Le journaliste d’investigation turc, Fehim Taştekin, dont les reportages sur la Syrie ont suscité l’intérêt du grand public, a publié mercredi sur son compte Twitter, une réaction suite à une décision de justice interdisant son livre “Rojava : Kürtlerin Zamanı” (Rojava : Le temps des Kurdes).
À la suite d’un verdict rendu par le tribunal de la ville de Kahta, dans la province de Adıyaman , à l’Est de la Turquie, le livre de Taştekin a été interdit à la vente, en raison d’accusations de “propagande terroriste”. Dans son tweet, Taştekin a souligné l’absurdité de la décision du tribunal, qui accuse le livre d’avoir les “propriétés” d’une organisation terroriste.
Soulignant que son livre a été publié légalement et n’a jamais fait l’objet d’aucune enquête juridique, Taştekin a également critiqué le fait que son livre soit considéré comme une preuve de “propagande terroriste” dans des actes d’accusation dressés à l’encontre d’autres personnes accusées de “terrorisme” et de “crimes”.
Mithat Sancar, professeur et député du Parti démocratique des peuples (HDP), a posé des questions aux parlementaires et au Premier ministre turc, au sujet de trois livres qui viennent d’être interdits — à savoir ce livre de Fehim Taştekin et deux autres, “Birakujî” (Feud between Brothers) de Faysal Dağlı, et “Kürt Tarihi” (Histoire kurde) d’Aytekin Gezici.
Se référant à l’article 28 de la Constitution turque qui stipule: “La presse est libre, elle ne peut être censurée”, Sancar a posé les questions suivantes au Premier ministre : “Comment un livre peut-il être qualifié d’organisation terroriste? Combien de livres y a‑t-il actuellement dont la distribution est interdite en Turquie? Quels sont ces livres ? Est-ce que l’interdiction de vendre et de distribuer les livres est conforme à la constitution et aux lois internationales sur les droits de l’homme ? Quelles sortes de précautions prévoyez-vous pour empêcher de telles interdictions? ”
Traduction des Tweets :
Je ressens le besoin d’éclaircir les horreurs qui tournent autour du livre que j’ai écrit sur le Rojava et les Kurdes. Avec votre permission, je m’exprime en plusieurs publications
1- Mon livre intitulé “Rojava : Le Temps des Kurdes” dans lequel je raconte l’histoire proche des Kurdes en Syrie, et la dernière période, a été malheureusement interdit par le tribunal.
2- D’abord, les exemplaires du “Rojava : Le Temps des Kurdes” ayant été trouvés dans les domiciles de membres de Eğitim-Sen [syndicat des enseignantEs] et confisqués, ont été utilisés comme preuves à l’encontre de ces personnes.
3- A Ankara, encore, mon livre a été confisqué au domicile d’un enseignant arrêté pour un tweet, et a été versé dans son dossier comme preuve à son encontre.
4- Lorsque notre précieux collègue Aydın Engin, a été arrêté dans le cadre du procès Cumhuriyet, il a été obligé de subir un interrogatoire sur le fait de posséder le livre à son domicile.
5- Dernièrement, Ali Bozan, un des avocats du IHD [Association des Droits de l’Homme] arrêté à Mersin, a été accusé d’appartenance à une organisation [terroriste] à partir de la présence du livre Rojava confisqué chez-lui.
6 & 7- Me Bozan a subi des questions totalement insensées telles que : “Dans quel but possédez-vous ce livre d’organisation à votre domicile ?”, “Avez-vous porté plainte auprès d’une autorité quelconque concernant ce livre?”, “A qui avez-vous donné des consignes, sur les sujets concernant l’organisation se trouvant dans le contenu du livre?”
8- Or, “Rojava : Le temps des Kurdes” est un livre publié légalement, et qui n’a été objet d’aucune enquête depuis un an.
9- Il est évident qu’il y avait besoin de preuves pour “brûler” certaines personnes et un livre portant le titre “Rojava” faisait leur affaire.
10- Le fait d’utiliser un livre qui n’est pas interdit comme preuve de crime était vaine. Par ailleurs, posséder un livre interdit n’est pas illégal, et ne peut pas l’être.
11- Je pense que pour supprimer la contradiction entre “utiliser” un livre légal “comme preuve de crime”, il fallait interdir également le livre.
12- Au bout du compte, l’interdiction est tombée sur le dos du Tribunal Pénal de Kahta. Le verdict stipule “Livre portant le caractère d’organisation terroriste”.
13- L’avocat a donné une requête, précisant qu’il ne s’agit pas d’un livre de propagande, mais d’un livre de recherches et qui approche les parties avec objectivité.
14-Notre travail consiste à témoigner et écrire ce qui est observé. Je n’ai pas trahi les réalités que j’ai vues et entendues, et je ne les trahirai pas.
15- Le fait d’écrire les réalités les plus brûlantes, ne peut pas être un crime. Ce livre ne peut être une preuve utilisable à l’encontre de ses lecteurs/trices. Ce livre ne peut être une “organisation terroriste”.
16- Le fait d’accuser des personnes qui n’ont pas d’autre revendication que la Paix, de propagande terroriste est immoral. Je n’ai pas d’autres choses à dire.
English: Fehim Taştekin’s book “Rojava, the time of the Kurds”, banned Click to read