S’il fal­lait une preuve du pou­voir de nui­sance d’Er­doğan jusqu’en Europe, on vient d’en avoir une aujour­d’hui, avec cette attaque ultra-nation­al­iste con­tre un rassem­ble­ment kurde en  France.

Con­traire­ment aux autorités alle­man­des, qui pren­nent au sérieux les “men­aces” que profère en per­ma­nence le gou­verne­ment AKP, dis­ant à qui mieux mieux qu’il fera le néces­saire pour faire taire son oppo­si­tion, y com­pris dans les dias­po­ras en Europe, le gou­verne­ment français, pour­tant si prompt d’or­di­naire à voir des guer­res partout, sem­ble, dans sa fin de règne, sourd aux avertissements.

Une man­i­fes­ta­tion inti­t­ulée “La longue marche” est par­tie du Lux­em­bourg au début de ce mois. Une cen­taine de per­son­nes, représen­tant 19 nation­al­ités, femmes, hommes, jeunes, par­ticipent à cette marche dont les deux mots d’or­dre sont “La libéra­tion d’Ö­calan” et la demande “d’un statut poli­tique pour le Kur­dis­tan”. Il y a là, égale­ment 15 organ­i­sa­tions kur­des de la dias­po­ra européenne. Cette marche a comme point d’ar­rivée la ville de Stras­bourg, l’une des deux villes du “Par­lement européen”.

Les marcheurs sont accueil­lis, d’é­tape en étape, par des sou­tiens locaux dans les villes tra­ver­sées, et divers­es ini­tia­tives et activ­ités sont organisées.

Une soirée qui réu­nis­sait les man­i­fes­tants kur­des et leurs sou­tiens se déroulait aujour­d’hui dans une salle de la petite ville de Sarre-Union (67260). C’est le jour qu’ont choisi des groupes ultra-nation­al­istes turcs pour venir atta­quer le rassemblement.

Autour de 22h, un groupe organ­isé, d’ul­tra-nation­al­istes turcs, a sur­gi près de la salle de sport, où se déroulait le rassem­ble­ment d’é­tape, et, bien qu’ac­com­pa­g­né par des forces de l’or­dre, a men­acé celles et ceux qui étaient dans la salle aux cris de “Vous n’allez pas sor­tir de là vivants”.

[Video Face­book supprimée]

Sezai Uçar, du comité d’or­gan­i­sa­tion, présent dans la salle, inter­vient en ligne sur News Channel :
Il explique qu’il y a des dizaines de per­son­nes dans la salle, dont des per­son­nes âgées et des enfants. Puis il lance un appel pour venir sur place, afin de soutenir les per­son­nes qui s’y trou­vent. Cet appel, explique-t-il, a déjà été fait auprès des Kur­des des alen­tours, et des associations.

Yük­sel Koç, co-Prési­dent du KCDK-europe précise :

Les organ­isa­teurs avaient prévenu toutes les admin­is­tra­tions, les forces de l’or­dre, les autorités, la Mairie de Sarre-Union et ils les avaient aver­tis sur la pos­si­bil­ité de ce genre d’at­taques et de men­aces. Mal­gré cela les pré­cau­tions pris­es furent très légères. La man­i­fes­ta­tion à laque­lle des groupes inter­na­tion­al­istes par­ticipent égale­ment en sou­tien au peu­ple kurde est une marche pleine de sens et sym­bol­ique. Cette attaque est une ini­tia­tive organ­isée, encour­agée, voire aidée par le gou­verne­ment turc, surtout en péri­ode de cam­pagne de référen­dum. Le fait que ce genre de choses puis­sent se pass­er en France, en Europe, est une con­séquence des rela­tions à dou­ble face des pays européens avec la Turquie.

Cette attaque n’est pas faite sur un groupe de per­son­nes, mais, con­tre tout le peu­ple kurde. De la même façon que l’E­tat turc attaque chaque ini­tia­tive, chaque action démoc­ra­tique des kur­des con­cer­nant la lib­erté, comme dans le Kur­dis­tan nord (Bakur), au Roja­va, avec toutes ses forces mil­i­taires, il fait la même chose dans d’autres pays, avec ses forces paramilitaires.

Je répète, nos cama­rades doivent soutenir ces activistes de la marche et se ren­dre sur place, depuis les villes et vil­lages environnants.

Sezai Uçar, tou­jours depuis la salle :

Après l’ap­pel et la révéla­tion de ce qui se passe, les Kur­des et leurs sou­tiens vien­nent sur place, pour rejoin­dre la salle. Mais ils ne peu­vent pas pour l’in­stant attein­dre les lieux.

La porte est blo­quée par la police et les gen­darmes. Per­son­ne ne peut sor­tir. Les ren­forts sont arrivés. Mais nous enten­dons les slo­gans des nation­al­istes, ils ne sont pas loin…

Au bout de plusieurs heures, les gen­darmes ont repoussé les nation­al­istes, mais le groupe a indiqué qu’il reviendrait. C’est pourquoi, les man­i­fes­tants deman­dent à ce que des sou­tiens ail­lent marcher avec eux demain.

Ce n’est pas la pre­mière fois que des “attaques” de rassem­ble­ment kur­des se pro­duisent. On peut en compter une bonne dizaine depuis un an dans dif­férentes villes de pays européens, sans compter les men­aces d’in­ter­dic­tions proférées con­tre telle ou telle petite ini­tia­tive locale, et par­fois mis­es à exé­cu­tion, comme en Bre­tagne l’an dernier. Mais, dans le con­texte d’une cam­pagne poli­tique sur le référen­dum con­cer­nant le change­ment con­sti­tu­tion­nel, qui en Turquie se déroule dans la vio­lence, sous les men­aces et sous état d’ur­gence, l’ex­is­tence même de cette marche était “inad­mis­si­ble” pour les ultra-nationalistes.

Il n’y avait nul besoin d’être devin pour savoir qu’elle subi­rait à un moment ou à un autre des “attaques”. Le gou­verne­ment français sem­ble n’y avoir prêté aucune atten­tion, sans doute pris par d’autres “affaires”, et con­sid­érant sa rela­tion avec les autorités AKP comme “bonnes” et “sous contrôle”.

Aucun média, sauf cette télévi­sion, n’a relaté cet “inci­dent de par­cours” non plus, alors que la moin­dre des “vio­lences” est de suite inter­prétée comme “ter­ror­iste”…

On ne peut tolér­er que le bras d’Er­doğan vienne jusqu’i­ci pour opér­er sa répres­sion, et divis­er la dias­po­ra. Il l’avait fait en venant en per­son­ne à Stras­bourg, fin 2015. La leçon avait porté en Alle­magne, dont de gros con­tin­gents ultras avaient fait le déplace­ment. La défense aveu­gle des intérêts français en Turquie sem­ble frein­er cette prise de conscience.

Et pour­tant, cette phrase lanci­nante fut reprise dans les médias ces derniers mois :

Je suis con­va­in­cue que l’existence d’un régime total­i­taire en Turquie, sec­ouerait inévitable­ment, d’une façon ou d’une autre, aus­si l’Europe entière.
Aslı Erdoğan

Nous y voilà !


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