Avec la demande d’arrestation de Dilek Öcalan, la vague répressive, qualifiée de tentative de “génocide politique” par le HDP lui-même, se poursuit au grand jour.
C’est un coup direct une fois de plus, porté au HDP et au DBP, Parti démocratique des régions, via un tribunal qui a délivré mercredi un mandat d’arrêt et de détention pour la jeune députée Dilek Öcalan et pour Ibrahim Ayhan, également, député d’Urfa, pour “propagande faite au service d’une organisation terroriste.” La confusion règne pourtant quand à l’application de ce mandat, puisque le procès a aussi été ajourné dans le même temps.
Dilek Öcalan est la nièce d’Abdullah Öcalan, dont il semble inutile de marquer le rôle et l’importance au sein du mouvement kurde, bien qu’il soit toujours tenu au secret en prison. Dilek encourt jusqu’à cinq ans de prison, en raison de sa participation aux funérailles d’un militant, Mehmet Yılmaz, inhumé en février 2016. Quant à Ibrahim Ayhan, il est accusé pour ses publications sur les réseaux sociaux. Lui aussi risque 5 ans de prison, devant ce type de tribunal institué pour les distribuer.
Ce mandat de détention intervient au lendemain du jour où l’adjoint et porte-parole du parti HDP, Ayhan Bilgen a été lui aussi arrêté, sur la base d’accusations de “terrorisme”.
Ayhan Bilgen, et une autre députée HDP, Meral Danış Beştaş, avaient été mis en état d’arrestation lundi soir, sur la base d’une décision de la 5ème Cour pénale de Diyarbakır. Meral a été immédiatement arrêtée dans les premières heures de mardi.
Selon les derniers chiffres, le gouvernement turc détient 12 députés HDP (y compris les co-présidents du parti Selahattin Demirtaş et Figen Yüksekdağ, 1473 membres de HDP et Parti des régions (DBP) et a également confisqué l’administration de 63 municipalités depuis l’échec de la “tentative de coup d’Etat” le 15 Juillet 2016.
Le HDP/DBP avait emporté 103 municipalités aux élections locales le 30 Mars 2014. Le gouvernement AKP a nommé des administrateurs/curateurs pour la gestion de 63 d’entre elles, et a arrêté un total de 74 co-maires.
Parmi les membres du parti HDP qui ont jusqu’alors été arrêtéEs, ils/elles représentent 132 sièges locaux du parti et 757 membres du conseil d’administration. Le nombre de membres militantEs du parti qui ont été mis en arrestation par la police a atteint 4.966, selon des chiffres donnés par des agences turques qui peuvent suivre encore au plus près cette vague répressive.
Plus que jamais, ce qualificatif de “génocide politique” s’applique, puisqu’il a bien sûr, aux yeux du régime, un aspect “ethnique”, s’agissant d’un acharnement à l’encontre d’une opposition démocratique qu’il qualifie de “pro-kurde”. Et à cette occasion, nous réitérons nos appels pour qu’ici, ce terme soit banni, puisqu’il participe de la propagande AKP et présente l’opposition démocratique en Turquie comme ethnique, séparatiste et nationaliste, aux antipodes de la réalité des propositions qu’elle défend.
Pour revenir à l’en tête de cet article, rappelons que Dilek, en temps que plus jeune élue, s’était vu confier la vice-présidence de la première séance de l’Assemblée parlementaire, lors de l’ouverture de la 25e législature. La présence à l’Assemblée nationale de Turquie d’un membre de la famille d’Abdullah Öcalan avait soulevé des réactions, le règlement intérieur imposant que les députés soient appelés par leur seul nom de famille, précédé de la formule Sayın qui remplace Monsieur, Madame, en français et traduit littéralement signifie “respecté‑e”.
On ne peut que constater que derrière la froideur et l’acharnement policier et politico-judiciaire, il y a aussi des animosités malsaines qui se satisfont avec des “symboles”.
Encore une chronique du fascisme ordinaire en Turquie.
Ajout de 9 février
la députée HDP Dilek Öcalan a été relâchée le 7 février. Mais une dizaine d’autres sont toujours derrière les barreaux. Et une grosse descente de police aurait eu lieu tôt ce matin dans plusieurs quartiers d’Istanbul, avec mise en garde à vue de plusieurs élus du HDP et du BDP : Şafak Ozanlı, Ercan Sağılma, Mesut Karcık, Resul Akgün, Canşah Çelik, Turgay Turgut, Eşref Yaşar, Fırat Aslanlar, Yüksel Yıldırım, Hikmet Duman et Ozan Hasret Yılmaz… Le jeu de “chaises carcérales” continue…