Quand les mon­tagnes pleurent est le pre­mier roman de Ghar­bi Mustafa. Il a été pub­lié en 2013, en anglais, sous le titre When Moun­tains Weep: Com­ing of Age in Kurdistan.

C’est un roman inspiré de sou­venirs de jeunesse au Kur­dis­tan d’I­rak à l’époque de Sad­dam Hus­sein. Les aven­tures et mésaven­tures du jeune Hamko à Mossoul, la dis­crim­i­na­tion, l’en­doc­trine­ment du Baas à l’é­cole, les pre­miers amours, l’enrôlement for­cé, et l’ef­froy­able exode des Kur­des dans les mon­tagnes turques en 1991.

Cette his­toire est en grande par­tie inspirée des sou­venirs d’en­fance de l’au­teur, qui a gran­di au Kur­dis­tan d’I­rak. D’une plume ironique et acerbe par­fois, il dépeint la vie d’une famille kurde à l’époque de Sad­dam Hus­sein, le quo­ti­di­en à Mossoul, l’en­doc­trine­ment du par­ti Baas dans les écoles, les crimes d’hon­neur, le com­bat des pesh­mer­gas dans les mon­tagnes, les amours de jeunesse, l’en­rôle­ment for­cé dans l’ar­mée. Ce roman, pub­lié en anglais en 2013, nous racon­te toute la ques­tion kurde à tra­vers le regard d’un jeune garçon, et résonne étrange­ment avec l’actualité.

Tra­duc­tion française par Céline Mercier.

Gharbi Mustafa


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Gharbi Mustafa

Tit­u­laire d’un doc­tor­at de la fac­ulté des études ori­en­tales de Varso­vie, en Pologne, il est pro­fesseur de lit­téra­ture anglaise et étrangère à l’Université de Dohuk, au Başur, Kur­dis­tan du sud, Irak.


Quelques extraits du livre, pour don­ner l’eau à la bouche…

Mon école était proche du ter­rain de foot­ball. Un jour, des hommes en armes du par­ti Baas vin­rent dans notre étab­lisse­ment et annon­cèrent qu’ils allaient nous emmen­er voir un match. Nous étions ravis, d’abord parce que nous ado­ri­ons le foot­ball et ensuite parce que nous allions rater les cours.
En péné­trant sur le ter­rain, nous ne vîmes aucun signe de match, juste un grand nom­bre d’hommes en uni­formes mil­i­taires. Curieuse­ment, cinq piquets de fer avaient été fixés dans le sol, au cen­tre du ter­rain. Nos mines s’allongèrent. Nous allions encore devoir assis­ter à une céré­monie ennuyeuse du par­ti Baas. Cepen­dant, nos expres­sions passèrent rapi­de­ment de la décep­tion à l’hor­reur quand les sol­dats amenèrent cinq jeunes hommes aux yeux bandés et les attachèrent aux poteaux.
La sit­u­a­tion se ten­dit encore plus lorsque l’un des garçons de ma classe désigna le ter­rain et cria :
– Oh, mon Dieu! C’est mon frère, Samir !.…”

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J’entrai dans le cer­cle, je pris sa douce main dans la mienne, et dan­sai comme s’il n’y avait pas de lende­main, bras con­tre bras, hanche con­tre hanche, épaule con­tre épaule. La musique entê­tante et l’ivresse de la danse m’encouragèrent à pass­er à l’étape suiv­ante, celle con­sis­tant à ser­rer trois fois la main de la fille — ce qui sig­ni­fie « tu me plais ».
Je m’exécutai, puis attendis sa réac­tion sans oser la regarder.
Comme la danse se pour­suiv­ait, je ten­tai une nou­velle étreinte de la main, tou­jours sans oser lever les yeux.”

*

La fron­tière avait été bouclée et l’ar­mée turque ten­tait de repouss­er les Kur­des de l’autre côté. Tout à coup, la mon­tagne fut sec­ouée par le ton­nerre des tirs d’ar­tillerie irakiens. Les réfugiés qui se trou­vaient à l’avant de la file paniquèrent et firent un bond en avant, les sol­dats turcs ouvrirent le feu. Je tombai à plat ven­tre dans la boue spongieuse et étreig­nis le sol jusqu’à ce que les tirs aient cessé. Puis je me rel­e­vai lente­ment et regar­dai autour de moi.
« Vous avez tué ma fille ! », hurlait une femme à prox­im­ité, « Nous avons fui Sad­dam, seule­ment pour trou­ver la mort sous votre mitraille ! »
Nous étions pris au piège entre les deux plus puis­santes armées du Moyen-Ori­ent et il sem­blait n’y avoir aucune échappatoire.”


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Ghar­bi Mustafa
Quand les mon­tagnes pleurent

Broché | mai 2017 | 158 pages
ISBN : 978–2‑343–12014‑0 | EAN PDF : 978214003653

Pour com­man­der le livre, ou télécharg­er la ver­sion numérique,
ren­dez-vous sur le site de l’Har­mat­tan.

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