Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai le sentiment que si je vous parle encore des files d’attentes devant les tribunaux et des prisons turques surpeuplées, vous allez atteindre l’overdose…
Alors j’ai eu envie de tourner mon regard ailleurs, vers un ailleurs qui est aussi le vôtre.
Oui, je vais vous parler de cette Europe qui faisait rêver ici et se déplacer tant de mes compatriotes, il y a peu encore.
CertainEs y ont même refait leur vie, et friment une fois par an, en revenant avec une grosse valise à roulettes, avec un billet de Turkish Airlines.
J’ai, moi aussi, autrefois, fait ces voyages… C’était il y a longtemps.
Dans les années 1980, puis 1990, certains “touristes turcs” ne prenaient qu’un aller-simple. Les grosses valises allaient vers l’Europe. Il se mêlait au flot, des familles qui n’avaient rien de “réfugiés politiques”, mais plutôt des contrats de travail sur pattes pour Peugeot, Michelin, ou le charbon et l’acier allemand. De jeunes gens aussi, qui se découvrait un appétit de politique, à l’approche fatidique du “service militaire”… Même au début de ce siècle…
C’est l’Allemagne et la France, qui ont le plus attiré mes compatriotes. Avec ses un peu plus de 3 millions 500 mille Turcs et Kurdes de la diaspora en Europe, en situation comme vous le dites “régulière”, on ne peut pas dire qu’on vous ait “envahi”.
Vous avez paraît-il, rien qu’en France, reçu 84 Millions de touristes étrangers l’année dernière…
Aah ! Comme l’Europe est accueillante, ouverte, hospitalière… Non ?
J’avais cru remarquer en effet que vos gouvernements étaient prêts à donner 6 milliards à notre démocrature, pour qu’elle sous-traite les réfugiés des guerres, et empêche de passer ceux de vos guerres à distance.
D’ailleurs, le “président futur Super Président” a dit récemment avec la Chancelière allemande que même s’il y avait des retards dans les versements, quelques milliards étaient arrivés. Il y a même eu, je crois, une belle réunion de vos chefs de gouvernement sur une île de Méditerranée, pour débloquer quelques euros supplémentaires, pour “empêcher” l’accueil des réfugiés. Entre la surveillance de la Méditerranée, et la sous location de la Turquie “terre d’asile”, les réfugiés de tous les pays n’ont qu’à bien se… noyer.
Je me demandais encore, pourquoi c’était si compliqué d’avoir des visas…
Et quand je vois sur vos réseaux sociaux que vous commencez à condamner des personnes qui aident les migrants, les hébergent ou viennent à leur secours, je commence à me demander quelle Europe il y a là, pour laquelle on m’avait fait la retape depuis le début des années 2000.
Bon, c’est vrai que pendant l’état d’urgence, en Turquie, on condamne bien des écrivains… Alors sous état d’urgence, en France ou en Italie ou ailleurs, vous vous rattrapez en condamnant des humanistes qui aident leur prochain… Chacun sa façon de lutter contre le terrorisme. On est tous en guerre après tout ! Paraîtrait même que votre police prendrait exemple sur la nôtre, dans le maniement de la matraque…
Pour l’instant, ce sont les migrants qui se noient. Mais le grand navire Europe semble avoir de l’eau dans sa cale, et de la pourriture sur ses ponts.
Votre bateau n’est pas ivre, il a perdu son gouvernail.
Et pendant que vous jouez aux cartes vos capitaines, mon pays se fout sur la gueule, à coup de OUI et de NON.
Non, ça n’est pas pour savoir si nous voulons couler avec vous. C’est juste pour la forme. Notre président joue à la Reine de Blanche neige, et nous sommes sensés être son miroir. Et si le NON l’emporte, il y aura de la casse, soyez-en sûrs !
Mais j’oubliais… Vous avez aussi vos rois à tirer… Alors je vous ennuie, avec mes jeux de miroirs.