Mizgin Tahir Omerî est considérée comme la première chanteuse lyrique internationale kurde. Le 17 juin prochain, à 20h30, elle donnera un concert au Centre culturel Pâle Huner à Diyarbakır (Amed).
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Des extraits d’un article publié sur Kürtler.com pour vous présenter Mizgin…
Mizgin Tahir Omerî
Née en 1976 à Dirbesiyê, district de Serê Kaniyê au Rojava, elle a grandi dans une famille amatrice d’art, avec ses 5 frères et 5 sœurs. Mizgin est immergée dans la musique dès son plus jeune âge, avec les berceuses que sa mère lui chante, et la musique jouée par son père, au saz. C’est à travers les chansons traditionnelles, les légendes et histoires populaires qu’elle s’initie à la culture kurde, et comme elle l’exprime “Elle se dote d’un esprit kurdophile”.
Jusqu’à ses 9 ans, Mizgin, se rend à l’école de Dirbesiyê, son village natal, puis continue sa scolarité à Serê Kaniye. Ses parents ne veulent pas qu’elle soit musicienne comme tous ses frères et sœurs. Ils l’envoient alors en Russie, pour qu’elle y poursuive des études. Elle commencera donc par étudier l’archéologie à l’Université, années durant lesquelles elle ne se coupera pourtant jamais de la musique. Suite aux encouragements de ses enseignants russes, elle débutera des études de musique. Lors de ces études, elle approfondira les apprentissages familiaux et populaires de son enfance, l’histoire des dengbêj, des bardes kurdes, la place des chansons et de la musique dans la culture kurde.
Mizgin, continuera pendant deux ans des études d’architecture et de musique en parallèle. Elle se préparera pour les concours du conservatoire et réussit à s’y intégrer en 1999.
Pendant une période, Mizgin travaillera avec Reşîd Sofî, en adaptant les chansons kurdes traditionnelles, à l’opéra et avec orchestre symphonique, constituant un répertoire de chansons classiques kurdes.
Elle traduit également deux opéras de Mozart en kurde, et leur offre sa voix, lors d’une large tournée qui comprendra les villes européennes, mais aussi Diyarbakır et Sulaymaniah…
Mizgin joue du piano, bağlama (instrument à cordes, traditionnel), erbane (tambour), violon, mais son domaine principal est la voix.
Elle rêve de réunir les légendes kurdes avec l’opéra, elle pense que l’opéra et la musique kurde ne peuvent que s’enrichir ensemble. Elle enseigne aux futurEs artistes d’opéra à l’académie de Cigerxwîn.
Mizgin Tahir précise que l’opéra peut sembler éloigné de la musique orientale. Mais en vérité, il y a des points communs avec la musique des dengbêj. L’opéra raconte des histoires, portées par différents personnages. Les dengbêj transmettent eux aussi, par leurs chansons, des histoires, des légendes. Mais pas que…
“L’oppression de la culture dominante, l’interdiction de la langue kurde, et surtout le patriarcat qui a enfermé les voix des femmes dans les quatre murs des maisons, ont fait que la musique kurde n’a pas pu évoluer librement et s’étendre internationalement.”
“Le souffle et les mélodies des dengbêj montrent des ressemblances avec l’opéra. Quant à la langue kurde, bien sûr, elle a des particularités, mais elle correspond tout à fait à l’opéra.”
“Dans mon premier album, j’ai chanté six airs d’opéra en kurde. Mon objectif était de démontrer qu’il était possible de chanter toutes les chansons, dans la langue kurde.”
“Seulement, il ne faut jamais oublier la tradition de dengbêj qui est dans les racines de la musique kurde. Les jeunes comprennent cela et pensent aujourd’hui différemment. S’ils/elles continuent sur ce chemin, ils/elles réussiront.”
“Il est aussi important de s’institutionnaliser. Nous avions besoin d’un orchestre, de bâtir l’opéra. Il ne faut pas oublier les efforts et aides de la Mairie de Batman, et du Centre culturel de la Mésopotamie (NÇM). Je pense que l’orchestre Hasankeyf a atteint son objectif. Les musiciens sont majoritairement nos élèves des académies de Cegerxwîn et Aram Tïgran.”
“Lorîka Adîloş” en kurde, veut dire “Bébé Adîloş”. Le titre qui donne aussi le nom à ce tout premier album sorti en 2009, vient du poème d’Ahmed Arif “Bébé Adîloş, traduit par Mizgin, et adapté à Verdi.…
“Yeka Neke” est le 3ème titre de l’album “Lorîka Adîloş”. Vous allez reconnaitre tout de suite Mozart… Mais vous pouvez aussi écouter la magnifique voix soprane de Mizgin, toujours en kurde, avec Bizet, ou encore Puccini…
Comme Mizgin Tahir Omerî disait, il ne faut jamais oublier les racines culturelles et artistiques. Finissons donc avec une note plus traditionnelle “Heyran”…
Pour comprendre aussi les points communs entre la musique traditionnelle kurde et l’opéra que Mizgin Tahir met en avant avec talent, faites vous plaisir, cliquez sur les articles d’Estelle Amy de la Bretèque anthropologue, éthnomusicologue, et musicienne… et survolez les enregistrements de dengbêj.
Cet article fut l’occasion d’une belle découverte pour Kedistan. Merci à Loez, notre ami et auteur invité de Kedistan, et au centre culturel Pâle Huner pour leur organisation…