Voici les “chroniques de la révo­lu­tion kurde”, présen­tées par Ron­ahi TV. Un retour sur la semaine du 1er au 7 jan­vi­er 2017. Il s’agit de l’émission régulière en langue française, que vous trou­verez ici, chaque semaine.

Vidéo et texte en français

Gros titres :

  • OPÉRATION COLÈRE DE L’EUPHRATE : Ouver­ture d’une troisième ligne de front
  • SYRIE DU NORD : Nou­veaux crimes de l’ar­mée turque
  • SYRIE DU NORD : Nou­velle vague de réfugiés
  • PENDANT LA GUERRE… les enfants vont à l’école
  • ILHAM EHMED : Assem­blée démoc­ra­tique syri­enne — Analyse de la Révo­lu­tion kurde.
  • LE REINA – ISTANBUL : Attaque du Daesh — arrestations
  • MURAT KARAYILAN — PKK : Analyse de la Révo­lu­tion kurde
  • TURQUIE : Etat d’ur­gence permanent
  • VAN : Que font les curateurs ?
  • BAKUR — KURDISTAN DU NORD : Réfugiés ézidis, nou­veau drame
  • AMED : Quarti­er Sûr, le pro­jet  Tolède
  • FRANCE — TURQUIE : Manifestations

OPÉRATION COLÈRE DE L’EUPHRATE
OUVERTURE D’UNE TROISIÈME LIGNE DE FRONT

Les forces démoc­ra­tiques syri­ennes pour­suiv­ent leur offen­sive con­tre Daesh. L’ objec­tif est de libér­er la ville de Raqqa. Une nou­velle ligne de front a été ouverte… Doré­na­vant, trois colonnes armées con­ver­gent vers Raqqa.
Ce pre­mier jan­vi­er, une troisième colonne armée des forces démoc­ra­tiques syri­ennes a com­mencé à percer les posi­tions du Daesh au nord-ouest de la ville de Raqqa, depuis le vil­lage de Tal Seman, situé juste au sud de la ville d’Ayn Issa.
La deux­ième colonne a mené des com­bats trois jours durant pour repren­dre la ville de Mah­mu­di, où une cen­taine de mines ont déjà été neutralisées.
Puis, mar­di, une con­tre-offen­sive du Daesh a eu lieu à hau­teur de Jaber, là où se trou­ve la pre­mière colonne, celle qui perce depuis le front sud, aux bor­ds de l’Euphrate. Trois jours durant, les com­bats ont fait rage, jusqu’à ce jeu­di. Après avoir repoussé l’offensive, les FDS ont compt­abil­isé 49 mem­bres de Daesh tués.

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Pour­suiv­ant le Daesh, les com­bat­tants des FDS ont repris le site du château de Jaber, où ils auront encore mis un terme à la car­rière de 22 mem­bres du Daesh.
Les FDS se rap­prochent tou­jours plus de Raqqa : ils n’ont plus que 30 kilo­mètres à par­courir avant de pénétr­er dans la ville.

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Muham­mad Abo Adel est le com­man­dant des batail­lons du Shams al Shamal, soleil du nord, des batail­lons qui par­ticipent avec 150 com­bat­tants au sein des FDS à la libéra­tion de Raqqa.
Pour ce com­man­dant, ses com­bat­tants insis­tent pour par­ticiper aux opéra­tions mil­i­taires con­tre le Daesh. Ils sont nés dans ces vil­lages à l’ouest de Raqqa, et ils veu­lent sauver leurs proches et leurs par­ents de la tyran­nie du Daesh.
Muham­mad Abo Adel con­clut son inter­view en affir­mant qu’il est prêt avec ses hommes à libér­er toute la Syrie des mer­ce­naires du Daesh.

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Mal­gré ces bonnes nou­velles du front, il y a des com­bat­tants qui tombent sous les balles du Daesh, et par­mi eux, deux com­bat­tants des brigades inter­na­tionales du Roja­va ; il s’agit du com­bat­tant anglais Ryan Lock, surnom­mé Berxwedan Givara, et du com­bat­tant cana­di­en Anto­nio Tas­soned, surnom­mé Agir Ararat. Ce com­bat­tant est resté à son poste jusqu’à sa dernière balle en com­bat­tant le Daesh.
Pour les com­bat­tants des unités YPG, l’honneur de ces deux hommes qui ont con­sacré leur vie à la fra­ter­nité entre les peu­ples est un sym­bole et un exemple.

SYRIE DU NORD
NOUVEAUX CRIMES DE L’ARMÉE TURQUE

L’armée turque a encore bom­bardé cette semaine les vil­lages autour de Kobani. Des sol­dats turcs ont aus­si essayé de s’infiltrer au Roja­va. Et dans la région de She­h­ba, les bom­barde­ments de l’armée turque tuent des familles entières.
La nuit du 30 au 31 décem­bre, les forces armées turques ont agressé à l’arme lourde les vil­lages de Gir­be­nav, de Koran, de Carik­li et de Qer­e­mox. Le vil­lage de Qer­e­mox et celui de Gire Sor ont encore subi une agres­sion ce vendredi.
Mar­di soir, trois héli­cop­tères turcs venaient bom­barder le vil­lage de Tahunê, au sud de la ville de Çilaxa.
Au même moment, mais à hau­teur du vil­lage de Zora­va, près de Tir­bispiyé, des sol­dats turcs ten­taient de tra­vers­er la fron­tière. Il y a eu un cours engage­ment au cours duquel un de ces sol­dats turcs a été tué.

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A côté de ces attaques visant à provo­quer une réac­tion des unités YPG sur la fron­tière, il y a les frappes dra­ma­tiques des vil­lages de la région de She­h­ba, près de la ville de Bab et à hau­teur de la ville de Minbij.
Mar­di, une nou­velle frappe aéri­enne turque tuait 11 civils et en bles­sait d’autre, par­mi lesquels de nom­breux enfants qui ont été grave­ment brûlés lors des explo­sions. Il y a deux familles qui ont été anéanties, avec moins deux enfants, les frères Muham­mad et Ahmad Hamsho.

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Plus à l’est, tou­jours ce mar­di, près de la ville de Min­bij, à Ari­ma, une autre frappe aéri­enne turque a aus­si tué deux civils et en a blessé 15 autres.

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Le con­seil civ­il de la ville de Min­bij a dénon­cé le mas­sacre d’Arima. Sal­ih Mohamed, son représen­tant, déplore que les forces d’occupation turques com­met­tent tous les jours des crimes en se ser­vant du pré­texte de la guerre con­tre la ter­reur, et per­son­ne n’en par­le. Il en appelle donc aux organ­i­sa­tions inter­na­tionales de défense des droits de l’homme à ne pas rester silen­cieuses face aux mas­sacres com­mis par l’armée turque au nord de la Syrie.

SYRIE DU NORD
NOUVELLE VAGUE DE RÉFUGIÉS

L’invasion turque dans le nord de la syrie a provo­qué des vagues mas­sives de réfugiés. Les civils essaient de se met­tre à l’abri. Beau­coup se ren­dent dans le can­ton d’Afrin ou dans la ville de Minbij.

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Ayat Abdul Hakeem Sha­houd est une réfugiée en prove­nance de la ville de Bab. Avec des mil­liers d’autres per­son­nes de sa ville, elle a dû fuir les vio­lences de l’armée turque. Pen­dant un bom­barde­ment de l’aviation turque, sa mai­son s’est écroulée sur elle et sa famille. Avec une jambe cassée, il lui a fal­lu marcher 13 heures durant pour arriv­er à Min­bij, où elle est enfin en sécu­rité avec sa famille.

Ils sont 7 à vivre dans une seule pièce, chez un habi­tant qui a accep­té de les héberg­er pro­vi­soire­ment. Elle a besoin d’un abri et de soins pour sa jambe.
Sa belle-sœur, Rouaa Sabag, était inquiète pour les trois enfants. Main­tenant qu’ils sont Min­bij, elle croit qu’ils n’ont plus à red­outer les bom­barde­ments. Pour­tant, same­di dernier, deux femmes du quarti­er de Sebai Bahrat, à Min­bij, ont été blessées par des tirs turcs.
Ces femmes ont besoin d’aide. Mais le Roja­va est sous embargo.
Lun­di, 850 nou­veaux réfugiés sont arrivés aux portes du can­ton kurde d’Afrin, au vil­lage de Qat­ma. Ils ont été logés au camp Rober et au camp Al Shahba.
Ces réfugiés provi­en­nent surtout des villes de Raqqa, de Jarablus, de Palmyre et de la région d’Abu Kemal.

PENDANT LA GUERRE…
…LES ENFANTS VONT À L’ÉCOLE

Dans le can­ton kurde d’Afrin, la com­mis­sion chargée de l’enseignement pré­pare de nou­veaux pro­grammes sco­laires. Ces pro­grammes sont davan­tage con­formes aux attentes de la pop­u­la­tion. Et ils répon­dent aux objec­tifs de la révo­lu­tion au Roja­va. Les cours de musique sont égale­ment mis à l’honneur.
Un nou­veau manuel de musique a été édité par les autorités du can­ton d’Afrin. Ce manuel reprend les anci­ennes tra­di­tions musi­cales kur­des pour pré­par­er les généra­tions de demain à faire le lien avec leur passé et leur culture.
Ali al Issa, l’un des con­tribu­teurs à ce pro­jet d’éducation musi­cale, explique que 21.000 exem­plaires du manuel ont été com­mandés, mais qu’il n’y en a au final que la moitié de disponible, suite aux dif­fi­cultés causées par l’embargo.
Les pro­fesseurs de musique du can­ton dis­posent tous du manuel. Ils pour­ront amen­er les élèves et les étu­di­ants à la ren­con­tre d’artistes kur­des qui ont mar­qué leur art, comme Abdur­rah­man Omar, surnom­mé Bave Salah.

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A Afrin, deux fois par semaine, tous les élèves auront un cours de musique.
Dans les écoles sec­ondaires d’Afrin, les étu­di­ants auront aus­si des cours de jinéolo­gie. Jin, cela veut dire « femme ». La jinéolo­gie est cette dis­ci­pline nou­velle qui se con­sacre à la femme, à son his­toire, à l’histoire de son oppres­sion, à l’idéologie du machisme. En classe de jinéolo­gie, les étu­di­ants appren­nent com­ment la créa­tiv­ité des femmes était mise en valeur dans les com­mu­nautés naturelles, com­ment elles ont mis sur pied les pre­mières bases de l’éthique, com­ment elles ont joué un rôle moteur lors de la révo­lu­tion agraire. On y par­le des pre­mières déess­es. On y explique ce qu’est le mou­ve­ment de libéra­tion des femmes, et com­ment elles peu­vent se débar­rass­er de la men­tal­ité machiste.
1626 étu­di­antes du can­ton d’Afrin suiv­ent ces cours de jinéolo­gie, et par­mi elles, 200 étu­di­antes arabes.
Comme le dit Berivan Mohamed, elles ont dû se bat­tre pour avoir un cours qui dise la vérité sur l’histoire des femmes, pour que les femmes en sachent plus sur elles-mêmes, et qu’elles aient davan­tage con­fi­ance en elles. En ayant plus con­fi­ance en elles, dit Berivan, elles auront encore plus de force pour se libérer.
Emine Caw­is, une étu­di­ante arabe, explique que grâce à ce cours de jinéolo­gie, le rôle sig­ni­fi­catif des femmes est enfin mis en valeur, et cela doit per­me­t­tre une forme de renais­sance dans toute la communauté.

ILHAM EHMED — ASSEMBLÉE DÉMOCRATIQUE SYRIENNE
ANALYSE DE LA RÉVOLUTION KURDE

Ilham Ehmed est la co-prési­dente de l’assemblée démoc­ra­tique syri­enne. Elle s’est ren­due à Kirkuk dans le Kur­dis­tan du sud. Et elle a fait le point sur la sit­u­a­tion actuelle au Rojava.

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Ilham Ehmed a expliqué lors de son déplace­ment au Tevgera aza­di de Kirkuk, le mou­ve­ment pour la lib­erté de Kirkuk, en Irak, que le régime syrien ne perçoit la crise que tra­verse le pays que comme un prob­lème imposé depuis l’extérieur et ce, depuis le début de la révo­lu­tion syri­enne. Mais pour la co-prési­dente de l’assemblée démoc­ra­tique, si le peu­ple s’est levé, c’est parce que le régime ne voulait pas accepter la volon­té de change­ment social. Et puis, les groupes ter­ror­istes ont util­isé ce con­flit pour eux-mêmes. Mais la demande de change­ment de ces groupes était moins une demande de change­ment de régime qu’une demande de rem­place­ment de ceux qui sont à sa tête. Et donc, ces dif­férents groupes se sont com­bat­tus les uns les autres. Par con­tre, au Roja­va, explique Ilham Ehmed, il y avait dès le début un projet.
Ce pro­jet s’est con­crétisé dans la fédéra­tion du nord de la Syrie. Mais voilà que l’Etat turc n’a plus eu qu’un seul objec­tif : sup­primer les acquis des Kur­des. La Turquie a donc tout fait pour met­tre les YPG et le par­ti PYD sur la liste des organ­i­sa­tions ter­ror­istes. Puis, elle a attaqué le Roja­va. Les attaques sur la région de She­h­ba visaient à s’en pren­dre au can­ton d’Afrin. Mais en dépit de tout le sou­tien qu’ont pu apporter sur place les dif­férentes ban­des d’assassins fanatisés qui accom­pa­g­nent les forces turques, la Turquie n’y a con­nu que des défaites. Elle s’est alors tournée vers Bab, mais elle n’y engrange pas plus de résul­tats no plus.
Main­tenant, La Turquie utilisent le Daesh comme une excuse pour envahir la Syrie, mais le but véri­ta­ble de la Turquie, c’est de dis­soudre la fédéra­tion de la Syrie du nord.

LE REINA — ISTANBUL
ATTAQUE DU DAESH — ARRESTATIONS

La nuit du nou­v­el an, 39 per­son­nes ont été tuées dans une dis­cothèque d’Istanbul, le Reina. La fusil­lade a été revendiquée par Daesh. Les auteurs de cette attaque courent tou­jours. En revanche, les man­i­fes­tants social­istes qui ont dénon­cé les respon­s­abil­ités poli­tiques dans cette tuerie ont été arrêtés.

Peu après l’attentat, la police turque arrê­tait 14 per­son­nes. Des jour­nal­istes, comme Ismi­naz Temel, de l’agence de presse ETHA, trois avo­cats du bureau des avo­cats opprimés, Sezin Uçar, Gül­han Kaya et Diren Karabag, ain­si que des mem­bres du par­ti social­iste des opprimés, l’ESP et du SGDF, la fédéra­tion des asso­ci­a­tions de la jeunesse socialiste.
Dès le lende­main, les deux asso­ci­a­tions social­istes et les représen­tants du par­ti HDP dénonçaient ces arresta­tions devant les portes du tri­bunal de Çaglayan. Par­mi les clameurs des man­i­fes­tants, on entendait : « les assas­sins sont libres, les man­i­fes­tants sont enfermés. »
Gül­süm Agaoglu du comité cen­tral du par­ti HDP, a estimé que les mas­sacres se nor­mal­i­saient. Pour Deniz Bakir, qui s’exprimait pour l’agence ETHA, les mas­sacres qui se pro­duisent en Turquie depuis deux ans s’insèrent dans la mise en place dans le pays de la dic­tature d’un seul homme.

MURAT KARAYILAN — PKK
ANALYSE DE LA RÉVOLUTION KURDE

Sig­nalons aus­si que Murat Karay­i­lan, du PKK, a fait un lien entre l’attentat dans la dis­cothèque d’Istanbul et la ville de Bab. On sait que la Turquie a tou­jours soutenu Daesh et le front al Nos­ra pour com­bat­tre le mou­ve­ment kurde. Pour y par­venir, la Turquie s’est même éloignée de l’OTAN pour se rap­procher de la Russie.
Aujourd’hui, la Turquie se sert d’événements comme l’attentat d’Istanbul pour dire qu’elle est attaquée par Daesh. Jusqu’à présent, Daesh n’avait jamais attaqué la Turquie. Mais depuis le mou­ve­ment de l’armée turque sur Bab, Daesh sem­ble avoir pris ses dis­tances avec son allié. Jusqu’à présent, Daesh remet­tait sage­ment ses villes du nord de la Syrie aux mil­i­taires turcs. Mais cet accord n’était val­able que jusqu’à la ville d’Exterin, et pas plus loin. Selon Murat Karay­i­lan, c’est à Bab que le con­flit entre Daesh et la Turquie est né.

TURQUIE
ETAT D’URGENCE PERMANENT

L’Etat d’urgence qui a été décrété en Turquie est une nou­velle fois pro­longé de trois mois. Le par­lement turc vient de pren­dre cette déci­sion, ce qui per­met au Prési­dent Erdo­gan de ren­forcer son régime de plus en plus dictatorial.
Les mesures que l’Etat d’urgence implique sont nom­breuses et variées.
Il y a d’abord l’emprisonnement des élus et des jour­nal­istes. De nou­velles opéra­tions de police ont mené cette semaine à l’arrestation de dizaines de respon­s­ables poli­tiques de l’opposition. Ce ven­dre­di, à Aydin, dix per­son­nes ont été arrêtées, dont les admin­is­tra­teurs provin­ci­aux du par­ti HDP. A Adiya­man, 6 autres per­son­nes ont été arrêtées mar­di. Ven­dre­di, trois d’entre elles étaient envoyées à la prison de type E de la ville.
A Elazığ, 15 per­son­nes, dont des co-prési­dents provin­ci­aux du HDP (Ayfer Yil­maz) ou des admin­is­tra­teurs de dis­trict du DBP (Nihat Akdemir) ont été arrêtées ce ven­dre­di également.
A Urfa, la sit­u­a­tion est pire encore : Le co-bourgmestre élu de Viranşe­hir, Emrul­lah Cin, était retenu dans un hall sportif depuis le 12 décem­bre avec 185 autre per­son­nes arrêtées.
Tabassé par la police qui voulait « s’entretenir avec lui », il a été privé de soins pour éviter que l’hôpital ne rédi­ge un rap­port sur ses blessures. Un autre élu retenu dans ce cen­tre de tor­ture d’Urfa, Haci Bazo Yil­maz, député co-bourgmestre de la munic­i­pal­ité d’Halfeti, a con­nu deux attaques car­diaques liées aux con­di­tions affreuses dans lesquelles les per­son­nes arrêtées sont gardées.
Emrul­lah Cin a finale­ment ren­con­tré ses juges ce ven­dre­di : il a été envoyé avec 30 autres per­son­nes du groupe de 65 qui com­para­is­saient ce jour- là à la prison d’Urfa.
Tou­jours dans la foulée du coup d’Etat d’Erdogan et de cet état d’urgence, il y a encore eu la fer­me­ture de l’institut kurde d’Istanbul same­di dernier. Cette fer­me­ture a été annon­cée par le min­istère de l’intérieur dans le cadre de l’article 11 de l’Etat d’urgence . 94 autres asso­ci­a­tions sont égale­ment visées par cet arti­cle et par ces fermetures.
L’association « jus­tice pour Robos­ki, paix sur la terre », une asso­ci­a­tion fondée par les familles des vic­times du mas­sacre de Robos­ki, a ain­si été fer­mée sur ordre du min­istre de l’intérieur. Les admin­is­tra­teurs de cette asso­ci­a­tion qui se bat­taient pour qu’enfin les respon­s­ables de la tragédie de Robos­ki soient déférés devant leurs juges sont comme tou­jours accusés d’activités terroristes.

VAN
QUE FONT LES CURATEURS ?

On en a déjà sou­vent par­lé : les élus du par­ti DBP ont été rem­placés dans plusieurs villes par des cura­teurs. Que font ces cura­teurs qui tra­vail­lent pour l’AKP ? Quels change­ments de poli­tique ont-ils décidé ? Pour le savoir, nous sommes allés dans la région de Van.
La munic­i­pal­ité de Van, c’était un co-bourgmestre, Besir Kaya, aujourd’hui sous les ver­rous. C’était aus­si une poli­tique tournée vers l’émancipation des femmes. Il y avait à Van un cen­tre munic­i­pal pour les femmes, un bureau spé­cial pour la lutte con­tre les vio­lences faites aux femmes et puis aus­si un sys­tème de trans­port en com­mun gra­tu­it pour les femmes.
A Van, il y a surtout un con­seil des femmes. Mais le cura­teur Ibrahim Taşya­pan est passé par là : au con­seil des femmes, il a nom­mé ce ven­dre­di un homme. Et toutes les réal­i­sa­tions men­tion­nées ci-avant ont été supprimées.
Dans le dis­trict d’Erçis, tou­jours à Van, Şirin Yaşar, le gou­verneur qui fait main­tenant office de cura­teur, a résumé dans un change­ment sym­bol­ique toute la portée de l’œuvre des curateurs :
La munic­i­pal­ité DBP avait créé un vig­no­ble, qui avait été ouvert le 1 avril 2015. Ce vig­no­ble com­mé­morait le géno­cide des Arméniens un siè­cle plus tôt. Sur le fron­ton du vig­no­ble, un mot dans les trois langues turque, arméni­enne et kurde : le mot « paix ». Ce mot a dis­paru dans ses ver­sions kur­des et arméni­ennes avec l’arrivée du curateur.

BAKUR — KURDISTAN DU NORD
RÉFUGIÉS ÉZIDIS — NOUVEAU DRAME

Les ézidis de Sen­gal vivent un nou­veau drame. Il y a 3 ans, ils avaient fui les mas­sacres com­mis par Daesh. Beau­coup s’étaient réfugiés au Kur­dis­tan du nord, à Amed. Aujourd’hui, le cura­teur de la ville a fer­mé leur camp, et les Ezidis ont été déportés vers des camps gérés par l’AKP. Ces camps sont réputés pour être des lieux de recrute­ment du Daesh.
Les réfugiés de Sen­gal qui avaient trou­vé refuge à Amed, la cap­i­tale du Kur­dis­tan du nord, en Turquie, vivaient dans le camp de réfugiés de Fidan­lik. Ils étaient pris en charge par les autorités munic­i­pales et par la pop­u­la­tion. Médecins sans fron­tières soignait ces Ézidis qui avaient survécu au géno­cide. Des psy­cho­logues tra­vail­lant pour des ONG inter­na­tionales s’occupaient égale­ment des réfugiés ayant subi des traumatismes.
Et puis, les élus de Yenise­hir ont été empris­on­nés et rem­placés par un cura­teur, Mehmet Güzel.
Une fois en place, ce cura­teur a décidé de fer­mer le camp de réfugiés de Fidan­lik et de ren­voy­er tous ses occu­pants vers des camps AFAD, à Nusey­bin et à Mydi­at, des camps gérés par les autorités d’Ankara. Ces camps AFAD sont depuis leur créa­tion au cen­tre de toutes les dis­cus­sions : vio­ls, abus sex­uels, quartiers généraux pour le Daesh qui y loge, s’y entraine et recrute.
Pour faire par­tir les réfugiés ézidis, le cura­teur a eu recours à plusieurs manœu­vres : inter­dic­tion a été faite aux employés de la munic­i­pal­ité de se ren­dre dans le camp, on a men­acé de couper l’eau et l’électricité, on a fait des promess­es de départ vers l’Europe, on a posé de bar­belés partout autour du camp, le camp a été entouré de gen­darmes. Et puis, finale­ment, ce ven­dre­di, les tentes ont été démon­tées et les 1250 réfugiés ont été expulsés.
Rap­pelons aus­si que les réfugiés ézidis n’ont jamais eu de statut légal de réfugié en Turquie.

AMED — QUARTIER DE SÛR
LE PROJET TOLÈDE

Sûr, c’est le quarti­er his­torique de la ville d’Amed, égale­ment con­nue sous le nom turc de Diyarbakir. Aujourd’hui, Sûr est un quarti­er détru­it. Les forces turques ont rasé des églis­es et des mosquées his­toriques, de même que des bâti­ments vieux de 300 ans. La Turquie tente de jus­ti­fi­er ce crime en faisant une com­para­i­son avec la ville de Tolède qui avait été recon­stru­ite après la guerre d’Espagne.

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Le 28 novem­bre 2015, le bâton­nier de la ville d’Amed, Tahir Elçi, est assas­s­iné devant l’un des mon­u­ments his­toriques de sa ville. Plusieurs témoins ont con­fir­mé que ce meurtre avait été organ­isé par les forces de l’ordre turc.
Juste après son assas­si­nat, le cou­vre-feu était déclaré sur le quarti­er de Sûr. Ce sera le début d’une de ces vagues atro­ces de vio­lence qui ont sec­oué le Kur­dis­tan du nord. Des cen­taines de vic­times, des mil­liers de maisons détru­ites. Et aujourd’hui encore, les destruc­tions de maisons continuent.
Sur les images satel­lite, on dénom­bre 1300 maisons détru­ites rien que pour la zone de Hasirli.
Mais les pre­miers min­istres et les min­istres de l’AKP répè­tent en chœur qu’ils fer­ont de Sûr une nou­velle Tolède, que tout sera recon­stru­it ; mais ce 28 décem­bre, les pro­jets du nou­veau Sûr ont été dévoilés.
Une com­pag­nie proche du gou­verne­ment, BHA plan­ning, s’occupera des travaux. Il s’agira de con­cré­tis­er la destruc­tion totale de Sûr, d’y percer des larges routes là où il n’y avait que des ruelles. L’objectif est sécu­ri­taire : per­me­t­tre aux 6 nou­veaux postes mil­i­taires qui encadreront Sûr de com­mu­ni­quer entre eux.
La co-prési­dente de la cham­bre des archi­tectes de Diyarbakir, Bus­ra Sadak, a éval­ué le nou­veau projet.
Elle explique que les routes prévues se fer­ont sans tenir compte des bâti­ments cadas­trés. Grâce à l’etat d’urgence, les délais légaux qui enca­drent la pub­lic­ité de tels plans a été ramenée à 15 jours. C’est beau­coup trop peu pour mobilis­er les pro­prié­taires et les habi­tants de Sûr et men­er une action concertée.
Or, les familles de Sûr ne veu­lent en aucun cas vivre à prox­im­ité de postes mil­i­taires. Les gens veu­lent sim­ple­ment retourn­er vivre dans leurs anciens quartiers, là où ils vivaient.
Pour Sadak, le pro­jet ignore totale­ment les rési­dents de Sûr. Il sup­primera la richesse struc­turelle de ce quarti­er historique.

FRANCE — TURQUIE
MANIFESTATIONS

Vous le savez, l’homme qui a assas­s­iné le 9 jan­vi­er 2013 à Paris trois mil­i­tantes kur­des s’appelait Omer Güney. L’enquête menait directe­ment en Turquie, dans les bureaux des ser­vices secrets. Mais la jus­tice française a retardé la tenue du procès, et le prin­ci­pal sus­pect est mort en prison…
Sakine Can­siz, Ley­la Söyle­mez et Fidan Dogan avaient toutes trois été tuées de trois balles tirées à bout por­tant dans la tête par Ömer Güney, un tueur qui avait reçu ses instruc­tions du MIT, les ser­vices secrets de Turquie. Ömer Güney est mort à 34 ans à l’hôpital de la Salpetrière à Paris, son procès n’aura donc pas lieu.

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A tra­vers toute l’Europe, des man­i­fes­ta­tions ont dénon­cé devant les con­sulats de France la com­plic­ité de la République française avec le gou­verne­ment turc qui dépêche des assas­sins sur le ter­ri­toire français.
A Berlin, des pan­neaux bran­dis par les man­i­fes­tants résumaient le sen­ti­ment général : La France a sac­ri­fié la Loi à Erdogan.
A Frank­fort, à Hanau, à Zurich, à Brux­elles, à Copen­h­ague, à Mar­seille et à rennes, les man­i­fes­tants ont dénon­cé le silence de la France et les assas­si­nats poli­tiques qui se com­met­tent sur son territoire.

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Rap­pelons aus­si qu’en Bel­gique, le jour­nal­iste Maxime Aza­di, qui suit de près ce procès et qui se trou­vait ici en com­pag­nie de Fidan Dogan, a été arrêté ce 15 décem­bre par les autorités belges, sur man­dat d’Interpol émis par la Turquie. Maxime Aza­di a finale­ment été relâché 13 jours plus tard, mais son sort n’a tou­jours pas été fixé par le juge belge de Turnhout.