Faudrait avoir 7 vies de chat pour pou­voir com­penser celle que l’on brûle dans la crainte et l’ab­jec­tion en Turquie aujourd’hui.

Voilà main­tenant, comme si le pou­voir ne lui suff­i­sait pas, que le Sul­tan voudrait faire de nos enfants des mar­tyrs pour la patrie.

J’ai vu que je n’é­tait pas la seule à vouloir en par­ler, mais mieux vaut le faire tant qu’il est temps.

Faire parad­er des enfants en uni­forme à ses côtés sur une tri­bune rap­pelle toutes ces images de pro­pa­gande, qui, des guer­res mon­di­ales du début du XXe siè­cle en pas­sant par le fas­cisme, le nazisme, le stal­in­isme, se sont pour­suiv­ies avec tous les tyrans de la terre, à l’o­rig­ine de tant de mas­sacres et de vic­times devant l’hu­man­ité entière.

Quand on com­mence à faire penser qu’une nou­velle nais­sance est des­tinée à mourir pour une Nation, le tout enrobé dans une barbe islamiste, on prend logique­ment le relai de Daech et de son cal­i­fat dans la région.

C’est l’im­age qui s’af­fiche dans le pays aujour­d’hui, de dis­cours en dis­cours du Reis, avec la foule de sup­port­ers en extase prête à égorg­er l’en­ne­mi de l’in­térieur et mourir con­tre l’a­gresseur extérieur.

La pro­pa­gande désigne les Etats-Unis comme la main qui agit­erait une mar­i­on­nette kurde. Et ça fonc­tionne. Surtout qu’ils ont un Prési­dent qu’on invit­erait pas à la mai­son. Une alliance d’idées se fait sous le dra­peau nation­al, et Erdoğan devient le suc­cesseur du père de la Nation qui pro­longe la révo­lu­tion nationale de 1920. La grande Turquie n’au­rait plus de lim­ites, elle n’au­rait que des enne­mis, comme au début du siè­cle dernier, et son ciment serait l’is­lam et le dji­had con­tre l’en­vahisseur sup­posé et haï.

Le petit peu­ple, abreuvé à l’om­bre du dra­peau et des stat­u­aires, ébahi par le béton qui pousse un peu partout, gon­flé à bloc con­tre le “séparatisme et le ter­ror­isme”, est prêt pour le sac­ri­fice suprême. Entre petits boulots, morale big­ote et com­bines, il adule le chef qui le flat­te, et dénonce le voisin.

Et, quand en allumant ta TV, tu entends  « Pourquoi l’ar­mée turque irait-elle là-bas pour tuer des civils ? Si on devait tuer des civils, on com­mencerait par Cihangir, Nişan­taşı, Etil­er, n’est-ce pas ? Il y a plein de traîtres. Il y en a même encore à l’Assem­blée nationale » dans la bouche d’un ani­ma­teur, Ahmet Keser, sur la chaîne Akit TV, tu te deman­des jusqu’où les appels au meurtre et à la guerre iront dans les semaines à venir.

Qui reste à tuer dans les villes de l’Est ? Toutes les pop­u­la­tions ter­ror­isées et plongées dans la mis­ère et la pré­car­ité ? Celles qui sont dans les pris­ons ? Leurs lead­ers poli­tiques ? Et dans les quartiers d’Is­tan­bul ? Ceux qui ont voté HDP en 2015 ?

Vous allez dire que je vois tout en noir, et que, si l’on en croit les télés, la con­som­ma­tion se porte plutôt bien, et que les mar­ques turques expor­tent. La Turquie se mod­ernise et je serai allergique au change­ment et au progrès ?

Deux uni­formes se mélan­gent dans les plis du dra­peau, trois même, avec celui des hommes d’af­faires et politi­ciens cor­rom­pus. Un qui se vend comme une mode iden­ti­taire islamique, l’autre qu’on des­tine aux enfants martyrs.

Et l’E­tat libère des jour­nal­istes européens con­tre des con­trats d’arme­ment. Les autres, il les con­damne à perpétuité.

Mais, ras­surez-vous, vous ne ver­rez rien de tout cela en vous dorant la pilule sur les plages d’hô­tels à touristes, ou en vous trim­bal­lant le nez en l’air dans les lieux faits pour ça. Les geôles ne se vis­i­tent pas, les lieux de mas­sacre non plus, mais les mag­a­sins sont ouverts et les bou­tiques “typ­iques” aus­si. A l’oc­ca­sion, vous trou­verez tou­jours un chauf­feur de taxi jaune qui par­lera votre langue, et vous amèn­era quelque part, rien que pour vous, pour avoir un sou­venir pais­i­ble à racon­ter en rentrant.

Et, si vous avez un reste d’éthique, quand même, vous pour­rez pra­ti­quer la con­de­scen­dance… Si si, c’est per­mis. Vos Prési­dents appel­lent bien à la retenue, au respect des droits de l’homme et de la lib­erté d’ex­pres­sion… Tout ça tout ça… Vous avez donc droit à la com­pas­sion, pour le salut de votre con­science. Et de faire cheva­lier blanc démoc­rate à domi­cile, pour flaire pleur­er sur notre sort et mon­tr­er que vous êtes vous, cham­pi­ons de démoc­ra­tie… Mais atten­tion, sans dénon­cer votre silence et iner­tie, et surtout, pas de politique ! 

Ce sont les langues de vipère comme la mienne, qui voient le mal partout, comme pour Afrin et son rameau d’olivier…

Et j’ai même vu ça chez votre coiffeur :

Image de une : “Dans un système unitaire (comme la Turquie) un système présidentiel peut parfaitement exister. Il y a actuellement des exemples dans le monde et aussi des exemples dans l’histoire. Vous en verrez l’exemple dans l’Allemagne d’Hitler”  discours de janvier 2016

Turkey • Get ready for a trip to Ubu land Click to read

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Mamie Eyan
Chroniqueuse
Ten­dress­es, coups de gueule et révolte ! Bil­lets d’humeur…