Depuis quelques mois nous avions peur à tout moment d’ap­pren­dre la mau­vaise nou­velle de l’ar­resta­tion de Zehra Doğan. Depuis sa dernière con­damna­tion début mars, elle vivait un sur­sis tout provisoire…

Zehra, en se ren­dant de Diyarbakır à Mardin, où vit sa famille, a été arrêtée aujour­d’hui lors d’un con­trôle polici­er, sur la route. Elle a été mise en garde-à-vue avec le motif d’une “con­damna­tion con­fir­mée à son encon­tre”, puis envoyée à la prison de Diyarbakır, de type E.

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Zehra, avait été arrêtée le 23 juil­let 2016, alors qu’elle pour­suiv­ait son activ­ité jour­nal­is­tique, et accusée d’ap­par­te­nance à une organ­i­sa­tion illé­gale et de pro­pa­gande pour cette organ­i­sa­tion, deux chefs d’ac­cu­sa­tions basés sur des “témoignages secrets”.

Le 9 décem­bre 2016, lors de la pre­mière audi­ence de son procès, qui s’é­tait déroulée au tri­bunal de Mardin, elle avait été libérée sous con­trôle judi­ci­aire. Lors de la deux­ième audi­ence, le 2 mars 2017, elle a ensuite été con­damnée à 2 ans 9 mois et 22 jours de prison, pour avoir “pub­lié les notes de Elif Akboğa”, une petite fille de 10 ans.

Les notes de résistance

Cha­cunE doit com­mencer une nou­velle vie. Cha­cunE se des­sine un chemin. Et sur les chemins de Nusay­bin, cer­tains meurent, d’autres sont blessés. Cer­tains enfants écrivent dans leur cahi­er de note, les secrets qu’ils/elles parta­gent avec leur amiEs, moi qui suis oblig­ée de grandir pré­co­ce­ment, j’écris sur mes feuilles, tous les jours, une nou­velle mort.

En ce moment on entend des bruits de tir. Quand les bruits s’in­ten­si­fient, nous nous réfu­gions dans nos maisons. Ensuite, quand les chars par­tent, nous retournons dans la rue, et nous faisons du bruit. Je sais qu’un jour, on enten­dra nos voix.

Ceux qui nous attaque­nt… que le Dieu les punisse. Je pense que nous avons rai­son et quand je serai grande, je dirai à tout le monde que nous avons rai­son. J’ap­pelle depuis ici, les enfants qui sont dans l’Ouest : A Nusay­bin, les écoles sont brûlées, il n’y a plus de leçons. Ce matin, quand j’é­tais à l’é­cole, il y a eu des annonces, le cou­vre-feu a été déclaré. Nous avons inter­rompu les cours et nous avons cou­ru vers nos maisons. Je suis arrivée chez-moi, au dernier moment, si je n’y étais pas arrivée, je serais morte. De toutes façons, nous n’avons plus d’é­cole. Nous n’avons pas pu y aller cette année, mais vous, con­tin­uez à étudi­er et créez un beau monde. Ne nous oubliez jamais, jamais. Parce que nous, nous ne vous oublierons pas. Si nous arrivons à créer un beau monde, nous ne vous oublierons pas.

Et aus­si, changez un peu vos chaînes télé, regardez les nôtres. C’est les vérités qui y sont racontées.

Le deux­ième chef d’ac­cu­sa­tion, plus ubuesque encore, est d’avoir “partagé ses oeu­vres réal­isées à Nusay­bin”, notam­ment celle où elle avait repro­duit une pho­to de Nusay­bin dévastée ornée de grands dra­peaux turcs… Dessin réal­isé sur une tablette numérique, et resté virtuel, réal­isé à par­tir d’une pho­togra­phie, elle bien réelle, prise et partagée sur les réseaux soci­aux par les mil­i­taires eux-mêmes, pour célébr­er les destructions.

Ses avo­cats avaient fait appel, et le tri­bunal local d’An­tep avait pour­tant con­fir­mé la peine, dans le courant du mois de mai dernier, et cha­cun depuis vivait dans la crainte d’une nou­velle arresta­tion suiv­ie de son incar­céra­tion. Zehra Doğan est donc à nou­veau dans les geôles de l’E­tat turc.

Zehra, artiste et jour­nal­iste, a tra­vail­lé comme jour­nal­iste depuis 2012, au sein de JINHA, agence d’in­for­ma­tion de femmes, qui avait été égale­ment fer­mée par l’E­tat turc le 29 octo­bre 2016. Elle est égale­ment diplômée de Beaux-Arts. Elle a reçu en 2015 le prix de jour­nal­isme de Metin Gök­te­pe, pour son tra­vail sur les femmes yézi­dies per­sé­cutées par Daesh.

Zehra reçoit le prix de jour­nal­isme “Metin Gök­te­pe” en avril 2015.
Avec la mère de Metin…

Vous pou­vez lire, en com­plé­ment de ce pre­mier arti­cle, qui sera suivi d’une cam­pagne pour sa libéra­tion à laque­lle nous vous con­vions, tous les arti­cles de Kedis­tan sur Zehra Doğan, en suiv­ant ce lien… Vous trou­verez dans ce dossier spé­cial, un reportage, ses mes­sages, et toutes les infor­ma­tions con­cer­nant son tra­vail de jour­nal­iste et d’artiste.

Une cam­pagne de sol­i­dar­ité active doit s’en­gager pour sa pro­tec­tion immé­di­ate. Nous con­nais­sons trop les con­di­tions d’in­car­céra­tion en Turquie, les pres­sions exer­cées à l’en­con­tre des femmes, le zèle de cer­tains élé­ments anti-kur­des, pour nous taire. Plus que jamais Zehra Doğan doit fig­ur­er dans les listes des nom­breux-ses jour­nal­istes à défendre, et en tant qu’artiste égale­ment, recevoir le sou­tien de ses pairs. Faire savoir que la nou­velle de sa déten­tion est arrivée jusqu’à nous, et que nous serons vig­i­lants, tout comme nous l’avons récem­ment été pour d’autres otages poli­tiques, est la pre­mière des pri­or­ités. Partagez donc cet arti­cle sur les réseaux soci­aux, le plus que vous pour­rez. Repro­duisez-le sur vos blogs, vos mag­a­zines web, il est fait pour cela.

Son entourage et ses proches sauront très vite nous guider dans cette sol­i­dar­ité de moyen terme, qu’il fau­dra très vite engager, la plus large possible.

Image à la une Refik Tekin


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