Oui, Zehra, est-ce donc ain­si que les femmes vivent ? Aragon t’au­rait écrit ain­si, nous en sommes sûrEs.

Mais ce sont tes mots que nous glis­sons dans cet arti­cle, ceux avec lesquels tu aurais pu pour­tant lui répondre.


Des mots, en petits extraits, de let­tres que tu fais par­venir. Et il y en aurait tant d’autres, par­mi les plus récentes, où tu par­les de la “force”, et de l’en­fer­me­ment qui fait puis­er en soi, pour la partager avec tes com­pagnes incarcérées.

Alors, avant que tu ne par­les à beau­coup, lorsque tes dessins et toiles seront enfin exposés sous leurs yeux dans les mois qui vien­nent, à Genève, Paris, en Bre­tagne encore ou dans le Sud de la France, nous posons là, tes mots, dans le désordre…

Et pour celles et ceux qui te con­nais­sent mal, nous leur rap­pelons seule­ment qu’un livre te racon­te

Quant à notre quarti­er, il est entouré de bar­belés. Même les fenêtres à bar­reaux, sont aus­si cou­verts de bar­belés. Tous les soirs, appa­rais­sent dans le ciel, deux étoiles. Pour les voir, je grimpe vers la fenêtre. Mais cette fois, ce sont les bar­belés qui me coupent la vue…”

Nous vivons toutes ensem­bles une vie de com­mune. Tout ce que nous pos­sé­dons est com­mun. Même notre souf­france et notre joie sont com­munes. Et cela rend l’être humain fort.”

Je con­tin­ue à dessin­er sur des jour­naux, même si c’est avec un sty­lo bille. J’ai com­mencé aus­si à écrire des nou­velles. Ici, chaque femme à une his­toire dif­férente. Je pense écrire leurs his­toires et les illus­tr­er. Si je sors un jour, je pour­rais les pein­dre aus­si sur toile. Mon incar­céra­tion ne me pèse alors pas trop. Dans cette péri­ode, l’in­térieur et l’ex­térieur me parais­sent iden­tiques. Le plus pesant, c’est de te dire que tu n’es pas coupable, que le vrai crime est de t’ac­cuser injuste­ment, et que la per­son­ne en face de toi ne soit pas dif­férente d’un mur froid.”

Ensuite, les let­tres arrivent… Je m’en­t­hou­si­asme en me dis­ant qu’il y a de la vie quelque part.”

Ici, cha­cune a une his­toire. Une amie dit sans cesse ‘Ils nous ont volé nos rêves. Nous ne pou­vons plus rêver’. Et c’est vrai. A force d’es­say­er de nous pro­téger de la vio­lence, de penser à ce qui peut nous arriv­er à tout moment, nous ne pou­vons plus bâtir de rêves. La vie est dure, mais si tu es Kurde, ou d’un peu­ple opprimé dans un pays quel­conque, la vie est alors dix fois plus dure.”

C’est comme si on était un peu­ple mau­dit. Il n’y a pas d’en­fance, ni de jeunesse. Ils ne nous ont lais­sé rien vivre. Si on nous demandait, c’est peut être nous qui décriri­ons le mieux le bon­heur, parce que nous en avons faim. C’est la per­son­ne sur le point de mourir de soif, qui peut mieux con­ter l’eau. C’est la même chose pour nous.”

Je des­sine sans arrêt dans ma tête. Je trans­forme la moin­dre forme. Par exem­ple, ne serait-ce qu’un bout de pein­ture écail­lée sur le mur, j’y vois des fig­ures. Je des­sine sur les jour­naux. J’écris des nou­velles. J’e­spère dans l’avenir, faire une expo­si­tion où, à côte de chaque tableau représen­tant une femme, il y aura son histoire.”

Zehra qui vous aime beaucoup.
Eté 2017, Geôle d’Amed

Zehra

Nous n’avons de cesse à Kedis­tan de rap­pel­er que notre engage­ment à soutenir Zehra Doğan dans l’épreuve d’emprisonnement qu’elle tra­verse tient à trois choses essentielles.

• Elle est d’abord dev­enue en trois ans une amie, comme jour­nal­iste, comme femme, comme réelle insoumise, kedi d’adoption…

• Elle a tra­ver­sé ces dernières années en vivant et en incar­nant la force d’une l’hu­man­ité préservée, con­tre la sauvagerie d’un Etat, qu’elle a exprimé comme artiste/journaliste, et femme kurde. Qua­tre qual­ités com­bat­tues par le rouleau com­presseur et l’ob­scu­ran­tisme du régime AKP de Turquie.

• Elle par­le pour toutes et tous, et ne cède rien sur sa volon­té de rester dans la parole col­lec­tive et la sol­i­dar­ité, mal­gré ce deux­ième enfer­me­ment. “Le bâti­ment de pier­res” n’au­ra pas rai­son d’elle.

Ain­si avons-nous à quelques unEs imag­iné, après avoir fait évad­er ses oeu­vres, de faire par­ler Zehra au delà des murs du bâtiment.

Le livre qui sera en librairie dès jan­vi­er a ouvert la “voix”. L’ex­po­si­tion, main­tenant prête pour tous les accrochages, ouvri­ra “les yeux”.

Nous aurons l’op­por­tu­nité de par­ler bien plus large­ment du présent et du passé de la Turquie, et des pos­si­bles qui s’ou­vrent au Moyen-Ori­ent, mal­gré la bar­barie et la guerre. Toutes les sol­i­dar­ités seront tis­sées en grand.


Alors que faire à votre niveau ?

• Vous pou­vez écrire à Zehra, à con­di­tion de le faire en langue turque. Vous trou­verez des mod­èles de textes à recopi­er ICI. Vous pou­vez organ­is­er des “ate­liers d’écri­t­ure”, en faisant décou­vrir le livre…

ATTENTION : Une mesure d’éloignement for­cé vient d’être prise par l’Etat turc con­tre Zehra Doğan. Le 23 octo­bre 2018, elle a été envoyée dans la sin­istre prison de Tar­sus (Tarse). LIRE : Turquie • Zehra Doğan déportée avec 20 pris­on­nières et partagez autour de vous comme sur les réseaux sociaux.
Toute cor­re­spon­dance vers l’ancienne adresse à la prison de Diyarbakır ne retrou­vera pas Zehra. Nous com­mu­niquons sa nou­velle adresse :

Zehra Doğan C‑3
Tarsus Kadın Kapalı CİK 
Alifakı Mahallesi Alifakı sokak 
Tarsus – MERSİN 
TURKEY

• Vous pou­vez aider au rem­bourse­ment du crédit engagé pour met­tre en place la logis­tique de cette cam­pagne de sou­tien, pour mon­ter l’ex­po­si­tion, encadr­er les 50 oeu­vres (6000€). Un appel à dons est fait ICI.

• Acheter le livre via le site de Kedis­tan offre d’of­fice 6 € pour la cagnotte. Vous pou­vez pass­er des com­man­des autour de vous. Le livre sera en librairie dès janvier.

Vous pou­vez pren­dre con­tact pour organ­is­er une ini­tia­tive de sou­tien dans l’an­née 2018, en sachant qu’un pro­gramme est déjà engagé, que nous com­mu­ni­querons très bien­tôt. Une expo­si­tion de repro­duc­tions de haute qual­ité (20 oeu­vres choisies) sera disponible dès décem­bre à de bonnes con­di­tions pour les bud­gets mod­estes d’as­so­ci­a­tions locales…

• Vous pou­vez partager ces arti­cles sur vos pages de réseaux soci­aux, dans vos listes d’amiEs… Ayez ce réflexe, à par­tir des icônes sur la droite de l’ar­ti­cle, c’est important.

Nous ne dif­fu­sons pas de façon volon­taire les “images” des oeu­vres de Zehra. Kedis­tan a désor­mais man­dat pour pro­téger sa pro­priété artis­tique et intel­lectuelle, et Zehra des­tine ses oeu­vres à la vente pour 2019. Le pro­duit de cette vente ira aux familles de pris­on­nierEs et celles qui ont tout per­du lors des destruc­tions de ces trois dernières années.

Tout sup­port média peut bien sûr par­ticiper à sa façon et piocher pour cela dans le dossier spé­cial sur le site, pour en savoir plus. C’est ICI.

Pour le site de Zehra en trois langues, et la page dédiée : la page face­book et le site

Zehra Doğan doit recou­vr­er sa lib­erté, et votre sou­tien y contribuera.

Si, pour Aragon, “la femme était l’avenir de l’homme”, il est dit aus­si qu’elle sera sans con­teste celui du Moyen-Orient…


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