompagnent les feux et la force symbolique de Kawa le forgeron.
Le Newroz est également célébré de par le monde par la nombreuse diaspora kurde, et coïncide aujourd’hui avec les mobilisations pour Afrin, et l’appel à une journée mondiale.
Gazete Karınca précise dans un article que les participantEs pour accéder à la zone réservée, devaient passer par cinq points de contrôle, et publie aussi le ressenti de Ömer Çelik, journaliste, qui a couvert les célébrations à Amed.
“Lorsqu’on se rapproche de la zone, des points de contrôle installés par la police attirent l’attention. La police et l’Etat, avec ses canons à eau, ses forces spéciales, et les policiers anti terrorisme aux lunettes noires. Ceux et celles qui se laissent fouiller sont autoriséEs à accéder la zone.
L’état d’être de cette masse de personnes est indescriptible, débordant de colère entassée, de joie, d’émotion, d’espoir, et de rébellion. Il étonne comme d’habitude, les policiers. Tellement qu’une conversation entre deux policiers, à laquelle j’ai tendu l’oreille, est très parlante : ‘Frère, ils viennent malgré tout’. En effet, tout est décrit dans ces deux mots ‘malgré tout’ insérés dans cette phrase. Oui, la population d’Amed venait, sur la zone de Newroz, ‘malgré tout’… Parce que Newroz est la résistance, il est le printemps des peuples contre le fascisme.”
Et voici quelques images transmises par un correspondant pour le Pays des chats…