Said Yüce, député AKP et mem­bre de la com­mis­sion des Droits de l’homme de l’Assem­blée nationale, a fait une déc­la­ra­tion. Il exprime que les députés et lui-même font “de grands efforts” afin de répar­er les injus­tices con­cer­nant les licen­ciements et “con­seille” à Nuriye et Semih, “d’ar­rêter leur grève de la faim, qu’il con­sid­ère par ailleurs con­tre les valeurs religieuses”. Voici, dans le respect du style ora­toire de ce min­istre, une tra­duc­tion fidèle de ses propos :

L’an­née dernière, nous avons vécu un événe­ment grave, le 15 juil­let. Même si cer­taines per­son­nes essayent de l’é­dul­cor­er, ou de le tir­er sur d’autres ter­rains, la Turquie a vécu un tel événe­ment. Il existe des trau­ma­tismes que cela a provoqué.

Ces struc­tures, qui ont infil­tré aus­si bien la bureau­cratie de la sécu­rité que le sys­tème de jus­tice, ont mal­heureuse­ment bous­culé et pour­ri tout. Des efforts max­i­mum sont faits pour répar­er et restruc­tur­er tout cela.

Les insti­tu­tions de l’E­tat turc n’ex­is­tent pas pour faire souf­frir les per­son­nes, mais pour instau­r­er la jus­tice. C’est pourquoi, mon con­seil à ces amis qui mon­trent cette réac­tion est celui-ci : ils devraient réclamer leurs droits avec un peu de patience et en restant en vie. La grève de la faim, n’est pas une solu­tion, ni une méthode.

Des man­i­fes­ta­tions telle que la grève de la faim ne sont pas des choses qui sont con­formes à nos valeurs religieuses. Ils peu­vent s’y pren­dre autrement. Seul Allah peut repren­dre la vie qu’il donne. C’est encore Allah qui donne le rızk [les moyens de sub­sis­tance]. Il arrive que le rızk se trou­ve sur le chemin, ou non. Il faut se ren­dre au des­tin et lui faire con­fi­ance. Que Allah pro­tège, si ces gens payent cela [il veut dire leur “résis­tance”] par leur vie, cela ne plaira pas à Allah.

Nous voilà bien avancés…

La seule cer­ti­tude, c’est que le “mes­sage” est enfin arrivé à leurs des­ti­nataires, plus de 70 jours après… Ou qu’ils sont bien obligé de pren­dre en con­sid­éra­tion une mobil­i­sa­tion qui ne faib­lit pas.

Mis à part le côté big­ot de la réponse, qui nous ferait écrire ici que trois prières à la vierge noire ou deux rites vau­dous vaudraient sans doute mieux qu’une man­i­fes­ta­tion, le fait qu’il s’agisse d’un “mem­bre de la com­mis­sion des droits de l’homme à l’assem­blée”, com­mis­sion par­avent, laisse penser que d’autres com­men­taires suiv­ront, davan­tage dans le sujet, et plus con­scients de “l’abcès” d’op­po­si­tion que con­stitue cette lutte qui com­mence à allumer l’ampoule…

Et pour le démon­tr­er, pen­dant ce temps-là, les sou­tiens et les inter­ven­tions poli­cières sur les man­i­fes­ta­tions sol­idaires se pour­suiv­ent...

Par exem­ple, à Kadıköy, nom­breuses gardes-à-vue des mem­bres des “Uni­ver­si­taires pour la Paix”, col­lec­tif dont l’ap­pel pour la paix “Nous ne serons pas com­plice de ce crime” a coûté le licen­ciement de la plu­part des 1128 enseignantEs ou chercheurEs uni­ver­si­taires qui l’avait signé. A Üskü­dar, et ailleurs, même scénario.

Autre exem­ple ou la sol­i­dar­ité est mise en scène dans de nom­breux théâtres :
Moda Sah­ne­si, Craft, Yol­cu, Tatavla Sahne, Tiy­a­tro Hâl, Ankara Bir­lik Tiy­a­tro­su, Oyun Atö­lye­si, Bulu, Açik Sahne, Gnom, Bam Istan­bul, Kar­ma Dra­ma Sahne, Ver­sus, Kuz­gun­cuk Sanat, Mim­baz, Neki, Alt Kat Sanat, Kadıköy Sahne, Altı­dan son­ra, Tiy­a­tro Pan, B Planı.….

A Ankara, le 15 mai, Tilbe Saran, comé­di­enne, Secré­taire Générale du syn­di­cat des comé­di­enNes, prend la parole, lors de la vis­ite de sou­tien des mem­bres du syn­di­cat à Nuriye et Semih.

Je remer­cie ces per­son­nes dignes pour nous avoir appelés à la con­science. Le fait qu’ils restent en vie, nous appelle toutes et tous à rester dignes égale­ment. Ce n’est pas “rester” dans la faim qui est un crime, c’est “laiss­er” dans la faim. Ce n’est pas nous qui com­met­tons ce crime, ceux qui le com­met­tent savent très bien quel crime ils com­met­tent. Nous, en tant que  syn­di­cat des comé­di­enNEs, en tant qu’artistes, sommes ici pour exprimer que nous sommes aux côtés de Nuriye et Semih, et de leur pos­ture limpi­de  claire, que nous prenons des forces d’eux, que nous allons tra­vers­er cette obscu­rité en la déchi­rant tous ensemble. 

Nous sommes ici pour les remerci­er. Nous sommes ici pour que cha­cun retrou­ve son tra­vail et son pain. Nous remer­cions encore une fois, Nuriye et Semih, pour avoir pour­suivi ce voeux, ce désir depuis 67 jours, sans céder, avec autant de déter­mi­na­tion. En vérité, nous atten­tons le moment où nous célébrerons tous ensem­ble la fin de cette résis­tance. Le fait que vous restiez en vie, nous redonnera à nous toutes et tous, notre con­science. Merci.

A Rot­ter­dam, aux Pays-Bas, sur la place “Cen­traal Sta­tion”, une grève de la faim de trois jours s’est pour­suiv­ie du 18 au 20 mai. Aujour­d’hui, le dernier jour, prise de parole des artistes, suiv­ie d’un concert.

Un groupe d’artistes vivant à Rot­ter­dam a fait, à l’ap­pel du musi­cien Efkan Şeşen, une grève de la faim de 3 jours, en sou­tien aux grévistes Nuriye Gülen et Semih Öza­kça qui revendiquent le droit de retrou­ver leur tra­vail. C’est égale­ment un salut que nous adres­sons à Kemal Gün, qui réclame la dépouille de son fils et qui est égale­ment en grève de la faim. Nous avons vu avec votre sou­tien, que nous ne sommes pas seuls. Vous avez mul­ti­plié nos voix avec vos échanges et chan­sons, et nos voix se sont unies pour porter plus loin. 

Nous voulons seule­ment que les voix de celles et ceux qui sont oppriméEs soient enten­dues. Nous voulons que les autorités ten­dent l’or­eille et écoutant la voix de celles et ceux qui mènent une lutte légitime et avan­cent sur le chemin qui mène à la mort, que les erreurs com­mis­es soient réparées avant qu’il ne soit trop tard. Il s’a­gi­rait d’un crime con­tre l’hu­man­ité. Nous voulons qu’une tragédie humaine, qui peut se pro­duire demain, soit empêchée… 

En tant qu’artistes sen­si­bil­isés, nous avons lancé cette action de grève de la faim sol­idaire spon­tané­ment. Nous savions que nous pou­vions avancer ensem­ble dans cette péri­ode où le silence règne. Nous avons vu pen­dant ces trois jours, que nous ne nous sommes pas trompés et nous allons vers l’avenir avec plus d’e­spoir. Le poète a dit “Venez amis, soyons un”. C’est le moment d’être un, avec notre parole, notre musique, nos chan­sons et notre être. C’est le moment de s’élever con­tre l’in­jus­tice, l’op­pres­sion, la répres­sion envers la presse, les uni­ver­si­taires, les artistes, et plus impor­tant encore, con­tre le peuple. 

Se taire n’est pas digne de nous. 

 

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de Nuriye Gülmen et Semih Özakça suivez ce lien.

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