Başak Demirtaş s’exprimait dans un texte émouvant, révélant dans quel d’esprit elle a accueilli l’arrestation de Selahattin, son compagnon de vie et de route depuis l’enfance…
Selahattin, Co-président du HDP et député est actuellement en prison, comme une dizaine de ses camarades députés, et d’innombrables co-maires, membres de conseils, éluEs, femmes et hommes politiques, ainsi que journalistes, avocats, activistes, intellectuellEs, universitaires, artistes, quidam, féministes, cinéastes, LGBTI, auteurEs, toutes et tous otages politiques d’un régime fascisant.
Lorsque les premiers rayons de soleil ont posé une caresse sur mon visage, je ne dormais pas encore. J’ai peut être voulu le prendre comme un petit signe qui prouve que la Terre tourne toujours, et un prétexte pour laisser la lumière de l’espoir s’éveiller en moi.
Avant hier, dans la nuit, ils l’avaient amené de force. Il était quelque part dans une prison, mais ils n’avaient pas dit où.
Je me suis dit, “Si la Terre tourne toujours, des amiEs de toujours commenceront à revenir à la maison.” Je me suis mise au boulot, en me disant que je leur devais un bon accueil. J’ai fait des gâteaux, des börek, des pâtisseries. Il avait dit en partant, “Si je suis arrêté, pas d’ambiance de deuil à la maison.” Et il avait raison, le temps n’était pas à faire le deuil. Puisqu’ils avaient prononcé ce jour là, le mariage de Selo Başkan1avec la geôle, nous devions nous préparer comme pour une fête de mariage…
C’est ce qu’il se passa. Grâce à la solidarité de dizaines de milliers de belles personnes, le désespoir n’a pu jamais nous prendre prisonnierEs. Sur ces terres, en présence de milliers de morts sans tombeaux, de tombeaux sans noms, de meurtres sans auteurs, décrire ce qui nous revient comme notre part, comme une “souffrance”, serait honteux.
Si, tout au long de l’Histoire, les geôles ont été les auberges des voyageurs/ses qui savent d’où ils/elles viennent et où ils/elles vont, pour celles et ceux qui restent dehors, continuer la route doit devenir une dette d’honneur.
Si la route mène à la liberté, à la démocratie, à l’égalité et à la Paix, et si nous nous devons de ne pas faire demi-tour, il n’y a pas de place pour le pessimisme.
Femmes, qui, chaque beau jour, arrachent la vie de leur propres corps pour l’offrir à la Terre !
Nous continuerons à répondre à ceux qui nous posent la question “Qui mettra au monde, une personne comme toi ?” : “NOUS” !
Si les femmes se trouvent au coeur d’une lutte, au devant et dans les rangs, pas de panique, car :
NOUS VAINCRONS !Başak Demirtaş