Le Comité “Liberté pour Öcalan et pour tou.tes les prisonnier.es politiques” organise pour la seconde fois, une marche qui durera dix jours, du 8 au 17 février 2018.
Kedistan en rendra compte à travers le récit de militantEs francophones qui y participeront. Suivez cette publication qui sera mise à jour régulièrement.
Jeudi 8 février 2018
La longue marche pour la liberté d’Abdullah Öcalan a débuté ce matin.
Après une conférence de presse devant la Cour de Justice Européenne du Luxembourg, une centaine de marcheuses et marcheurs internationalistes, issu.es d’une quinzaine de nationalités d’Europe, d’Amérique Latine et du Moyen-Orient, se sont dirigé.es vers Thionville, première étape.
A la frontière française un contrôle de papiers minutieux leur a été infligé par la police locale et la gendarmerie. Une fois de plus, la lutte pour la liberté et l’arrêt des massacres aux Kurdistan est confrontée aux soupçons illégitimes de la France, un pays qui devrait plutôt reconnaitre le sang versé par les combattant.es du peuple kurde et des Forces Démocratique Syriennes contre Daesh et l’obscurantisme qui sévit dans cette région et dans le monde entier. Nous reconnaitrons là encore l’hypocrisie française et européenne qui persiste dans le silence et la criminalisation, permettant au régime fasciste turc de perpétrer son génocide. Demain, nous, marcheuses et marcheurs continuerons leur chemin avec la détermination de rompre ce silence !
Vendredi 9 février 2018
Samedi 10 février 2018
Les marcheurs ont quitté Thionville en direction du sud.
Après avoir reçu un message encourageant des YPG, ils et elles ont été reçu.es par le maire de Guenange.
Dix communes composent maintenant la grande marche, chacune ayant un numéro et un nom spécifique. À l’initiative des françaises, l’une des communes porte le nom de Sehid Kemal-Serhat Nicolas Akyol. Ces internationalistes dédient leur marche à ce jeune combattant, tombé dans les montagnes du Kurdistan, pour construire un monde juste et un nouvel espoir d’avenir pour toute l’humanité.
Le 3ème jour de la marche pour la Libération d’Öcalan s’est déroulé entre Talange et Pompieres (Moselle).
Six brèves provocations de fascistes turcs ont eu lieu pendant le trajet mais sans conséquences. Nous remarquons qu’il y a de bonnes réactions des passant.es à notre égard, allant de la sympathie au soutien sincère.
Cet après-midi, la télévision kurde sterk TV a diffusé simultanément et en direct le rassemblement à Paris, des mobilisations européennes pour Afrin et des images des marcheurs et marcheuses internationalistes. Ce média ainsi que çira TV ont des journalistes quotidiennement présent.es à nos côtés.
Nous nous apprêtons à participer au premier séminaire organisé sur la marche. Il s’agira de partager les expériences alternatives de nos pays respectifs.
Dimanche 11 février 2018
Ce matin, les internationalistes ont commencé par un séminaire sur les luttes existantes dans leurs pays et régions respectives.
Sont représentés : le Portugal, euskal herria (pays basque), Aragon, Andalousie, Catalogne, Italie, France, Suède, Norvège, Colombie, Allemagne. L’histoire de ces lieux et leurs liens avec le Kurdistan sont exposés en détail.
Il neige sur Talange mais rien n’arrêtent les marcheurs et marcheuses. Ni le vent, ni la grêle ne les empêchent de continuer leur marche en direction de saint Avold, où ils et elles passeront une partie de la nuit. Les slogans et la musique résonnent dans de nombreux villages tout au long de cet après midi, ce qui montre leur détermination.
Ce soir, les exposés continuent et l’humeur est à la danse. Comme souvent, des concerts sont prévus. Dans la nuit, ce sera le départ pour la Suisse.
Lundi 12 février
5eme jour. 8h00. L’arrivée en bus à Lausanne est accueillie par de nombreux et nombreuses camarades au centre culturel du Kurdistan.
Une conférence de presse est organisée devant l’édifice où ont été signés les accords de Lausanne en 1923. 22 représentants d’organisations prennent la parole devant les caméras. Parmi eux, le pyd, le parti écologique suisse, un élu local, le mouvement des femmes Kurdes en Europe…
Nous sommes un millier à marcher aujourd’hui à travers la ville suisse puis le long du lac, et dans des quartiers très aisés en périphérie.
La soirée sera courte car la veille, un grand échange culturel eut lieu. En effet, des chants et danses traditionnelles de nombreux pays présents pour la marche ont été présentés. La soirée fût festive …
Mardi 13 février
Sous un soleil radieux reflété par l’eau du lac, bordé de montagnes enneigées, la marche internationaliste a continué sa route aujourd’hui au côté des marches du PYD et de la jeunesse kurde d’Europe.
Grâce à la précieuse hospitalité des familles kurdes qui les ont invité.es dans leurs maisons la nuit dernière, les marcheuses et marcheurs ont pu se reposer et récupérer des forces pour entamer la seconde moitié de leur long périple. Ce fut une rencontre forte et une grande opportunité pour connaître et comprendre l’histoire et les expériences de ces militant.es révolutionnaires souvent forcé.es à l’exil.
Une chose est sûre, parce qu’il ne reconnait pas l’autodetermination, la représentation, l’existence, la résistance et la diversité des peuples, le système d’Etat-Nation est voué à perpétrer les guerres impérialistes pour ses intérêts économiques. Plus d’une vingtaine de nations marchent désormais ensemble, non seulement pour appeler l’ONU à prendre ses responsabilités contre l’invasion turque à Afrin, mais aussi pour amorcer l’idée d’une organisation de véritables nations unies et libres, dans laquelle tous les peuples seraient réellement représentés, sur la base du système du confédéralisme démocratique, inspiré par Abdullah Öcalan et le mouvement de libération kurde.
Si la solidarité internationale est le moteur de cette marche, au-delà des frontières c’est bien le projet d’une Nation démocratique qui est à l’horizon…
Voulez-vous un autre témoignage ?
Après une bonne nuit, logé.es chez des familles de la diaspora kurde, les internationalistes reprennent la marche de Lausanne. “Libérez Öcalan !” “Biji serok APO !”, scandent les manifestants. Le temps est redevenu clément et le paysage qui les entoure, est apprécié. Contrairement à la veille, le cortège de tête est initié par les Kurdes, suivi des internationalistes. Plusieurs médias couvrent maintenant 1500 marcheurs et marcheuses. “Erdogan, terroriste !”, chantent-ils.
Une trentaine de personnes solidaires les rejoignent au cours de la journée, principalement venus de la péninsule. Le soir, les 10 communes se réunissent pour procéder aux critiques et auto-critiques de l’organisation de la marche. Certains pays rédigent des rapports. l’Assemblée générale effectue un compte-rendu oral tardif, ce qui ne permettra pas au séminaire prévu d’avoir lieu. Il est donc reporté.
Jeudi 15 février
Nous ne sommes maintenant plus qu’à 8km de Genève.
Cela fait exactement 19ans jour pour jour qu’Öcalan, le leader kurde, a été arrêté par les services secrets turcs, avec l’aide d’une collaboration internationale. Depuis il est détenu et isolé sur l’île d’Imrali. C’est pour demander sa libération, et celle de tou-te‑s les prisonnier-e‑s politiques en Turquie, que nous marchons depuis huit jours à présent.
Nous avons eu la chance ce midi de recevoir la visite de Saleh Muslim, responsable des relations extérieures du Tev-dem, et d’apprécier son discours lors de la pause déjeuner.
À la suite de cette intervention, s’est tenue une réunion des femmes internationalistes dans le but d’élaborer de nouvelles perspectives d’organisations.
Arrivé-e‑s à Genève, c’est devant l’ONU que se regroupent tous les cortèges.
Une nouvelle conférence de presse est tenue, et de nombreuses prises de parole ont lieu en représentation des organizations kurdes, internationalistes et politiques locales.
Dans la foulée, les marcheurs et marcheuses sont invitées à “la place”, un cinéma où ils/elles participeront à un programme en direct de la TV kurde, au côté de leurs camarades du mouvement.
Et c’est dans son grand amphi, que sont projetées des images du mouvement de libération du peuple kurde et de son leader, amplement acclamé.
S’en suivent des discours de personnalités politiques kurdes du parlement turc et des messages des marcheuses/marcheurs. La marche se termine à peine que déjà nous nous préparons à entamer deux jours de rassemblement et manifestation à Genève et Strasbourg.
Vendredi 16 février
La 9ème journée se déroule donc à Genève, devant le siège des nations unies. Une tribune est montée pour l’occasion.
Les slogans et la musique se mêlent aux prises de parole dans de nombreuses langues (allemand, turc, français, espagnol, anglais..) avec une traduction systématique en kurde.
Parmi les intervenants, on trouve des députés kurdes, des partis de gauche comme “les verts” ou “ensemble”, des sympathisants de la cause kurde. Puis les représentant-e- des 17 nationalités des internationalistes s’expriment à leur tour.
Les discours mettent en avant :
L’urgence de l’arrêt des bombardements à Afrin, le silence abjecte de la commission d’enquête de l’ONU — au courant de tout -, et la non-intervention des services secrets des Nations Unis, complices de ces massacres par leur passivité.
Les flux d’argent et les ventes d’armes de pays européens à la Turquie sont aussi dénoncés. Les discours xénophobes et racistes, qui consistent à justifier la “fermeture” de frontière pour les migrants à l’entrée de l’Europe, sont devenus le message officiel des médias de masse. Le danger de ce fait exposé. Par conséquent, la question est enfin posée : “qui sont les vrais terroristes?”
Un engouement fort pour le confédéralisme démocratique est unanimement exprimé par les internationalistes, qui décrivent en cela autant un exemple qu’un espoir.
Tout de suite après l’événement, les marcheurs et marcheuses décollent pour Strasbourg.
Ils seront invité-e‑s dans des familles au cours de la nuit.
Dimanche 18 février
Dernier jour…
Bravant de fortes rafales de vent, de pluie et de neige plus de dix milles personnes ont défilé dans les rues de Strasbourg ce matin.
Malgré le froid qui leur glaçait les os, c’est avec le coeur rempli de chaleur humaine et solidaire que kurdes et internationalistes sont arrivé.es main dans la main à l’esplanade où s’est ensuite tenu le meeting annuel pour la libération d’Abdullah Öcalan.
Sous les applaudissements, une camarade a lu le communiqué collectif de la marche qui fut suivi d’un message de la part des femmes et féministes internationalistes, pour les femmes kurdes, qui nous inspirent tant. Réuni.es sous la tente du catring, c’est sous les slogans de soutien au mouvement de libération du Kurdistan dans toutes les langues que les marcheuses et marcheurs se sont progressivement séparé.es.
Les expériences et la ferveur révolutionnaire partagées durant cette deuxième grande marche internationaliste resteront gravées dans nos mémoires, avec la certitude que ce n’est qu’une étape qui se termine et que nous continuons ensemble notre lutte commune au delà des frontières.
Aucun obstacle ne nous arrêtera, les peuples unis jamais ne seront vaincus :
¡NO PASARÁN!
Déclaration lue à Strasbourg
Chers camarades, de la part de celleux qui marchent en solidarité pour la libération d’Abdullah Öcalan et de tou.tes les prisonnier.es politiques en Turquie et dans le monde entier, pour la défense de la révolution du Rojava et la fin de l’invasion turque à Afrin, nous vous saluons!
Nous venons de différents coins du monde, nous sommes des êtres humains d’origines différentes et de plus de 17 nationalités. Nous ne pouvons nier que dans chacun des lieux d’où nous venons, des luttes et des résistances se manifestent chaque jour. Cependant, en raison des liens historiques qui unissent nos peuples, nous ne pouvons pas non plus nier que ce qui peut se produire là-bas affectera le monde entier et nous inspirera à lutter contre les institutions de l’oppression, et ce où que nous soyons.
La plupart de celleux d’entre nous qui sommes ici n’ont pas souffert de ce que vous souffrez dans la diaspora. Nous pouvons même voyager jusqu’à vos terres alors que vous n’avez pas le droit de le faire. Quel genre de monde est celui-ci, dans lequel les enfants du Kurdistan ne peuvent pas retourner chez elleux, rendre visite à leurs familles, vivre et mourir dans leur pays ? Cela nous place dans une position privilégiée, et ce privilège implique une responsabilité indéniable : travailler sans relâche jusqu’ à ce qu’il n’y ait plus de frontières ni de guerres, jusqu’à ce que les enfants de votre pays puissent revenir, jusqu’à ce que le feu de la révolution éclaire tous les coins de ce monde et jusqu’à ce qu’il n’y ait plus personne dans ce monde qui doive quitter de force sa maison bien-aimée.
Nous sommes convaincus que le jour viendra où les nations sans État récupéreront la place qui leur a été volé par les États-nations. Mais pour vous, c’est déjà une réalité : vous avez repris le Rojava des mains du régime syrien et vous l’avez défendu contre DAESH, vous avez construit le Confédéralisme Démocratique, un système politique en opposition avec les Etats-nations, vous avez développé un modèle d’économie écologique au lieu de l’exploitation industrielle de la nature mère, les femmes reprennent et construisent leurs propres espaces, que le patriarcat et le capitalisme leur ont volés, votre jeunesse veut revenir dans sa patrie et vos grands-mères la défendent avec des armes si nécessaire. C’est pourquoi nous avons le devoir commun de défendre la révolution du Rojava afin de permettre à cette flamme de continuer à brûler de plus en plus, pour nous montrer ainsi le chemin de la libération collective, vers un monde juste et pacifique.
Nous sommes confronté.es à la chute de la civilisation capitaliste et à l’aube de la modernité démocratique. En tant qu’internationalistes, nous répondons à votre invitation à ramer tous ensemble dans le même bateau contre les forces capitalistes qui se défendent avec les bombes de leur effondrement éminent.
Ni la pluie, ni la neige, ni les insultes et les provocations des fascistes turcs n’ont pu arrêter notre détermination à marcher pour la liberté d’Abdullah Öcalan et de tous les prisonniers politiques en Turquie comme dans le reste du monde, pour la défense de la révolution au Kurdistan et pour la fin de l’invasion en Afrique.
En tant qu’internationalistes, nous vous saluons et vous respectons, votre lutte nous inspire et nous donne espoir,
Vivent les peuples qui luttent, car la résistance est vie.
Vive le peuple kurde qui est déterminé à ne pas être anéanti.
Vive la Révolution du Kurdistan.
Vivent la solidarité et la camaraderie entre les peuples.
Communiqué féministe
En tant que femmes internationalistes, nous souhaitons saluer les 5000 ans de résistance des femmes du Kurdistan, du Moyen-Orient et du monde entier.
Sous les ruines du système patriarcal capitalistes, femmes kurdes, vous avez su conserver et protéger la culture de notre bien-aimée déesse-mère.
Pendant 40 ans, vous avez organisé l’autodéfense des femmes et grâce à votre amour pour la vie, vous êtes en tran de vaincre l’obscurantisme et le fascisme de Daesh et de l’Etat turc au Rojava et dans toute la Fédération démocratique du Nord de la Syrie.
Sur les pas d’Ishtar, vous emmenez des milliers de femmes sur le chemin de la liberté.
Nous vous remercions pour l’espérance et l’apprentissage que vous nous offrez.
De tout notre cœur, nous déclarons que nous nous joignons à votre lutte.
L’heure est arrivée pour les mots de se transformer en actions.
Parce que ce siècle est celui des femmes, il est aussi celui de la libération totale, de la société et de la nature.
En tant que femmes et féministes :
- Nous saluons les femmes qui ont écrit leur nom dans l’histoire et celles qu’il reste à écrire.
- Nous saluons les mères qui luttent pour la vie face à l’assassinat de leurs enfants.
- Nous saluons les combattantes qui nous défendent toutes au Rojava.
- Et, enfin, nous saluons Arên Mirkan, Avesta Xabur et toutes les femmes martyres du Kurdistan.
Vive la résistance des femmes d’Afrin !
Vive la révolution des femmes du Kurdistan !
Vive Abdullah Öcalan !
La femme, la vie, la liberté !
In English: The great march • Day after day… Click to read